Farce de Maître Pierre Pathelin (la) (analyse détaillée)
Publié le 23/10/2018
Extrait du document
«
formes élémentaires du comique (cari
cature, déguisement, coups de bâton,
grimaces, scatologie)
et privilégié le
comique du
bon tour et de l'imitation,
à tel
point que Pathelin s'imite lui
même quand il raconte à Guillemette
de quelle manière il a dupé le drapier
(v.
406-435), et le comique de situa
tion,
en particulier la répétition,
l'inversion et l'interférence des séries,
pour reprendre les distinctions de
Bergson.
Cependant, le dramaturge
recherche des situations qui révèlent le
caractère des personnages.
Aussi, plu
tôt que de reprendre des allégories ou
de s'attarder à la simple satire sociale
qui demeure anodine, même si le mar
chand, l'avocat et le juge sont présen
tés sous des couleurs peu flatteuses,
a
t-il peint des individus qui ont un
caractère propre.
Pathelin, qui revivra dans Rabelais
sous les traits de
Panurge comme Guil
laume sous ceux de Dindenault, est le
personnage central sur lequel repose
toute l'action.
Intelligent plutôt que
savant, il a appris à connaître, à mani
puler
et à tromper les hommes, maîtri
sant l'art de la parole, faisant preuve
d'un éblouissant génie inventif,
comme le
montrent les scènes où il
mime la maladie et la possession
démoniaque.
Mais cet homme retors
est réduit à la misère après avoir connu
échecs
et châtiments infamants, tels
que le pilori.
Aussi apparaît-il comme
un avatar de Renart : à l'exemple de
celui-ci, il
.fait l'éloge du père de sa vic
time
dont il excite la convoitise pour
endormir la méfiance, il feint la mort
pour triompher de
son adversaire et
utilise diverses langues.
Son intelli
gence connaît des défaillances : cédant
à l'impatience, victime de
ses intempé
rances de langage, trop sûr de lui, il est,
comme Renart,
une figure du filou,
du fripon divin, dont la finesse s'ac
compagne d'une certaine sottise, tan
tôt triomphant, tantôt vaincu ; de là la nécessité
de plusieurs aventures et,
dans
Pathelin, trois farces en une seule
pièce.
Enfin, Pathelin est-il
un véritable
avocat?
On le penserait, d'après la
considération dont l'entourent le ber
ger et le juge, et par son attitude à
l'audience.
Mais il est traité
d'« avocat
sous
l'orme» (v.
13), d'« avocat d'eau
douce» (v.
756) : ne serait-il pas un
clerc de bas étage, mal défini, un bra
connier
en marge de la profession
d'avocat, qui hante les tavernes à la
recherche de clients ou de victimes ?
De même, Guillemette, sa femme,
peut être
tout aussi bien une petite
bourgeoise qui défend sa maison
contre l'extérieur, une ménagère aver
tie, qu'une femme peu farouche, si l'on
en juge par son nom, qui était celui des
ribaudes, et par le fait que l'imprimeur
Pierre
Levet a utilisé, pour représenter
Pathelin et son épouse, la gravure qui
illustrait la
"Ballade de la grosse Mar
got" dans son édition des Poésies de
Villon.
Cette -ambiguïté
se retrouve partout.
Ainsi dans la scène où l'avocat simule
la mort, qui atteste sinon une certaine
déchristianisation,
du moins la vo
lonté de dédramatiser la
mort: l'auteur
se moque-t-il des Arts de bien mourir,
des horribles descriptions du trépas,
qui connaissent alors une grande
vogue, ou veut-il parfaire le portrait de
son héros,
dont il suggère la démesure,
le mépris des valeurs religieuses, le
cynisme, l'absence de
tout remords, et
dont il fait l'antithèse de l'avocat chré
tien, pitoyable aux pauvres, de saint
Yves, le patron de la profession ? Le
langage devient un jeu qui traduit la
jouissance phonétique d'une réalité
chatoyante et
un malaise certain sur sa
fonction, sa nature et son rôle dans la
société, jeu où l'on évolue entre sens et
non-sens :
ce qui a un sens pour les uns
(Guillemette, les spectateurs)
n'en a
pas pour d'autres (Guillaume),
ou
encore on ne comprend pas la même.
»
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