Érec et Énide (résumé & analyse)

Érec et Énide

Érec et Énide est l’histoire d’un couple menacé par l’excès même de sa tendresse et qui se sauve par l’action héroïque. L’association, dans le titre, des deux partenaires de ce couple permet de rattacher le poème à la tradition, alors en genèse, du roman idyllique : il y avait Floire et Blanchefleur (et aussi Tristan et Iseut); il y aura Amadas et Ydoine, Aucassin et Nicolette et beaucoup d’autres œuvres dont il n’est pas lieu de traiter ici. Mais à la différence de maint autre roman idyllique, le poème ne fait pas remonter à l’enfance des deux personnages leur ferveur réciproque, et la première partie (le premier vers) est en fait le récit de la conquête d’Énide par Érec. L’ouvrage est donc constitué de deux éléments bien distincts : structure qui prévaudra dans tous les romans ultérieurs du poète.

Celui-ci l’affirme avec netteté dans son prologue : « Il a trait d’un conte d’aventure/Une molt bele conjoin-ture ». D’un récit oral confus et mal structuré, il a tiré une dispositio harmonieuse. Chrétien de Troyes se pose comme l'homme de la mise en forme : il sait agencer une intrigue et s’en vante avec orgueil. Sous cette revendication de qualité se devine autre chose : un plaidoyer latent pour une culture vernaculaire dont Chrétien s’est fait le champion et qui est en train de conquérir ses lettres de noblesse. Cette culture se détourne des modèles antiques et s’enracine dans un terroir : celui de tout un folklore immémorial, dans lequel interviennent la chasse de l’animal fabuleux (le Blanc Cerf, dont la poursuite fait l’objet de la première aventure) ou le combat contre un adversaire redoutable retranché dans l’Autre Monde (le duel final d’Érec contre Mabonagrain