EMILE. Personnage de Jean-Jacques Rousseau

EMILE. Personnage de l’ouvrage homonyme ( 1762) de Jean-Jacques Rousseau. En écrivant son traité d'éducation, Rousseau, qui se donnait comme le précepteur idéal, avait besoin de refléter les résultats de son système sur un élève idéal ; c’est pourquoi il créa Emile. Ce personnage, dont l'existence dépend si étroitement du traité qu’elle n'en est pour ainsi dire pas «démêlée», n’est guère décrit en lui-même, car sa présence est constamment occultée par l’énoncé des principes. Nous essaierons d’écarter ces principes et d’en extraire, sinon le visage d'Emile, du floins son «histoire ».

Heureusement né, Emile est un enfant bien formé, vigoureux et sain qu’on a choisi d’éle-ver à la campagne pour le soustraire aux influences pernicieuses. On lui laisse toute la liberté possible. Ne dépendant ainsi que des choses, il se fait vite une juste idée de ses rapports avec elles et mesure leur importance ou leur fonction sans que personne l’en instruise. Les mots qu’il saisit peu à peu conviennent à nommer ces rapports et ne l'encombrent pas d'un vocabulaire plus étendu que le nombre des idées qu’il peut former. Ce qu'il sait, seule l’expérience le lui a indiqué; ce qu'il désire, il l’obtient dans la mesure de ses forces et de sa volonté. Se formant au rythme de la nature, dont aucune influence extérieure ne vient, en lui, étouffer la voix, il devine d’instinct comment se diriger et se conduire et c’est librement qu’il vaque aux occupations de son âge qui, toutes, prennent figure de jeu puisque personne ne l’oblige à préférer l’une à l’autre. Exercé à se suffire autant qu’il est possible, il n'a pas sans cesse recours aux autres, mais juge, prevoit et raisonne sur tout ce qui se rapporte immédiatement à lui.