ÉLECTRE de Giraudoux
Publié le 17/01/2019
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ÉLECTRE, pièce en 2 actes de Giraudoux (1937). C'est d'abord, selon l'expression de l'auteur, « le mythe de la vérité ». La jeune fille pure à qui, contre toute vraisemblance, il fait ignorer ce qui a eu lieu à Argos et dans le palais depuis vingt ans, devient détective et, par une enquête quasi policière, cherche à faire la lumière sur le passé inquiétant et le présent trouble qu'on lui cache. La « chasseresse », alors, « prend la piste », curieusement aidée dans sa quête par un double vaudevillesque de Clytemnestre, la frivole Agathe, dont le couplet, ou « grand air », de la libération des femmes (II, 6), par une sorte de mise en abyme, fait éclater la vérité au grand jour. Quand enfin la lumière est faite — Électre/électricité ? —, la tragédie, dont les rouages sont clairs, peut se dérouler toute seule, et le Mendiant n'a plus qu'à « raconter » le double meurtre, inscrit d'avance dans l'histoire et dont Oreste n'est que le docile exécutant. La pièce passe presque sans transition de l'atmosphère bruyante d'une fête villageoise (c'est le jour du mariage d'Électre avec le jardinier) à une extraordinaire « nuit de noces » entre frère et sœur lorsque Électre, après avoir retrouvé et reconnu Oreste, le « crée » en quelque sorte et lui insuffle une haine toute neuve. Un jardinier d'opérette qui se sent exclu du « jeu » se hausse tout à coup au niveau tragique pour exhaler avec une émotion contenue et d'autant plus méritoire son « lamento-tunnel », le plus long monologue, paraît-il, de tout le répertoire théâtral ; mais il se fait aussi critique littéraire et commentateur érudit des effets et ingrédients de la tragédie. Des personnages surnaturels ou fantastiques circulent entre les colonnes du palais royal : les Érinyes, incarnation à la fois gracieuse et inquié tante du Destin, « grandissent et grossissent à vue d'œil » ; un étrange Mendiant, poète ivre, qu'on soupçonne d'être un dieu, mais qui n'est peut-être qu'un regard lucide sur la tragédie. Deux leitmotivs dominent tous les autres et courent à travers la pièce : « faire signe » (surtout aux dieux) et « se déclarer ». « Deviens celui que tu es » pourrait être la devise de tous les personnages : Électre deviendra louve et mordra ; Égisthe aussi « se déclarera » et sa conversion de tyran opportuniste en roi généreux complique singulièrement la tâche d'Électre, qui refuse à la fois la concession, le pardon et même le délai salvateur. La Justice intégrale entraîne l'incendie qui détruit de fond en comble la ville d'Argos, mais sur les ruines se lève une aurore d'apocalypse.
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