Edmund HUSSERL: Leçons pour une phénoménologie de la conscience intime du temps (Résumé & Analyse)
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
«
Mais tout cela n'est pas du temps objectif : « le maintenant vécu n'est pas, pris en lui-même, un point du tempsobjectif» (p.
9).
Le temps objectif n'est pas vécu.
La phénoménologie s'intéresse au vécu.
Le vécu du lieu, de laqualité (le « rouge » par exemple) ne se confond pas avec l'objectivité du lieu ou de la couleur.
Parfois, il peut yavoir recouvrement du « rouge » senti et du « rouge » objectif, mais Husserl ne s'intéresse qu'à l'appréhension, auvécu du « rouge ».
Il faut distinguer le « senti » phénoménologique du « perçu » qui renvoie à l'objectivité de lachose.
Arriver à distinguer les deux, c'est précisément faire la phénoménologie de la connaissance.Cette conception de l'essence du temps permet de comprendre la différence, sur la question de l'origine du temps,entre la phénoménologie et la psychologie.
Pour le phénoménologue, « cette question de l'origine est orientée versles formations primitives de la conscience du temps dans lesquelles les différences primitives du temporel seconstituent, dans un mode intuitif et propre, comme les sources originaires de toutes les évidences relatives autemps »Pour Husserl, les vécus n'ont à être insérés dans aucune réalité :« Nous n'avons affaire à la réalité que dans la mesure où elle est visée, représentée, intuitionnée, conceptuellementpensée.
Ce qui, à l'égard du problème du temps, veut dire : ce sont les vécus de temps qui nous intéressent.
»Il faudra donc explorer, sur la question des origines, comment s'appréhende la question de la durée, comment naît laconscience du temps, à savoir qu'à chaque temps appartient un temps antérieur et un temps postérieur.Les leçons sont divisées en trois sections.
Nous reprenons ici cette subdivision.
I.
La théorie de Brentano sur l'origine du temps
Lorsque nous écoutons une mélodie, si un nouveau son retentit, le précédent n'a pas disparu sans laisser de trace.Sinon nous serions incapables de discerner les relations entre sons qui se suivent l'un l'autre.
Nous n'aurions, àchaque instant, qu'un seul son, voire même une phase vide entre le tintement de deux notes.
Or, nous avons laperception d'une mélodie.
En même temps, les représentations de sons ne demeurent pas telles quelles dans laconscience.
Si elles demeuraient sans modification, nous n'aurions pas la perception de la mélodie : ce serait lacacophonie.Il y a donc une modification spécifique qui se produit où, après la disparition de l'excitation nerveuse qui a produit -la sensation, celle-ci se transforme en représentation douée d'une détermination temporelle.
Cette modificationtemporelle évoluant en permanence, elle nous permet la représentation de la mélodie :« A chaque représentation donnée se rattache par nature une suite continue de représentations, dont chacunereproduit le contenu de la précédente, mais de telle sorte qu'elle attache sans cesse à la dernière le moment dupassé.
»Ainsi l'imagination est productrice ; elle crée un « moment », en vérité nouveau, des représentations, à savoir le «moment temporel ».
C'est donc dans l'imagination que se situe l'origine des représentations du temps.Jusqu'à Brentano, les psychologues avaient, sans succès, creusé la question.
Beaucoup pensaient que laconscience du temps venait de l'immanence de la sensation.
La perception de la durée subjectivement sentieviendrait de la persistance de l'excitation externe.
Mais c'est là une erreur.
« Durée de la sensation et sensation dela durée font deux...
Succession de sensations et sensation de la succession ne sont pas la même chose.
» En fait,la sensation, en passant dans l'imagination, reçoit « le caractère temporel qui se modifie sans cesse, et ainsi,d'instant en instant, le contenu apparaît de plus en plus repoussé ».
Cette modification n'a rien à voir avecl'excitation.
C'est le produit de l'imagination.La sensation produit une création : elle fabrique une représentation imaginaire, enrichie du caractère temporel.Brentano appelle cette opération « association originaire ».
Il en déduit l'inexistence de la perception de lasuccession et du changement.
Pour lui, lorsque nous croyons entendre une mélodie, ce n'est qu'une apparence quivient de la vivacité de l'association originaire.Il en est de même pour l'acquisition du futur et du tempsinfini : l'imagination forme, à partir du passé, la représentation du futur.
Brentano a encore montré que les espècestemporelles du passé ou du futur ne déterminent pas mais altèrent les éléments de la représentation sensibleauxquels ils se lient.
Il n'est que le présent qui n'altère pas une perception.
Mais, en même temps, le présent nedétermine pas.
La seule chose évidente, c'est que tout fait est perçu comme ayant un passé futur, un passé àvenir.Husserl critique alors cette théorie, en tant que psychologie : les vécus dont parle Brentano sont psychiques.
Ilssont objectivés.
Ils ont eux-mêmes leur temps, leur devenir, leur manière d'être produits.
De ce point de vue, laphénoménologie ne s'y retrouve pas.
Mais, en même temps, dans cette théorie, il y a un noyau phénoménologiquequ'il s'agit maintenant d'isoler.
Quand Brentano' que dans une succession apparaît un « maintenant » et, formantcorps avec lui, un « passé », on peut dire que « l'unité de conscience qui embrasse présent et passé est un Datumphénoménologique ».Husserl conteste seulement que le passé apparaisse dans cette conscience sur le mode de l'imagination.
Il contesteque la forme temporelle soit un contenu temporel ou encore un complexe de nouveaux contenus s'associant aucontenu temporel.
Même si Brentano n'est pas tombé dans l'erreur de tout réduire, à la manière du sensualisme, àde simples contenus primaires, même s'il a été le premier à avoir l'intuition de la séparation radicale des contenusprimaires et des caractères d'acte, Husserl pense que sa théorie ne donne pas le statut décisif qu'il mérite aucaractère d'acte qu'est la conscience du temps.
II.
Analyse de la conscience du temps
Husserl montre que la saisie d'objets temporels peut être interprétée comme saisie instantanée et comme acte quidure.
Toujours en prenant l'exemple de la mélodie, lorsque celle-ci se fait entendre, Je n'entends donc à chaque.
»
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