D'UN CHÂTEAU L'AUTRE de Louis-Ferdinand Céline (résume et analyse complète)
Publié le 24/10/2018
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D'UN CHÂTEAU L'AUTRE. Roman de Louis-Ferdinand Céline, pseudonyme de Louis Ferdinand Destouches (18941961), publié à Paris chez Gallimard en 1957.
Si le sujet autobiographique du roman est bien le séjour de Céline à Sigmaringen en compagnie des collaborateurs en déroute, sa structure binaire est celle d’un va-et-vient chronologique entre les années de Meudon (moment de l’écriture) et les quelques mois de Sigmaringen (moment de l’action). L’unité de l’ouvrage composé de visions éclatées, tient donc avant tout à l’unité de la voix du narrateur ainsi qu’à la récurrence de certains thèmes narratifs : la maladie de Mme Niçois, vieille patiente de Céline à Meudon, les rapports difficiles de Céline avec ses éditeurs, les trajets incessants du médecin en exil à Sigmaringen - du château où sont somptueusement logés les anciens dignitaires du régime de Vichy, aux ruelles du village où les réfugiés suscitent des émeutes de la faim. De cette « histoire brisée » émergent des morceaux de bravoure inoubliables : l’apparition fantastique à Meudon d’un monde de revenants asservis au nocher Caron du bateau la Publique ; la promenade du maréchal Pétain, impassible sous la mitraille ; les toilettes débordant sur le palier à Sigmaringen ; la capture du commissaire Papillon qui a tenté de franchir la frontière suisse ; le dîner chez Otto Abetz, ambassadeur d’Allemagne à Paris, où l’écrivain Alphonse de Châteaubriant pulvérise toute la vaisselle ; la visite à Pierre Laval qui nomme Céline gouverneur de Saint-Pierre-et-Miquelon (sic) ; le calamiteux voyage en train à Hohenlychen pour les obsèques de l’ancien
ministre Bichelonne. Le roman s'interrompt alors que Céline vient de porter secours à une femme prête à accoucher dans le train de Sigmaringen ; à Meudon, Mme Niçois vient de rentrer chez elle après un séjour à l'hôpital, au service des cancéreux.
Le choix fait par Céline d'évoquer son séjour à Sigmaringen apparaît, après des années d'oubli et de proscription, comme une décision délibérée de faire paraître « un ouvrage qui est malgré tout assez public, puisqu'il parle de faits bien connus [...] une petite partie [...] de l'histoire de France ».
«
livre, selon le mot de M.
Simonin, une
«science sauvage du sexe».
Le désir,
surtout féminin, s'y exprime crûment
et sans façons, bien loin des complica
tions ou des raffinements de l'amour à
la mode néoplatonicienne ou pétrar
quiste chanté ailleurs par les poètes.
Les ho:q1mes, mais surtout les femmes,
sont mus par une rage de jouissance
qui connaît peu d'interdits et donc peu
de transgressions.
Tous
se ruent au
plaisir pour parvenir à ce >, comme cette dame restée si
ardente en dépit des ans
qu'« on la
tenoit tousjours pour une jument
vieille
et reparée qui toute suragée
qu'elle estoit, hannissoit encore aux
chevaux».
Dans ce déferlement d'éro
tisme,
il n'est pas aisé de discerner ce
qui relève de l'observation ou des fan
tasmes de l'auteur.
Ces
« discours » sonnent le glas des
valeurs courtoises chevaleresques (tel
les
du moins que Brantôme se les
représente),
dont les procédures sont
répudiées
pour cause de lenteur et
d'inefficacité par les hommes comme
par les femmes :
« Aussitost assailly,
aussitost investi et
achevé», telle est la
maxime d'une grande dame, adepte
des conjonctions charnelles expéditi
ves; s'il est encore question de « ser
vir» les dames, c'est par révérence de
pure forme à la tradition (et au vocabu
laire).
Le réalisme l'emporte et ne
s'embarrasse pas de détours : « Car en
quoy peut monstrer
un brave et valleu
reux cavallier la generosité de son
cœur, qu'envers
une belle et honneste
dame, sinon luy faire parestre par effet
qu'il prise sa beauté et l'ayme beau
coup, sans luy user de ces froideurs,
respects, modesties et discretions que
j'ay veu souvent appeler, à plusieurs cavalliers
et dames, plustost sottises et
faillement de cœur que vertus
? » Les
« loix d'honneur >> sont donc oubliées
au profit des
>.
Hostile à toute répression du
désir, Brantôme place résolument
l'activité sexuelle
en dehors du champ
de la morale et de la religion.
Il
reconnaît peu de valeur à la fidélité, à
la pudeur ou à la chasteté.
De même
qu'à Montaigne, celle-ci lui apparaît
comme une vertu inventée par
les
hommes à l'usage des femmes.
La
sexualité et le plaisir charnel ne doi
vent pas être limités au cadre conjugal ;
le mariage, qui
n'a de légitimité que
sociale, afin de permettre la continua
tion d'une lignée, ne doit pas interférer
avec les élans du corps
ni avec ceux du
cœur.
C'est pourquoi Brantôme,
ardent partisan de la liberté des fem
mes à laquelle, sans doute,
il trouve
son compte,
se montre indulgent
envers l'adultère, inévitable contrepar
tie des mariages arrangés avec des
maris parfois.
»
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