Donner À VOIR, de Paul Eluard
Publié le 10/03/2019
Extrait du document
Donner À VOIR, recueil de Paul Eluard (1939), alternant poèmes et réflexions sur la poésie et l'art. Si « les Dessous d'une vie ou la Pyramide humaine » (1926), « Juste milieu » (1938), « Nuits partagées » (1932), « Appliquée » (1937), « les Songes toujours immobiles » et « Au fond du cœur » se rattachent nettement à l'inspiration surréaliste du poète, où la veille et le rêve s'équilibrent, les textes de la seconde partie (« Physique de la poésie », « l'Évidence poétique », « Peintres », « le Miroir de Baudelaire », « Premières Vues anciennes »), loin de marquer son éloignement du mouvement, mettent en relief ce qu'il lui doit : l'art a une portée morale et non seulement esthétique, il est le foyer d'une compréhension mutuelle, le poète étant celui qui inspire bien plus que celui qui est inspiré. L'abondance des citations, donnant à l'ouvrage une allure anthologi-que, se justifie par la formule : « Signe ce que tu approuves. »
«
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)Donner
à voir
A la différe nce des recueils de poésie, Donner à voir
(3.6.1939) est un livre müri pendant plusieurs années,
l!ne sorte de bilan, de credo et de prophétie tout à la fois.
Eluard l'organise à la fin de 1936 et au début de 1937 :
«Je travaille beaucoup ( ...
), je finis un livre en prose
de 200 pages (toutes mes proses) pour la N.R.F.
» A
1;automne, un premier titre est trouvé, rimbaldien :
Eluard annonce sur le tiré à pa rt de Premières Vues
anciennes : «extrait d'un volume, Avenir de la poésie, à
paraître aux éditions de la N.R.F.
>>.
Et cette prem ièr e
version sera abondamment remaniée.
A l'automne 1938,
l'ouvrage reçoit le point final : «Je termine mon livre
Donner à voir.
Tout ce qui concerne les peintres surréa
listes y figurera.
Tous les textes sur la poésie aussi.
Et
tous les rêves, toutes les proses poétiques.
Je le remets à
la N.R.F.
la semaine prochaine ».
Le livre a donc crû, au
fil des ans et au hasard des articles, par une sorte de
coalescence naturelle.
Au pro jet de ré uni r « mes proses >>
(poétiques et théoriques) s'est ajouté tout le jeu de
miroirs des « Premières Vues anciennes>>, parues en
1937 dans Mjnotaure : mosaïque, entrecoupée de com
mentaires d'Eluard, de maximes, conseils d'existence et
clés po u r mieux vivre, récoltés dans des lectures éclecti
ques qui vont de Blake à Freud et à P ia get en passant par
Novalis, Feuerbach, Lafargue e! Lautréamont.
« Signe
ce que tu approuves>>, conclut Eluard.
S'ajoutent aussi
« les Rêve s», q u i n'ont pas statut de poè me, et enfin, par
une nécessité interne, « tout ce qui concerne les peint res
surréalistes>>, c'est-à-dire, outre les proses, les poèmes
qui leur sont co n sac rés.
L'ensemble ne répond pas à une
logique catégorielle (p o èm e versus prose, poésie versus
théorie, écriture versus peinture) qui relèverait de taxino
mies conceptuelles, mais au sentiment intime de l'unité
d'une vocation (« don ner à voir >>) dont tout créateur, en
attendant tout homme, est le foyer, pourvu qu'on donne
à ce tte métaphore non pas son sens nucléaire mais son
sens optique : «Point où la lumière converge et d'où
elle rayonne>>.
Une conclusion s'impose : la réflexion
esthétique d'Éluard prend sa source dans la peinture, s'y
retrempe volontiers, et sa pratique ne cesse de rivaliser
avec elle.
L'art de Picasso, commenté dans «Physique
de la poésie>> et dans «Je parle de ce qui est bien >>,
ouvre la réflexion théorique et la domine, tout comme il
domine l'ouvrage par son titre, Donner à voir, emprunté
au dernier vers de « A Pablo P ic as so >> du même recueil.
Ce volume rayonne d'une confiance messianique et
contagieuse dans l'affranchissement des hommes et
l'émancipation de la vie.
BIBLIOGRAPHIE
Il existe une édition en Poésie/Gallimard, 1978.
Exégèse : Jean-Charles Gateau, et de l'Occupation
migrent d'un recueil à l'au tre.
Deux pôles les rassem
blent : d'une part, les deux volumes du Livre ouvert
(I, oct.
1940; II, janv.
1942); d'autre part, les éditions
successives d'un recueil qui s'intitule d'abord Poésie et
Vérité 1942 (avril 1942, version enrichie 20.2.1943),
puis se nommera Dignes de vivre ( 1.
7.
1944 ), avant de
r ej oin dre les po èm es clandestins du Rendez-vous alle
mand (15.12.1944) dans la deu xièm e édition du Rendez
vous allemand (7 .4.
1945).
Les volets fermés sur le triom
phe provisoire du Mal, le poète entretient la flamme de
l 'e sp oir en se retrempant aux sources de la vie : les
fleurs, les fruits, les arbres, le s animaux familiers, l'ai
mée, les amis prodiguent leurs charmes et donnent
l'exemple de la constance et de la fidélité, le loup farou
che invite à la dignité, le rêve rend ses couleurs à l'uni
vers décoloré, le nom« liberté>> s'écrit partout.
Des poè
mes plus transparents encore chantent le thème des
victimes, lancent l'anathème contre les bourreaux, pro
mettent le triomphe des innocents et le châtiment des
coupables.
La poésie se fait d'autant plus simple
qu'Eluard se veut le porte-parole d'un peuple bâillonné.
A l'écoute de ses sembl abl es et fuyant la singularité, le
poète renoue avec la veine unanimiste de ses débuts.
BIBLIOGRAPHIE Pour la dénonciation de J'engagement, voir Benjamin Péret,
le Déshonneur des poètes, Mexico, 1945.
Exégèses : Groupe Mu de Liège, « la Halte des heures»
( Liv re ouvert Il), Romanic Review, 1972, 63, n" 2; Roger Lassalle
et Michel Lau nay ,> (Livre ouvert Il), les
Mois la vie, n" 1, univ.
Nice, 1980; Albert Mingelgrli n,
> (Poésie et Vérité 1942), Revue des langues vivantes,
XLII, 1976; J.-M.
Adam, , Littérature, n° 17, mai
1974..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- « Voir le monde comme je suis, non comme il est. » (PAUL ELUARD.). Commentez cette citation.
- la courbe de tes yeux de paul eluard
- PAUL ELUARD
- Dictionnaire abrégé du surréalisme, d'André Breton et Paul Eluard
- Donner à voir d'Éluard