Devoir de Philosophie

Dominique d'Eugène Fromentin (analyse détaillée)

Publié le 24/10/2018

Extrait du document

fromentin
Dominique. Roman d'Eugène Fromentin (1820-1876), publié à Paris dans la Revue des Deux Mondes en avril-mai 1862, et en volume à la Librairie Hachette en 1863.
 
« Ce qu'il y a de plus clair pour moi, c'est que j'ai voulu [...] exprimer sous forme de livre une bonne partie de moi » (à George Sand, le 19 avril 1862) : important aveu, qui prouve le caractère autobiographique de Dominique. Inspiré par un amour de jeunesse, ce roman participe du monde enfantin de l'auteur, et recèle force souvenirs indélébiles : le cadre de sa jeunesse (la maison d'été de Saint-Maurice, près de La Rochelle), ses compagnons, sa passion pour la jeune créole Jenny Chessé (1844). Ensemble de souvenirs voilés, ennoblis, dont la valeur autobiographique est plus sentimentale qu'anecdoti-que, Dominique apparaît bien comme un roman idéaliste.
 
Maire de la commune de Villeneuve et propriétaire du domaine des Trembles où il vit heureux en famille (chap. I), Dominique de Bray décide de confier à un ami, le narrateur, son émouvante jeunesse, amers souvenirs que la tentative de suicide de son compagnon d'adoles-
cence Olivier d'Orsel a ravivés (2). Orphelin, éduqué par sa tante, Mme Ceyssac et le mentor-précepteur Augustin (3), il entre au collège d'Ormesson et devient l’ami d'Olivier d'Orsel et de sa cousine Madeleine, un peu plus âgée que lui (4). Alors qu'il voit cette amitié se muer en amour (5), Madeleine, fiancée (6), épouse le comte de Nièvres (7). Après de brillantes études au collège (8), Dominique se rend à Paris où Olivier l'invite à se détacher de Madeleine (9). Tentant de dissiper sa passion, il a une liaison éphémère, étouffée qu'elle est par le souvenir de Madeleine, force omnipotente qui le pousse à inviter la jeune femme et sa famille à passer les vacances aux Trembles : séjour inoubliable auprès de sa bien-aimée (10-11). De retour à Paris, il use de nombreux subterfuges pour l’« assiéger », la «contraindre dans sa dernière réserve » ; mais à cette « stratégie insensée », elle oppose une extraordinaire froideur. « Furieux », « aigri », Dominique disparaît pendant plusieurs semaines jusqu’au jour où, sous l'empire de la passion, il se présente chez Madeleine : tandis qu'il tombe à ses genoux, Mme de Nièvres, indignée, lui « impose silence » et se retire (12). Dès lors, se succèdent les tentatives de guérison de ce sentiment amoureux, puisque Madeleine se considère comme coupable de cet amour qu'elle a inspiré inconsciemment : elle lui donne des rendez-vous, l'encourage à lutter; mais, recrue de fatigue et près de dévoiler sa passion, elle le supplie de ne plus la revoir ( 13). Dominique trouve réconfort auprès d'Augustin (14). Un mois plus tard, Madeleine révèle sa passion ; ivre de joie, Dominique erre dans la capitale. Hélas ! Mme de Nièvres lui apprend rapidement qu'elle ne veut plus le voir (15). Pour l'oublier. Dominique se lance dans la littérature et la politique. Il perd de vue Madeleine jusqu’au jour où, dans une exposition de peinture, il trouve son portrait où transparaît une grande tristesse (16). Il se rend aussitôt auprès d’elle : émus, ils échangent leur premier baiser. Mais Madeleine se ressaisit et s'enfuit. Quand elle reparaît elle sonne le glas de leur amour, troquant son élan amoureux contre un devoir irréfragable ; bouleversé, Dominique rentre aux Trembles (17). Ainsi s'achève le récit de Dominique ; quelques jours plus tard, celui-ci a la joie d'accueillir son ami Augustin (18).
 
Fruit d'une déception amoureuse transposée dans le registre de la fiction par le truchement d'un récit rétrospectif, Dominique est un roman personnel qui présente, sur un mode quelque peu cathartique, une histoire d'amour impossible. Après cet échec sentimental, Dominique ne demeure point prostré comme le Frédéric Moreau de Éducation sentimentale. Il préfère endosser le manteau du sage, s'employant à ensevelir sa passion, à organiser une vie à sa mesure, à s'intégrer dans la société où il devient notable : vie paisible d'un gentilhomme campagnard bercée par les habitudes (présence de l'imparfait de narration), création d'un foyer, tout cela procède d'une sagesse tout humaine, bien différente de celle d'Amaury (voir Volupté) et qui suffit, cependant, à le sauver du désespoir. De par cette absence d'ambition, d'exaltation, le roman se déprend du romantisme ; et son héros, lucide, s'inscrit en faux contre les chimères de René pour affirmer qu'il n'est « donné qu'à bien peu de gens à se dire une exception » (chap. 1).

fromentin

« par le truchement d'un récit rétrospec­ tif, Dominique est un roman personnel qui présente, sur un mode quelque peu cathartique, une histoire d'amour im­ possible.

Après cet échec sentimental, Dominique ne demeure point prostré comme le Frédéric Moreau de l'*Éduca­ tion sentimentale.

Il préfère endosser le manteau du sage, s'employant à ense­ velir sa passion, à organiser une vie à sa mesure, à s'intégrer dans la société où il devient notable : vie paisible d'un gentilhomme campagnard bercée par les habitudes (présence de l'imparfait de narration), création d'un foyer, tout cela procède d'une sagesse tout humaine, bien différente de celle d'Amaury (voir *Volupté) et qui suffit, cependant, à le sauver du désespoir.

De par cette absence d'ambition, d'exalta­ tion, le roman se déprend du roman­ tisme ; et son héros, lucide, s'inscrit en faux contre les chimères de *René pour affirmer qu'il n'est «donné qu'à bien peu de gens à se dire une exception >> (chap.

1).

Véritable chef-d'œuvre du roman psychologique, Dominique retrace l'évolution intérieure du héros, laquelle est annoncée par une judi­ cieuse structure narrative : les deux premiers chapitres, antichambre de la confidence, nous permettent insensi­ blement de connaître Dominique.

S'autorisant avant tout de cette aven­ ture intérieure d'où le récit tire sa sub­ stance, Fromentin confère moins d'importance aux événements qu'aux analyses : les unes, liées à la situation sentimentale, se cristallisent autour de l'amour interdit; les autres, plus complexes et plus émouvantes, dessi­ nent l'intériorité de Dominique, « être agité, malheureux» (chap.

5) dont la plus grande angoisse est «d'assister à sa vie comme à un spectacle donné par un autre» (chap.

4).

Cruel dédouble­ ment qui l'emprisonne dans une obsessionnelle attention à soi-même et qui le prive aussi du bonheur : le regard maintient une distance hostile à l'indispensable spontanéité.

La pré­ sence envahissante de cette vie inté­ rieure déchire le tissu événementiel ; ainsi s'explique que la durée romanes­ que soit ici plus indéfinie que précise - « Cela dura des mois, peut -être une année» (chap.

13) -,plus fragmentaire que continue - témoin la présence d'un décalage temporel entre le « je » narrant et le « je >> narré :. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles