Dissertation : L'Etranger de Camus
Publié le 18/05/2013
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Dissertation : L'Etranger de Camus Introduction Qu'il soit un fait évident que la littérature du XXème siècle est différente de la littérature du XIXème siècle, cela ne doit pas nous empêcher de nous interroger sur la nature et sur l'originalité de chacune des deux littératures. Faut-il d'ailleurs rappelé qu'au sein du même siècle, il est un fait que les écrivains ne se ressemblent pas et que leurs productions littéraires et/ou philosophiques soient bien différente l'une de l'autre. C'est bien le cas de la littérature du XXème siècle, où le foisonnement des courants littéraires et des mouvements de pensée atteint son apogée. Et c'est aussi bien le cas de la littérature (sa place, sa valeur, son originalité, etc.) d'Albert Camus au sein de ce siècle. L'un des points d'attaque de cette littérature-philosophie serait l'étude des personnages. En effet, évoquer le profil du personnage camusien, c'est traiter directement et/ou indirectement de la philosophie de l'absurde telle qu'elle est pensée et pratiquée par Albert Camus dans ses écrits, principalement dans Le Mythe de Sisyphe et dans L'Etranger. Or, celui qui analyse de près le roman en question remarque, sans trop de peine, la place centrale du personnage de Meursault dans le roman en question. En fait, on n'exagère pas en disant que l'essentiel du message camusien est (re)présentés à partir/autour de ce personnage, de son comportement et de son devenir. Autant les analystes et les critiques semblent unanimes sur ce point, autant les divergences apparaissent (paraissent éclatantes!) quant à la définition du personnage selon le modèle classique : est-il un anti-héros comme le laissent paraître aussi bien une majorité de lectures critiques que le comportement a-typique de celui-ci ? ou serait-il, malgré tout, un «vrai« héros (incompris, mal compris) ? Nous allons détailler, dans un premier temps, les éléments définitoires du personnage de Meursault qui font de lui un anti-héros, selon le modèle canonique/classique (en référence notamment au personnage-héros du XIXème siècle). Nous développerons, dans un second temps, les aspects caractéristiques du héros chez le personnage absurde dans L'Etranger. Nous finirons par nous interroger, dans une partie finale, sur la véritable définition (s'il y en a!) qu'on pourrait proposer à ce protagoniste camusien (à cet individu camusien). Il est assez aisé de remarquer que Camus mise, dans L'Etranger, sur son personnage principal, Meursault qui joue le rôle, également, du narrateur qui raconte les événements (selon son point de vue). Ce qui frappe d'emblée l'attention chez ce personnage c'est son aspect différent des autres ; différence principalement d'ordre social, mais qui atteint bien d'autres plans. Meursault paraît vite le modèle de l'individu « révolté « contre les codes sociaux préétablis et communément suivis par ses concitoyens. Car, on l'aura compris, dès le début du roman, il est le type à vivre et à se comporter à sa guise : il ne pleure pas à l'enterrement de sa mère et il ne connaît pas l'âge exact de celle-ci. Le lendemain de cet enterrement, il emmène sa «maîtresse« à la plage pour une baignade, puis, au cinéma pour voir un film. En cela, il est assez aisé de dire qu'il s'apparente plutôt à un anti-héros vu qu'il s'éloigne du comportement humain canonique et usuel. Sa diffé...
«
2 Sa différence est aussi (ou, peut-être, d’abord) marquée par une indifférence face à
tout.
D’ailleurs, sa réponse (peu conventionnelle) ne décline-t-elle pas la demande de mariage
formulée par sa «concubine» en un véritable moment non-signifiant (in-signifiant) ?
« Le soir, Marie est venue me cherchait et m’a demandé si je voulais me marier avec elle.
J’ai dit que cela m’était égal et que nous pourrions le faire si elle le voulait.
»
Ce trait spécifique, si caractéristique de l’anti-héros est confirmé par la séquence
textuelle qui vient juste après :
« Elle a voulu savoir alors si je l’aimais.
J’ai répondu comme je l’avais fait une fois, que cela
ne signifiait rien mais que sans doute je ne l’aimais pas.
»
On comprend à travers les lignes ci-dessus que sa réponse laisse bouche bée
d’incompréhension et d’hébétude Marie.
C’est en cela qu’il pourrait être considéré comme un
anti-héros dans le sens qu’il ne partage pas des sentiments et des réactions sentimentales
adéquates à une situation usuelle entre un homme et une femme.
L’étrangeté de Meursault est, sans doute, le trait principal de son appartenance au
modèle de l’anti-héros.
Elle semble éclater à l’occasion de l’interrogatoire de Meursault par le
magistrat ou lors de son procès.
Lors de son premier entretien avec son avocat dans la prison,
c’est cette étrangeté qui finit très vite par mettre l’avocat mal à l’aise jusqu’à quitter
«presqu’en colère».
Les réponses de Meursault candides et non calculées surprennent et
déroutent son interlocuteur.
« ‘‘Vous comprenez, m’a dit mon avocat, cela me gêne un peu de vous demander cela.
Mais
c’est très important’’.
(...) Il voulait que je l’aide.
Il m’a demandé si j’avais eu de la peine ce
jour-là.
Cette question m’a beaucoup étonné et il me semblait que j’aurais été très gêné si
j’avais eu à la poser.
(...) Sans doute, j’aimais bien maman, mais cela ne voulait rien dire.
»
La réponse de Meursault concernant les êtres « qu’on aime » bouleverse tellement
l’avocat qu’il lui conseille de manière urgente et catégorique de ne pas la prononcer le jour de
son procès.
En cela aussi, Meursault est également un anti-héros vu qu’il déroge aux règles de
la parole bien pensée et communément acceptée.
« Tous les êtres sains avaient plus ou moins souhaité la mort de ceux qu’ils aimaient.
Ici,
l’avocat m’a coupé et a paru très agité.
Il m’a fait promettre de ne dire cela l’audience, ni chez
le magistrat instructeur.
»
Le modèle de l’anti-héros éclate lorsque Meursault répète une dernière fois, à la fin du
roman, qu’il ne regrette pas son acte (celui de tuer l’Arabe).
La décision d’assumer ce non-
regret ne provient point d’une prédisposition criminelle chez l’intéressé.
Loin de là! Ce
sentiment est plutôt une prise de conscience chez Meursault de son étrangeté, liée à l’aspect
absurde de la vie humaine.
« Je ne regrettais pas beaucoup mon acte.
Mais tant d’acharnement m’étonnait.
J’aurais voulu
essayer de lui expliquer cordialement, presque avec affection, que je n’avais jamais pu
regretter vraiment quelque chose.
J’étais toujours pris par ce qui allait arriver, par
aujourd’hui ou par demain.
»
De part la prise de conscience de son étrangeté, en tout cas de sa de sa différence par
rapport aux autres, peut s’expliquer (par ricochet) le refus de Meursault de recevoir
l’aumônier plusieurs fois, dans sa cellule de prison.
Meursault aurait-il compris qu’il est
effectivement un anti-héros et qu’il n’a point besoin d’un homme d’Eglise pour lui sauver
l’âme? La question se pose (et, peut-être, s’impose) surtout quand on lit les lignes suivantes..
»
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