Dénouement La cantatrice chauve
Publié le 09/05/2015
Extrait du document
«
La suite de la scène ne se manifeste alors plus que par des mots, des noms : Sully,
Prudhomme et autres, les personnages lient ensuite les noms qu’ils énoncent.
Un
semblant d’esprit reste visible, avec la référence au poème de Sully Prudhomme « Le
vase brisé » : « elle est brisée » (Mme Smith).
Comme l’indique la didascalie en début
d’extrait, la gradation si violente fait que les personnages ne disent plus que ce qui
leur passe par la tête, jusqu’à en arriver aux sons les plus simples, ceux des lettres…
Les fantoches tels que les veut Ionesco se lient enfin, avec le « c’est pas par ici c’est
par là » haché entre les personnages.
Cette dernière réplique montre une direction, et
ainsi le fait que la pièce est infinie, mais cette rupture en pleine action marque comme
la pression d’un interrupteur qui éteint les marionnettes actionnées par l’auteur, qui
pulvérise le langage.
Ionesco s’est inspiré pour La cantatrice chauve de méthodes pour apprendre
l’anglais, qui l’ont révolté par leur absurdité.
Il évoque certaines phrases au début de
la scène.
Les lieux communs présents en masse dans ces méthodes l’ont révolté quant
au manque d’idées et d’inventivité de l’Homme.
Ionesco veut marquer un rythme avec
la première scène, où les époux Smith montraient déjà un discours vide : il n’y a donc
pas d’évolution, pas de chance de changement selon l’auteur, qui se montre ainsi
fortement pessimiste.
Le fameux cercle vicieux est aussi évoqué en début de scène, où
le vice est associé au plaisir de la caresse.
C’est par cette idée qu’il déclara qu’il fut
« presque étonné d’entendre rire les spectateurs qui prirent (et prennent toujours) cela
gaiement », il dénonce ici en quelque sorte son dédain de l’humanité ! Il ne faut pas
oublier que Ionesco avait prévu de terminer la pièce sur une agression du public par
l’auteur, ce qui portait la crise finale à son paroxysme.
Le malentendu se fait sur cette crise, Ionesco voulait amener le spectateur à une prise
de conscience de son langage, inutile parfois.
L’effet de miroir joue en effet son rôle :
ces bourgeois qui n’ont rien à se dire ne seraient-ils pas le reflet de ce que nous
sommes ? Le rire devient alors un rire jaune, mal contrôlé, mal cerné ; c’est le rire de
l’inquiétude et de l’inconfort intellectuel.
Malgré les apparences, le dénouement
dérange le spectateur.
Le tragique apparaît en creux dans le dénouement : l’Homme
est englué dans un isolement total, il ne peut communiquer ni avec autrui ni avec lui-
même, il semble contrôlé par un mouvement invisible (d’où les fantoches) qui le rend
dérisoire et inintéressant.
La bataille finale entre les personnages symbolise peut-être
la déception de ceux-ci vis-à-vis de ce qu’ils sont.
Mme Martin « grince des dents »
par exemple…
Nous avons donc vu que cette scène a priori si absurde se révèle profondément
réaliste, les mêmes éléments font rire et dérangent.
Vide sémantique, accumulation de.
»
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