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Deffence et illustration de la langue françoyse : Fiche de lecture

Publié le 22/11/2018

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Deffence et illustration de la langue françoyse

 

« Le premier manifeste de la littérature française », a-t-on écrit avec justice de la Deffence. Intervenant un an après un Art poétique assez nouveau de Sébillet, l’ouvrage surprit comme une provocation, déchaîna des attaques subites comme il entraîna définitivement l’admiration. Invective et louange, ces deux modes de l’insolence et du lyrisme Renaissance, Du Bellay les maniait dans un perpétuel déséquilibre qui fait de la Deffence un texte encore très fort et très plaisant à lire. Œuvre d’allure polémique, mais plus foncièrement systématique, elle ne contient — contrairement à ce qu’on dit parfois — aucune contradiction réelle, et encore moins de désordre.

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« la nature propre à l'imaginaire des hommes.

De là leur force, de là leur faiblesse aussi, si ces virtualités de la langue ne se réalisent pas dans 1 'écriture, dans >); on peut -on doit -donc transmettre, tra­ duire et imiter.

Mais en même temps, chaque langue est seule à parler comme elle le fait, par la «différence de la propriété et structure d'une langue à l'autre >>, comme il le dit encore en 1552 : sa manière, c'est-à-dire la poésie comme quintessence des particularités de cette langue, est donc intraduisible; la seule chose possible est de s'en imprégner- la «dévorer >>, , dit-il sans cesse -à force de la «lire de main nocturne et journelle >>.

Alors quelque partie de la« force des choses », de la , comme de la « structure de la langue>>, passera dans votre poésie.

Pour écrire, il faut accepter de>, être assez courageux et savant pour exploiter ce champ immense des possibilités d'une langue : courageux parce qu'il faut lui faire atteindre la variété, 1' ampleur recon­ nues dans les autres langues, et pour cela écrire beau­ coup; savant, parce qu'on ne peut rivaliser avec les autres langues que par une exacte connaissance de leurs caractéristiques; savant aussi parce que dire, c'est dire de quelque chose, et qu'il faut tout connaître en toute discipline, en tout métier, tout nommer.

Mais la poésie, qui est à elle seule l'« illustration >> de la langue, sa >, il n'existe pas sans travail, et sans 1' imitation des bons auteurs grecs, latins et italiens.

Il n'existe pas non plus s'il n'est pas à l'écoute de tous les phénomènes musicaux propres à sa langue, et s'il n'est pas attentif aux gestes qui doivent 1' accompagner.

Alors Du Bellay de donner tout un ensemble de conseils sur les genres poétiques, les tours syntaxiques, les figures rhétoriques, les créations de mots, etc., qui ont fait, par leur précision, leur intuition, mais non sans injustice à l'égard de l'ancienne poésie française, la réputation de la Deffence.

Pour écrire ce manifeste où les Grecs et les Romains tiennent lieu de l'inconscient surréaliste, Du Bellay avait pillé Cicéron, Quintilien, Dolet..., et surtout l'Italien Speroni et son Dialogue des langues (1542), mais ce dernier ouvrage à grands coups, en le «dévorant>> selon ses propres principes, en choisissant parmi les interlocu­ teurs différents, voire contradictoires, ceux dont les argu­ ments convenaient à sa bataille.

Il n'a pas collectionné des thèses, avec les contours d'une discussion entre spé­ cialistes; il a projeté une synthèse agressive, paradoxale, qui demandait à être suivie dans les actes : elle paraissait en même temps que l'Olive [voir ARTS POÉTIQUES].. »

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