Contrerimes (les). Recueil poétique de Paul-Jean Toulet (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)
Publié le 24/10/2018
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Contrerimes (les). Recueil poétique de Paul-Jean Toulet (1867-1920), publié à Paris aux Éditions du Divan en 1921. Ce recueil rassemble un choix de textes pour la plupart déjà parus, depuis 1910, dans différentes revues parmi lesquelles la Grande Revue, le Divan, les Marges, les Guêpes, les Marchés de Provence, Burdigala, Vers et Prose, l'Éventail.
Les 305 pièces qui composent les Contrerimes se signalent par leur brièveté, qu’il s’agisse du nombre des vers (de deux à trente-six) ou des mètres utilisés. Elles se répartissent en 70 « contrerimes » proprement dites, cette forme poétique déjà rencontrée chez Leconte de Lisie et dont Toulet se proclamait l'inventeur : une séquence de quatrains (de quatre à neuf) qui chacun combine des mètres alternés (8.6.8.6.) et des rimes embrassées (abba.), les vers rimant ainsi « à contre-longueur », le grand avec le petit ce dernier fréquemment introduit par un relatif ou une préposition venant préciser et orchestrer le thème énoncé dans l'octosyllabe ; 14 « Chansons » à la métrique variée, dont la célèbre « Dans Arie, où sont les Aliscams » : 12 « Dixains » en octosyllabes ; enfin 109 «Copies» de deux ou quatre vers, souvent des alexandrins
« Ce que j'ai aimé le plus au monde, ne pensez-vous pas que ce soit les femmes, l'alcool et les paysages ? » Tout naturellement, le credo de Toulet prend la forme interrogative. Jardin secret, précieux et raffiné, que ce dandy voyageur meuble de silhouettes féminines lointaines ou gentiment décevantes, dans des décors exotiques (l'île Maurice de son adolescence, l'Extrême-Orient visité en 1902-1903)
«
ou d'autres plus proches , du Paris
artiste et demi-mondain aux immortels
« Aliscams » et à la « Montagne Pyré
n ée
» au pied de laquelle il passe ses
derni ères années,
les Contrerim es met tent en scène un « je » omniprésent
mais désenchanté, et qui refuse d'être
dupe, serait-ce de sa propre nostalgie.
Les obsédan ts motifs de la vanitas
(sabl e, cendre, poussière, aimée rimant
avec fumée et seul avec linceul) ne ren
voient nullement
à un passé idéalisé
ou
à une q uelconque mission du
poète :
il ne s'agit pas, pour Toulet, de
tirer l'éternel
du transitoire, mais au
contraire de dégage r l'in stant -le plai
sir fugitif d
'une étrein te ou d' un rayon
de soleil -de ses oripeaux métaphysi
ques, et de porter
« le crincrin de la bla
gue
et le sistre du doute ,.
(" Chan
sons,., IV) dans le champ sacré de
l'amour et de la
mor t, ce trop célèbre
duo qui
« n'est qu'affaire d'allitéra
tio n
».
Tou te po se est ridicule dans un
monde qui se réduit à une succession
d'instantanés.
D'où ces télescopages
meur triers qu'organisent les Co ntreri
mes entre les lexiques, les formes et les
nivea ux de langue, depuis l'argot (tu
t'en fous, que dale, liquette ...
) jus
qu'aux mots les plus savants
(«C ar
thame chatoyant, cinabre 1 Colcothar orpim ent», « Cont rerimes >>, XXIII),
depuis le dialogue familier à peine
versifié
(« Contre rimes ,., VI, XXI,
XXXVIII...) jusqu'à l'élégie tradition
nelle
(«Puis que tes jours ne t'ont
laissé 1 Qu'un peu de cendre dans la
bouche», « Dixains »,XII ) mais distan
ciée
par des archaïsmes morphologi
ques ou syntaxiques (
« La vie est plus
vaine une image
,., « Contrerimes ,.,
LXX) ou des clins d'œil parodiques
("Ronsard",
« Cont rerim es », XXII;
"Baudelaire",
« Contrerimes ,., XXIV).
À l'esprit de sérieux des poètes sym
bolistes, Toulet répond ainsi par
un jeu
verbal
qui se veut défense contre
l 'émotion, par
un art de l'ellipse et de la
litote qui font de lui le chef de
file,
en son temps, de la jeune école " fan
taisiste» (Derême, Carco, jean-Marc
Bernard), mais qui l'inscrivent aussi
dans la tradi
tion cla ssique, de
Malherbe à Théophile Gautier
et à
Moréas, en passant par Chamfort et
tous ceux que révulsent le flou, Je
vague et la confidenc e trop haut pro
clamée : si l
'on p arle d'am our, qu 'au
mo ins ce soit.
»
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