Contes d'Espagne et d'Italie
Publié le 30/03/2013
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Contes d'Espagne et d'Italie est paru en janvier 1830; mais en 1852, après que Musset eut été élu à l'Académie française, il fit publier toutes ses oeuvres poétiques en deux volumes ; de la sorte, les titres originaux des recueils disparurent.

«
~- ----- - EXTRAITS -- ----- -----.
VENISE
Dans Venise la Rouge,
Pas un bateau qui bouge,
Pas un pêcheur dans/' eau,
Pas un falot!
Seul, assis à la grève,
Le grand lion soulève,
Sur/' horizon serein,
Son pied d'airain.
Autour de lui, par groupes,
Navires et chaloupes,
Pareils à des hérons
Couchés en ronds,
Dorment
sur/' eau qui fume,
Et croisent dans la brume,
En légers tourbillons,
Leurs pavillons.
La lune qui s'efface
Couvre son front qui passe
D'un nuage étoilé
Demi-voilé.
« Tu t'es bercé sur ce Hot pur Où Naples enchaîne dans l'azur Sa mosaïque ...
,.
L'ANDALOUSE
Avez-vous vu, dans Barcelone,
Une Andalouse au sein bruni?
Pâle comme un beau soir d'automne ! .
C'est ma maîtresse, ma lionne!
La marquesa d' Amaëgui !
J'ai fait bien des chansons pour elle,
Je me suis battu bien souvent.
Bien souvent
j'ai fait sentinelle,
Pour voir le coin de sa prunelle,
Quand son rideau tremblait au vent.
Elle est
à moi, moi seul au monde.
Ses grands sourcils noirs sont à moi,
Son corps souple et sa jambe ronde,
Sa èhevelure qui l'inonde,
Plus longue qu'un manteau de roi !
MARDOCHE
( ...
)
« Lorsque· son œil pétille ( ••• )
Rien que pour toucher sa mantille_.
,.
Il se peut qu'on oublie un rendez-vous donné,
Une chance -un remords - , et/' heure où/' on est né,
Et/' argent qu'on emprunte.
-Il se peut qu'on oublie
Sa femme, ses amis, son chien, et sa patrie.
Il se
peut qu'un vieillard perde jusqu'à son nom.
Mais jamais l'insensé, jamais le moribond,
Celui qui perd l'esprit, ni celui qui
rend/' âme,
N'ont oublié la voix de la première femme
Qui leur a dit tout bas ces quatres mots si doux
Et si mystérieux : « My dear child, I love you.
»
( ...
)
- Révérend, répondit Mardoche, je m'ennuie .
Shakespeare, dans Ham/et, dit
qu'on tient à la vie
Parce qu'on ne sait pas ce qu'on doit voir après,
Ses vers me semblent beaux, mais ils seraient plus vrais ,
S'ils disaient
qu'on y tient parce qu'une cervelle
A peur d'un pistolet qui s'applique sur elle,
Pour la faire craquer et sauter d'un seul bond,
Comme un bouchon de vin de Champagne, au plafond .
Je ne suis pas douillet! -
Un suicide! on se damne ,
Mon
fils! -Nous n 'avons pas, dit Mardoche, le crâne
Fait de
même!
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Le volume des Contes d'Espagne et
d'Italie,
qui a charmé une période du x1xe
siècle, et au-delà (mais non point celui des
critiques ou des conteurs, mais celui, plus
important,
des" lecteurs"), n'était qu'une
œuvre de perdition.
On fait un poème avec
de l'idéal et de la foi .
Pour les mots, cela
passe en second.
Et pour ce qui s'inscrit, en
filigrane, sous les mots, dans
1' arrière-texte,
quelle importance
? Pauvre Musset ! Ne méprisons
pas, avec une telle candeur, cet
inquiétant jeune homme
! » Hubert Juin,
Europe, novembre-décembre 1977.
s'insinuent
les vapeurs des lectures.
Le
sens,
c'est du vide magnétique, une
orientation en du vide,
1' expansion des
choses indéfinies.( ...
) Le poète a des dons,
certes, mais, surtout, il en reçoit.
Problème
du travail
et de l'inspiration.
Ces dons, qui
sont la vie, il faut les respecter.
Le hasard
prend la relève du trépied.
" La Providence
donne le
hasard." Plus d'inspiration, mais
le donné du hasard, en moi et hors moi.
»
Russel S.
King, Europe, 1977.
«J'aime, chez Musset, ce qui n'a pas l'air
poétique.
Ou bien ce qui ne veut rien dire
ou qui dit plus que ça ne veut.
Oui,
j'aime
cette poésie déchirée, où de grands blancs
dévorent les petits vers des petits textes.
La
tunique du Christ figure la poésie .
Ce que
j'aime en elle, c'est les manques, les vides,
les trous, les déchirures -vide où
1 Musset par Landez, musée de V ersailles/ Sipa-lco no 2, 3 éd.
Pauvert, Sceau x.
1955 4 gravu re des frères Rovarg ue / td.
Turpiana, Grenade, 19 88 ·
MUSSET06.
»
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