CONQUÉRANTS (les), d'André Malraux

CONQUÉRANTS (les), roman d'André Malraux (1928). Premier texte proprement romanesque de l'auteur, l'ouvrage s'attache à un épisode de la révolution chinoise : la lutte pour Canton en 1925. Contrairement à la légende, il ne s'agit pas du récit d'un participant : Malraux se trouvait alors à Saigon, et aucun témoignage ou document n'indique qu'il ait été mêlé aux faits qu'il rapporte. Le conflit, comme ce sera la règle chez Malraux, se situe à différents niveaux. Sur le plan militaire, il s'agit pour la révolution chinoise d'abattre la puissance anglaise et ceux qui la soutiennent. Ce combat, cependant, n'est guère représenté, et les débats que le livre privilégie prennent place à l'intérieur du parti nationaliste. D'ordre à la fois idéologique et existentiel, ils opposent un certain nombre de groupes : terroristes (Hong), non-violents (Tcheng-Daï), et surtout révolutionnaires « romains » (Borodine), technocrates du changement

 

qui mettent leurs problèmes personnels entre parenthèses et acceptent de suivre la ligne définie par Moscou, et révolutionnaires « conquérants » (Garnie), non moins engagés, non moins efficaces, mais pour qui se fier « à une grande action quelconque » constitue une fin en soi et n'implique pas le sacrifice de son individualité. Sur le plan métaphysique, ces personnages se rejoignent d’ailleurs en ce qu'ils se définissent par rapport au « destin », notion clé de la thématique de Malraux ; ici, la mort, l'absurde, la solitude, niés par les « romains », lucidement assumés par les « conquérants ».