Combat de nègre et de chiens de Bemard-Marie Koltès (analyse détaillée)
Publié le 22/10/2018
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Combat de nègre et de chiens.
Pièce en vingt tableaux de Bemard-Marie Koltès (1948-1989), créée par l'Ubu Theater, dans une mise en scène de Françoise Kourilsky, à New York en décembre 1982, publiée à Paris en dactylogramme par Théâtre Ouvert, et en volume chez Stock en 1979.
La mise en scène de Patrice Chéreau, en février 1983, au théâtre des Amandiers de Nanterre, fut un événement théâtral, et constitua le premier acte d'une étroite collaboration entre le metteur en scène et l'écrivain d’où devaient naître Quai Ouest (1986), Dam la solitude des champs de coton (1987), le Retour au désert (1988).
Dans un pays d'Afrique de l'Ouest sur « un chantier d'une grande entreprise étrangère ». vivent trois Blancs. Hom, le chef du chantier. Léone qui vient d'arriver de Paris, invitée par Hom. et Cal. l'ingénieur, un personnage violent, tourmenté et alcoolique, dont l'unique souci est un petit chien blanc comme son nom. «Tou-bab » - appellation du Blanc dans certaines régions d’Afrique -, l'indique. Les travaux marchent au ralenti... Alboury, « un Noir mystérieusement introduit dans la cité », vient réclamer le corps d’un ouvrier noir, mort la veille sur le chantier. Horn essaye de l'amadouer et lui raconte que l'homme a été écrasé accidentellement, puis il rassure Léone inquiète ; en réalité, dans un accès de rage meurtrière, Cal a tué le Noir et l’a précipité dans les égouts. Le corps est irrémédiablement perdu et le conflit est inévitable, mais Horn continue de mentir à Alboury (tableaux I -4).
Cal tente d'approcher la femme... Mais c’est Alboury qui intrigue et attire Léone, tandis que Cal persiste à vouloir la séduire, et que les deux Blancs s'enfoncent dans une attente sans solution. Le désir s’éveille clairement entre Léone et Alboury (tableaux 5-9).
Le conflit se précipite : Horn et Cal s'irritent et se disputent, tandis que Léone et Alboury sont de plus en plus attirés l’un par l’autre. Cal tente inutilement de retrouver le corps de l’ouvrier et Horn d'acheter la paix avec Alboury, jusqu’à l’arrivée de Léone qui s'interpose et tente de servir d’intermédiaire ; mais elle échoue et se voit rejetée par Alboury, puis par Horn ; alors, comme par défi, elle se mutile le visage des mêmes marques tribales que porte Alboury (tableaux 10-16).
Horn et Cal s’entendent pour traquer Alboury à mort, et Horn renvoie Léone à Paris. Cal dit adieu à Léone, puis meurt sous les balles des gardiens du chantier. Son cadavre est recouvert du cadavre de son chien (tableaux 17-20).
«
régions d'Afrique -, l'indique.
Les travaux mar
chent au ralenti.
..
Alboury, «un Noir mysté rieusement introduit dans la cité ».
vient réclamer le corps d'un ouvrier noir, mort la veille sur le chantier.
Horn essaye de l'amadouer et lui raconte que l'homme a été écrasé accidentelle ment puis il rassure Léone inquiète ; en réalité, dans un accès de rage meurtrière, Cal a tué le Noir et l'a précipité dans les égouts.
Le corps est irrémédiablement perdu et le conflit est inévita ble, mais Horn continue de mentir à Alboury
(tableaux 1-4).
Cal tente d'approcher la femme ...
Mais c'est
Alboury qui intrigue et attire Léone, tandis que Cal persiste à vouloir la séduire, et que les deux Blancs s'enfoncent dans une attente sans solu tion.
Le désir s'éveille clairement entre Léone et
Alboury (tableaux 5-9).
Le conflit se précipite : Horn et Cal s'inritent
et se disputent, tandis que Léone et Alboury sont de plus en plus attirés l'un par l'autre.
Cal tente
inutilement de retrouver le corps de l'ouvrier et Horn d'acheter la paix avec Alboury, jusqu'à .
l'arrivée de Léone qui s'interpose et tente de ser- vir d'intermédiaire ; mais elle échoue et se voit
rejetée par Alboury, puis par Hom ; alors, comme par défi, elle se mutile le visage des mêmes marques tribales que porte Alboury
(tableaux 1 0-16 ).
Horn et Cal s'entendent pour traquer Alboury à mort, et Horn renvoie Léone à Paris.
Cal dit adieu à Léone, puis meurt sous les balles des gar diens du chantier.
Son cadavre est recouvert du cadavre de son chien (tableaux 17 -20).
Combat de nègre et de chiens est la pre
mière grande pièce de Bernard-Marie
Koltès.
Elle est à certains égards de fac
ture classique -l'auteur a lui-même
indiqué qu'il avait redécouvert
en y
travaillant
les« trois unités», et précise
dans
un de ses entretiens: «J'ai voulu
raconter
une histoire, avec un début,
une évolution, une fin, des règles à peu
près strictes.
» Une histoire également
inspirée
d'une expérience directe du
terrain, puisque la pièce fut écrite au
retour
d'un voyage au Nigeria, où Kol
tès avait pu observer de près les us et
coutumes d'un chantier d'entreprise.
Si les questions de temps -l'intrigue
s'étale sur moins de vingt-quatre heu-
res -et de lieu - tout se déroule sur le
chantier -sont aisément résolues,
il
n'en va pas de même de l'action :
l'intérêt
et l'originalité de cette pièce
consistent d'abord
en ce qu'elle est
fondée sur
une attente, et non pas sur
une action dramatique, puisque, dès
les premières lignes,
on se heurte à une
impossibilité : Alboury vient chercher
un corps qui a disparu avant même
que la pièce
ne commence.
Les occu
pants du chantier sont donc condam
nés à une attitude fataliste et à une
temporisation sans fin, tandis qu'AI
boury maintient sa demande par sa
seule présence.
À l'attente forcée, c'est le langage qui
va fournir
un exutoire.
Il est impossible
de donner satisfaction au Noir, mais le
Blanc continue de croire à l'intrigue,
au compromis
ou au marchandage, et
la pièce est dominée par le jeu que
mène ou tente de mener
Hom auprès
d' Alboury,
pour le comprendre, le
repousser, le circonvenir,
le corrompre,
jeu
de cache-cache rhétorique et de
dissimulation ; parallèlement, entre
Léone
et Alboury se noue, de l'atti
rance violente à l'incompréhension
finale,
une sorte de communication
extra-linguistique, Alboury parlant
en
ouolof, Léone en allemand, jusqu'à ce
qu'ils joignent leurs voix en français ;
le langage
se veut encore le véhicule du
désir, tandis que le désir se glisse sous
les paroles.
Mais la complexité des échanges
ne
déjoue que temporairement la radica
lité du conflit entre Alboury et les
Blancs, et ce théâtre
du langage
s'affirme théâtre de la rupture.
Alboury
ne se laisse prendre qu'en apparence au
jeu de l'amour
ou de la discussion.
Il
veut le corps, et rien d'autre.
Cela au
nom d'un système de valeurs que
Horn, aussi bien que Léone,
se révèlent
impuissants à comprendre.
Au-delà des
haines raciales, au-delà des différences
idéologiques,
se fait jour une rupture.
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