Cinq Grandes Odes de Claudel : Fiche de lecture
Publié le 21/11/2018
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Cinq Grandes Odes
Il faut revenir aux déclarations du poète Cœuvre dans la seconde Ville ou se reporter à la théorie claudélienne de la métaphore dans l'Art poétique (1903-1907) [voir Arts poétiques] pour comprendre l’intention qui a guidé Claudel dans cette œuvre monumentale, commencée en 1900 et publiée dans son entier en 1910. Ce sont des « psaumes ou monologues », où il reprend et développe sa théorie de la parole, les incidents de sa vie passée et sa certitude de vivre dans un univers « catholique ».
La première ode, « les Muses », a peut-être été composée en deux temps (1900/1904). Elle célèbre tour à tour les « Muses respiratrices » et les « Muses inspirées » jusqu’à l’invocation finale à Erato, confondue avec l’amante passionnée du poète. « L’Esprit et l’Eau » (1906) célèbre l’« élément fluide, l’esprit ou l'eau, dont toutes choses sont pénétrées », mais aussi cette « eau essentielle en nous qui est le besoin d’être parfaitement liquide et translucide ».
«
sociopolitique
de la censure.
On censure la critique de la
censure.
C'est la procédure de détournement bien connue
dans l'avant-garde.
Que la censure soit une rupture
objective dans le circuit de la communication, cela est
vrai en première approche.
Puisque le média est néces
sairement objectif, son arrêt est aussi un fait matériel,
réalisé par un obstacle.
En rester là, c'est demeurer dans
la perspective des sciences de la communication telle
qu'elle est pratiquée dans l'étude du téléphone, de la
radio, de la télévision, etc.
Mais la censure est d'abord
autre chose.
C'est un fait culturel et idéologique.
Le
censeur n'arrête le livre en tant qu'objet que parce qu'il
contient des idées jugées par lui pernicieuses.
JI est là
d'abord pour cela: juger si les idées sont acceptables.
C'est donc bien au-delà d'une théorie scientifique
d'inspiration positiviste et libérale de la communication
qu'il faut s'orienter si l'on veut comprendre la censure.
Il faut avoir recours à une théorie sociopolitique de la
communication dont la théorie scientifique n'est qu'un
aspect -d'ailleurs très important.
Comment, dès lors,
comprendre la censure comme fait sociopolitique? Com
ment faire progresser la théorie communicationnelle de
la censure?
Le schéma sociopolitique de la censure
Le schéma structurel
En reprenant le schéma communicationnel, il faut
constater que l'acte de censure se superpose à l'acte de
communication.
Celui-ci n'est rien d'autre que l'échange
de deux ou plusieurs subjectivités par l'intermédiaire
d'un moyen de communication, oral, audio-visuel, écrit.
L'acte de censure suppose donc l'intervention d'un tiers
investi d'un pouvoir.
C'est donc un fait politique.
Mais
cet acte concerne le contenu, voire la forme, du message.
C'est donc aussi un acte idéologique, en fonction des
valeurs sur lesquelles s'appuie le pouvoir politique.
Ainsi la censure repose sur un dualisme manichéen : le
bon et le mauvais message.
Il faut laisser faire, laisser
passer ce qui est bon, ce qui est conforme aux valeurs du
pouvoir; il faut arrêter ce qui est mauvais, ce qui est
contraire à ces mêmes valeurs.
Ainsi se constituent dans
l'appréhension du message deux concepts bien connus:
le conformisme et 1' anticonformisme.
Comment expliquer cette situation? Il faut, ici, faire
intervenir Je modèle des circuits idéologico-politiques
conformistes et anticonformistes.
On est en droit de
concevoir la théorie suivante : dans le cadre d'un espace
géographique donné, une population ayant une histoire
(voire une langue) commune constitue un groupe donné,
une nation.
Cette population doit assurer sa survie.
Pour
y parvenir, elle est obligée de produire des biens néces
saires à sa consommation.
Cette production, qui relève
de l'économie, divise la population en classes ou groupes
sociaux plus ou moins distincts par leur mode de produc
tion, leur culture, leurs intérêts.
Cette situation conflic
tuelle se résout par la volonté et l'accession au pouvoir
politique.
La possession de ce pouvoir divise la société
en deux groupes distincts : celui qui participe au pouvoir;
celui qui en est exclu; les classes dominantes et les clas
ses dominées.
Les premières organisent la vie sociale en fonction
des valeurs théoriques de leurs intérêts.
Cela concerne
aussi bien le pouvoir militaire et de police, permettant
de maintenir la domination de la classe au pouvoir par la
force, que l'organisation de la vie économique et cultu
relle.
La société dominante forme alors, par l'enseigne
ment, et alimente, par la propagande, une psychologie
collective pénétrée de ses valeurs.
Pour réussir dans cette
opération, dont le but est la pérennisation et le renouvel
lement de l'idéologie dominante, le pouvoir politique organise
la communication individuelle et sociale
notamment par les communications de masse, dont
l'écrit fait partie.
Pour montrer le sens de l'action idéolo
gique et pour en accélérer le mouvement, les classes
dominantes ont recours à la promotion des individus
placés dans le circuit en utilisant deux principes psycho
logiques de motivation : les honneurs, l'argent.
Des pre
miers relèvent, notamment, les institutions académiques
(l'Académie française, par exemple).
Des seconds, les
prix littéraires, les bourses, les pensions, etc.
Ainsi se
crée le circuit conformiste dont nous parlions plus haut,
qui est jugé bon et qu'on s'empresse de «laisser pas
ser».
Ses produits viendront, par la lecture, alimenter et
renouveler l'idéologie dominante dans le public.
Mais la
vie sociale repose sur la contradiction; le rêve de toute
idéologie dominante est de supprimer la dialectique au
profit d'un monisme éternel.
C'est le projet des dogma
tistes.
Les sociétés ou groupes sociaux dominés restent
insatisfaits mais ne peuvent être éliminés.
A leur tour,
leur combat vise la prise du pouvoir.
Ils créent des orga
nisations fondées sur des principes comparables à ceux
qui régissent les précédentes : élaboration d'un projet de
société et d'une table des valeurs; création de moyens
militaires en vue d'éliminer le pouvoir en place; création
d'écoles de partis; mise en place d'une structure de com
munication parallèle; action dans le public pour pénétrer
celui-ci et faire pièce à l'idéologie dominante.
Une telle action est évidemment pernicieuse pour le
gouvernement.
Elle vise à saboter sa base légale.
Cette
action de communication doit donc être interrompue.
C'est ici qu'intervient la censure des écrits.
On créera
une organisation qui dépendra du pouvoir policier et
judiciaire et dont la mission -parallèlement aux autres
actions de justice, mais sur un plan différent -sera
d'arrêter le mouvement de l'idéologie oppositionnelle.
Ainsi le pouvoir politique, d'une part, accélère le
mouvement de communication de l'idéologie confor
miste par les honneurs et par les avantages matériels,
d'autre part, arrête la communication par la censure: la
carotte et le bâton.
Cette action devra être organisée.
Ainsi, ce pouvoir est conduit à décliner son projet en
plusieurs étapes successives : légitimer son intervention
par la création de lois et de règlements regroupés dans
un code pénal; créer une institution -rattachée, en
France, au ministère de la Justice et au ministère de
l'Intérieur -chargée de les appliquer; recruter un per
sonnel intellectuel et policier ayant pour mission de met
tre concrètement en œuvre la censure : il faudra interve
nir sur les œuvres par l'examen des textes; il faudra,
quand cela sera nécessaire, agir sur les hommes -
auteurs, éditeurs, distributeurs -pour les intimider en
prévoyant un éventail de peines allant de la simple
amende à la contrainte physique.
Ainsi la « protection »
du lecteur suppose la surveillance de J•émetteur et du
message à toutes les phases de sa reproduction et de son
trajet.
Du circu it oppositionnel interne au circuit oppositionnel externe
Cette action du pouvoir dominant comporte une part
de naïveté.
Sa réussite dépend du degré de lassitude de
l'émetteur, l'écrivain oppositionnel.
Mais les plus dange
reux sont aussi les plus convaincus, donc les plus volon
taires.
Éliminée du circuit officiel de production et de
distribution, l'idéologie anticonformiste et opposition
nelle va chercher d'autres voies.
Elle en trouve une
d'abord sur place par la création, la reproduction et la
distribution clandestines des textes.
La voie est dange
reuse et souvent réprimée.
Reste alors la voie du circuit
extérieur: l'étranger.
Il ne manque pas, dans la société
internationale, de pays dont les idéologies ou les intérêts
sont opposés à ceux du pays où intervi,ent la censure.
Dès lors va se créer un mouvement de communication.
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