Cinq Cents Millions de la BÉGUM (les) de Jules Verne (analyse détaillée)
Publié le 21/10/2018
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Cinq Cents Millions de la BÉGUM (les). Roman de Jules Verne (1828-1905), publié à Paris en feuilleton dans le Magasin d'éducation et de récréation du 1er janvier au 13 septembre 1879, et en volume chez Hetzel la même année.
Il s'agit d'une des rares œuvres de l'écrivain où la valeur du progrès scientifique se trouve mise en cause de manière aussi brutale. De lourdes inquiétudes semblent en effet s'y exprimer : sans renoncer à tout espoir, le romancier se montre de plus en plus persuadé que, pour répondre à l'attente du sage, l'avenir dépendra davantage des hommes de bonne volonté que des grandes découvertes qui le marqueront.
Le docteur Sarrasin, savant et philanthrope, se découvre héritier de la bégum Gokool. Le voilà à la tête d'un capital de cinq cent vingt-sept millions de francs, somme fabuleuse en 1871. Son fils, Octave, est l’ami de Marcel Bruckmann, un jeune orphelin alsacien dont l’intelligence et l'énergie l'ont séduit sur les bancs du lycée Charlemagne. Tous deux ont combattu contre les Prussiens en 1870 et ont partagé l'amertume de la défaite. Ils achèvent leurs études pendant que le docteur Sarrasin, afin d’utiliser au mieux sa fortune, se propose de bâtir « une cité modèle sur des données rigoureusement scientifiques », « une ville de la santé et du bien-être » (chap. I -3). Mais il apprend qu’il doit partager l’héritage avec le professeur Schultze, savant allemand profondément francophobe. Tandis que Sarrasin part édifier sur la côte californienne, en Oregon, la merveilleuse France-Ville, Schultze va construire à quelques lieues de là Stahlstadt, la Cité de l’Acier. Il s’agit de l’antithèse absolue de l'utopie du docteur Sarrasin : une usine cyclopéenne fabriquant des canons. Les ouvriers y travaillent selon une discipline militaire, sous la surveillance d’une police omniprésente. Encore enrichi par le commerce des armes, Herr Schultze prépare la destruction de France-Ville au moyen d’une gigantesque pièce d’artillerie. Son pian échoue grâce à Marcel, parvenu à s’introduire dans Stahlstadt pour en surprendre les secrets (4-9).
«
récréation du 1er janvier au 13 sep
tembre 1879, et en volume chez Hetzel
la
même année.
Il s'agit
d'une des rares œuvres de
l'écrivain
où la valeur du progrès scien
tifique se trouve mise en cause de
manière aussi brutale.
De lourdes
inquiétudes semblent en effet s'y
exprimer : sans renoncer à tout espoir,
le romancier se
montre de plus en plus
persuadé que,
pour répondre à l'attente
du sage, l'avenir dépendra davantage
des
hommes de bonne volonté que
des grandes découvertes qui le mar
queront.
Le docteur Sarrasin, savant et philanthrope, se découvre héritier de la bégum Gokool.
Le voilà à la tête d'un capital de cinq cent vingt-sept millions
de francs, somme fabuleuse en 1 871.
Son fils, Octave, est l'ami de Marcel Bruckmann, un jeune
orphelin alsacien dont l'intelligence et l'énergie
l'ont séduit sur les bancs du lycée Charlemagne.
Tous deux ont combattu contre les Prussiens en 1870 et ont partagé l'amertume de la défaite.
Ils achèvent leurs études pendant que le docteur Sarrasin, afin d'utiliser au mieux sa fortune, se propose de bâtir« une cité modèle sur des don nées rigoureusement scientifiques », « une ville
de la santé et du bien-être» (chap.
1-3).
Mais il apprend qu'il doit partager l'héritage avec le professeur Schultze, savant allemand profondé ment francophobe.
Tandis que Sarrasin part édi fier sur la c6te califomienne, en Oregon, la mer veilleuse France-Ville, Schultze va construire à
quelques lieues de là Stahlstadt, la Cité de l'Acier.
Il s'agit de l'antithèse absolue de l'utopie du doc teur Sarrasin : une usine cyclopéenne fabriquant des canons.
Les ouvriers y travaillent selon une
discipline militaire, sous la surveillance d'une
police omniprésente.
Encore enrichi par le commence des armes, Herr Schultze prépare la destruction de France-Ville au moyen d'une
gigantesque pièce d'artillerie.
Son plan échoue
grâce à Marcel, parvenu à s'introduire dans Stahlstadt pour en surprendre les secrets ( 4-9).
Prévenus, Sarrasin, Octave et leurs amis peu vent organiser leur défense.
Précaution inutile :
lancé avec une trop grande vitesse, l'obus incen diaire de Schultze devient un satellite de la Terre,
parfaitement inoffensif.
Lui-même meurt dans son laboratoire, victime de ses inventions démo- niaques.
Son empire ne lui survit pas ( 1 0-1 3).
L'ironie
du sort fait de Sarrasin l'unique héritier
de Schultze.
Dirigée par Marcel, Stahlstadt ajou tera ses forces à celles du Bien, et le courageux
Alsacien épousera jeanne, la fille du bon docteur.
Le roman se présente donc comme
un conte de fées moderne.
À quel
ques réserves près, toutefois.
Ainsi, le
cauchemar de Stahlstadt,
constam
ment appuyé sur des réminiscences
revanchardes de l'Histoire récente (la
guerre franco-prussienne), paraît plus
convaincant que le rêve saint-simo
nien ou fouriériste de France- Ville.
Rien de miraculeux dans
l'inhumaine
Cité de l'Acier.
Comme l'observe direc
tement Marcel Bruckmann dans ses
carnets :
«Jusqu'ici donc, rien de mys
térieux dans les succès si remarquables
de cette fabrication>>, fruits de la
puis
sance et de l'organisation industrielles
poussées
à la perfection.
En revanche, France-Ville reste
l'objet
d'un émerveillement purement
littéraire, comme dans l'article admira
tif de l'« Unsere Centùrie >> qui en relate
la fondation.
On y perçoit les accents
enthousiastes
.et naïfs d'un découvreur
d'Eldorado :
« L'eau coule partout à
flots.
Les rues, pavées de bois bitumé,
et les trottoirs de pierre sont aussi bril
lants que le carreau d'une cour hollan
daise.>>
De fait, la vraie cité modèle n'est réa
lisée ni dans un monde ni dans l'autre,
puisqu'elle résiderait dans la synthèse
des deux.
À condition que cette syn
thèse soit sinon harmonieuse, du
moins simplement possible.
Le pro
blème est prétendument résolu dans la
fusion finale
de France-Ville et de
Stahlstadt, «usine et cité modèles ».
Conçue comme fabrique de canons,
Stahlstadt deviendrait
un « centre de
production incomparable pour toutes
les industries utiles>>.
Mais comment
lever toute ambiguïté dans ce projet et
dans la notion d'utilité qui le légitime ?.
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