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CHRONIQUES. Récit de Jean Froissart (analyse détaillée)

Publié le 21/10/2018

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CHRONIQUES. Récit de Jean Froissart (vers 1337-vers 1410), transmis par une cinquantaine de manuscrits et douze éditions anciennes. Il relate jusqu'en 1400 les « beaux faits d'armes » advenus en France, en Angleterre, en Écosse, mais aussi en Espagne, au Portugal, en Italie, à l'occasion du conflit que nous appelons aujourd'hui la guerre de Cent Ans.
 
Cet ouvrage est à plusieurs égards un monument. D'abord par ses dimensions - seize volumes dans l'unique version intégrale publiée -, ensuite par l'espace qu'il embrasse : tous les pays de la chrétienté qui se rattachent d'une manière ou d'une autre à la politique française ou à la politique anglaise durant la première phase de la guerre de Cent Ans (avec, à l'occasion, des incursions vers la Hongrie et la Bulgarie - Nicopolis -, vers la « Barbarie » [Tunisie] - siège de Mahdia sous la conduite du duc de Bourbon -, ou vers le Proche-Orient - exposé du rapport des forces dans cette région par le roi d'Arménie) ; enfin par la longueur de la période retracée, environ trois quarts de siècle, de 1326 à 1400. Mais les Chroniques sont aussi un monument par leur intention déclarée d'arracher à l’injure du temps, à l'oubli, les traits de bravoure, les actes héroïques (en un mot tout ce qui ressortit à la « proece ») auxquels le conflit franco-anglais a donné lieu.
 
Représenter les événements en mettant en évidence les « beaux faits d'armes », c'est raconter l'Histoire du point de vue de la société aristocratique du xive siècle, que charme un récit dans lequel l'image qu'elle veut se donner d'elle-même - preuse et courtoise -coïncide le plus souvent avec les faits rapportés. C'est là un argument pour les détracteurs modernes de Froissart : celui-ci, pour complaire aux Grands qui le protègent (la reine d'Angleterre Philippa de Hainaut, le duc et la

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« duchesse de Brabant, Guy de Blois, petit-neveu du roi de France Phi­ lippe VI), traque les beaux coups d'épée des chevaliers et écuyers, les comportements courtois, et n'offre ainsi qu'une vision partielle et faussée de son époque.

Les historiens positivis­ tes font aussi grief à Froissart de son manque d'analyse devant l'événe­ ment, de son absence d'esprit critique, point de vue qui était déjà celui de Montaigne, bie n que ce fût à ses yeux une qualité, quand il classait " le b on Froissart ,.

parmi les historiens qui se conte ntent « d'enregistrer à la bonne foy t ou tes choses sans chois et sans triage "• la issant au lecteur «le juge, ment entier pour la cognoiss ance de la verité ».

Des lectures plus attentives de Frois­ sart ont, depuis, amené à nuancer ces reproches.

Froissart n'est pas dépourvu de sens c ritiqu e envers les princes et seigneurs qu'il a côtoyés : ainsi, il laisse entrevoir les faiblesses de Guy de Blois devenu presque impotent « par bien boire et fort mengier doulces et délita­ bles viandes "• livré à l'influence de sa femme et de l'un de ses valets de cham­ bre; ou enco re il rapproche le compor ­ tement du Prince Noir de celui de Phi­ lippe VI et jean le Bon qui, par leur intransige ance et l eur caractère hau­ tain, s'aliénèrent la sympathie des Gas­ co ns.

D'autre part, Froissart n 'a pas limité son ambition à relater des faits, il a voulu « esclarcir la matere », écrire non pas une simple chronique, mais une chronique "historiée "· Sa réflexion sur les événements ne brille pourt ant pas par son originalité : ce sont, encore et toujours, Dieu, Fortune, qui constituent l'explication ultime.

Mais il s'effo rce aussi d'éclai.rer les faits pa.r des mobiles psychologiques ; ses explications, sans doute plus romanes­ ques que scientifiques, témoignent néanmoins d'un so uci de percer le ver­ nis des apparences.

Cependant, quelles que soient les réserves qui ont pu êt.re faites sur la qualité historique des Chroniques, aucun censeur n'a résisté au plaisir du texte.

Le gran d écrivain qu'était Miche­ let ne s'y est pas tromp é, et plus d'une fois il cède la parole au chroniqueur, sans même toujours en avertir son lec­ teur, dans la fresque qu'il peint du x1ve siècle (voir par exem ple la bataiHe de Crécy, ou le premier accès de folie de Charles VI).

Car Froissart, poète de cour reconnu, est aussi un maître du rédt et il nous a légué, sinon l a plus véridique, du moins la plus bril­ lante relation des grandes batailles qui, comme Crécy, Poitiers ou Nicopolis, ont marqué son temps.

Mals l'art de Froissart ne se limite pas à nous mon­ trer des bannières et des pennons déployés sur les champs de bataille ou l e sdntillement des armes et armures sous le sole il, ni à nous pei nd.re l'exquise courtoisie d'Édouard III offrant à Eustache de Ribemont son «chape let » d'argent et de perles afin de rendr e hommage à sa vaillance ou celle du Prince Noir qui, vainqueur à Poitier s, sert à souper à son prisonnier, l e roi de France.

Il sait aussi dans sa chronique jouer de toutes les ressour­ ces d'un bon romande.r, animant son r écit par des discou.rs directs -tantôt collectifs, tantôt personnali sés (par exemple, le Bascot de Mau léo n, · homme d'armes et de terrain, ne s'exprime pas comme le grand seigneur qu'est Gaston de Foix)-, exploitant des situations insolites Oe comte de Flan­ d.re caché dans la misérable chaumière d'une pauvre femme à Bruges , ou des lièvre s qui traversent un champ de bataille ...

), usant du merveilleux (voir le premie.r accès de folie de Charles VI dans la forêt du Mans, l'histoire de l'esprit Harton, ou l'ex plic ation du somnambulisme de Pierre de Béarn).

Ce long récit n'a pas été rédigé d' un e seule traite.

Une première pause se. »

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