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Chants de Maldoror (les) de Lautréamont (résume et analyse complète)

Publié le 24/10/2018

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Chants de Maldoror (les).
 
Recueil de six chants en prose, du comte de Lautréamont, pseudonyme d'Isidore Ducasse (1846-1870). Le chant I fut publié sans nom d'auteur à Paris chez Balitout, Questroy et Cie en août 1868, et l'ensemble à Bruxelles chez Lacroix et Verboeckhoven et Cie en 1869. La mise en vente de cette édition originale fut interdite en France.
 
Ignoré de son vivant, Lautréamont est tout d'abord découvert en 1885 par la Jeune Belgique qui publie des extraits des Chants de Maldoror. L'ouvrage est
alors plus souvent jugé comme une curiosité que profondément apprécié, et sa notoriété demeure très limitée. Ce sont les surréalistes qui contribueront le plus efficacement à faire sortir de l'ombre l'œuvre de Lautréamont. En 1919, en effet, ses Poésies sont republiées pour la première fois depuis 1870 par André Breton dans Littérature. L'année suivante, paraît la première grande édition moderne des Chants de Maldoror (Paris, La Sirène) et Breton lui rend hommage dans un article de la Nouvelle Revue française. Dès lors, l'ensemble du groupe surréaliste s'emploie avec succès à la réhabilitation d'Isidore Ducasse et de son œuvre.
 
L’ouvrage se compose de six chants divisés en strophes. Poème en prose ? Récit ? Les Chants de Maldoror résistent à toute tentative de classification générique. Dans le sixième chant Lautréamont parle, à quelques lignes de distance, de sa « poésie » et de ses « récits » et il avait même, un peu plus haut, employé le terme de « roman ».
 
Le texte est certes fondé sur une esthétique de la rupture : chaque strophe peut être lue comme un fragment poétique autonome et aucun fil linéaire, qu'il sort narratif, descriptif ou discursif, n'est suivi bien longtemps. Toutefois le personnage de Maldoror, moralement complexe, physiquement polymorphe - il a le pouvoir de se métamorphoser - et grammaticalement présent sous les formes du « je » et du « il » - avec de constants glissements de l'un à l'autre pronom — confère à l'œuvre une indéniable continuité.
 
Une évolution se dessine dans la succession des chants : dans les quatrième et cinquième, bien plus que dans les trois premiers, le lecteur est directement interpellé, l’écriture se commente elle-même et le langage fait l'objet d'un traitement de plus en plus vertigineux et provocant à grand renfort de phrases dune longueur et d’une sinuosité acrobatiques, de comparaisons étranges (les fameux « Beau comme [...] » apparaissent au chant IV) et de développements déroutants (par exemple sur le rapport entre des piliers, des épingles et des baobabs, chant IV. strophe 2). Le sixième chant se distingue explicitement des autres : « Les cinq premiers récits [_] étaient le frontispice de mon ouvrage, le fonde-


« ment de la construction, l'explication préalable de ma poétique future.» L'auteur précise plus loin : «Je crois enfin avoir trouvé [ ...

] ma formule définitive.

C'est la meilleure : puisque c'est Je roman ! » L'utilisation constante et croissante de J'ironie dans /es Chants de Maldoror nous invite toutefois à prendre avec précaution une telle affirmation.

Il est vrai que, d'une strophe à J'autre, le sixième chant dessine une continuité nanrative beaucoup plus affirmée que dans Je reste de l'ouvrage.

Mais le mélange de situations conve­ nues et d'une fantasmagorie débridée, l'utilisation explicite de «trucs à effet» nous convient à déjouer l'illusion romanesque.

Héros maudit, Maldoror porte sa vocation et son destin inscrits dans son nom dont le mal forme la première syl­ labe; à une consonne près, on peut lire aussi dans ce nom la douleur (dol or 1 doror).

Héritier explicite du roman­ tisme satanique - «J'ai chanté le mal comme ont fait Mickiewicz, Byron, Milton, Southey, A.

de Musset, Baude­ laire, etc.

Naturellement, j'ai un peu exagéré le diapason pour faire du nou­ veau [ ...

] » (lettre à l'éditeur Ver­ boeckhoven) -, Lautréamont campe un personnage hyperboliquement malé­ fique qui trouve dans la contemplation de la souffrance une suprême jouis­ sance : « ô ciel ! comment peut-on vivre, après avoir éprouvé tant de voluptés ! Il venait de m'être donné d'être témoin des agonies de mort de plusieurs de mes semblables » (chant II, strophe 13).

Maldoror ne se borne pas, loin de là, à assister passive­ ment au spectacle de la douleur.

Il se complaît à faire souffrir les humains et trouve pour cela de multiples raffine­ ments de cruauté.

Non content, par exemple, de contempler voluptueuse­ ment la vaine lutte des naufragés contre les flots déchaînés, Maldoror, posté sur le rivage, les achève à coups de fusil avant de faire l'amour avec l'« énorme femelle requin >> venue les dévorer (ibid.).

Ailleurs, il viole une fil­ lette, la fait ensuite violer et égorger par son bouledogue puis, muni d'un > (1, 3), il a pris la > et lance à ses créatures : « ]e vous fais souffrir, et c'est pour mon plaisir>> (Il, 3).

On le voit aussi torturer à mort un adoles­ cent après avoir connu les plaisirs de la chair en compagnie d'une prostituée (Ill, 5).

La violence de Maldoror est donc le fruit de la révolte et du désespoir : (III, 1).

Comme l'écrit Blanchot,. »

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