Britannicus de Racine
Publié le 30/05/2012
Extrait du document


«
62 RACINE 1 Britannicus
relies et aux guerres pour assurer la cohésion de l'État.
Pourtant le rôle du sou
verain
jusqu'à Louis XIV est plutôt, comme l'a remarqué Jacques Ellul, celui
d'un arbitre sacré, d'un héros de référence qui se superpose aux grands pouvoirs
féodaux pour contrebalancer leur influence à l'aide du sceptre et des lois.
Ces
rapports de forces entre roi et grands induisent les valeurs héroïques récurrentes
dans
1' œuvre de Corneille, par exemple, qui représente à ses débuts des héros
toujours généreux et des rois souvent bienveillants ou cléments comme
l'Auguste de Cinna ou la reine Isabelle dans Don Sanche d'Aragon affirmant :
«Je n'abuserai point du pouvoir absolu».
L'idée d'un pouvoir autoritaire fondé
sur lui-même dans un souci d'efficacité, véhiculée par Machiavel qui laïcise
le
politique, par Jean Bodin qui formalise le concept de souveraineté, et dont la
nécessité apparaît dans le Léviathan de Hobbes, est assez répandue pour influen
cer fortement
1' action gouvernementale dans la France de Richelieu.
Dès lors que la puissance devient la seule chose nécessaire à l'État, le pou
voir politique agit sans contrôle, sans que les sujets puissent
demander de
comptes
au roi qui progressivement concentre entre ses mains tous les moyens
de
gouvernement : armée, finances, prestige.
La raison d'État, devenue le
moteur de son action, en justifie 1 'arbitraire.
Sous Louis
XIII, la brutalité de
l'affirmation absolutiste était atténuée par la distance établie entre la puissance
toujours sacrale du roi et l'acte exécuté par Richelieu, occultant le crépuscule de
la féodalité.
Quand Mazarin, sous la régence d'Anne d'Autriche, mère de
Louis
XIV, tente de reproduire le modèle, il se heurte à l'orgueil des grands.
On a
souvent
vu dans les soubresauts de la Fronde et ses menaces sur l'autorité de
« l'Enfant-Roi » les germes du despotisme louis-quatorzien.
Quelle qu'en soit
l'origine, l'ambition absolutiste du Roi-Soleil est indissociable de ces rivalités et
les spectateurs du temps face au problème de la légitimité du pouvoir dans
Britannicus ne pouvaient faire abstractions des conflits passés entre le roi et les
princes du sang.
Incarnation et mythe, Louis
XIV a poussé jusqu'au vertige l'identification
entre le monarque et l'État
d'une part, entre sa personne et l'essence divine du
pouvoir d'autre part.
Fondée sur un mystère dont le roi est le seul détenteur, la
monarchie dispense le souverain de toute concertation et de toute consultation
d'une autre instance que lui-même ; elle s'exerce sans limites dans un ordre
immuable
d'où sont exclus toute contestation et même tout débat puisque l'État
est le bien tandis que le prince détient la vérité.
Le climat politique de la première décennie du règne est bien celui
d'un
régime autoritaire : les tractations secrètes de la politique congédient 1 'éclat de
l'action publique sans susciter immédiatement de révolte ou d'opposition dans
la mesure où le roi invite superbement les grands à participer au rituel d'auto
célébration de sa personne après les avoir dépouillés des parcelles de pouvoir
qu'ils se disputaient encore.
La représentation sur scène
d'un empereur despote dans Britannicus, hési
tant entre l'influence
d'un affranchi et celle de deux représentants de la noblesse
sénatoriale, faisait inéluctablement écho à l'humiliation des cardinaux et des
princes du sang écartés progressivement du conseil du roi, à la suppression des.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Racine, dramaturge majeur du XVII, auteur de nombreuses tragédies dites classiques comme Bérénice, Britannicus, Andromaque.
- BRITANNICUS, de Racine
- BRITANNICUS Jean Racine - résumé de l'œuvre
- Britannicus 1669 Jean Racine (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)
- BRITANNICUS. Tragédie en cinq actes et en vers de Jean Racine (fiche de lecture et critique)