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Battling le TÉNÉBREUX OU la Mue périlleuse d'Alexandre Vialatte (fiche de lecture et critique)

Publié le 15/10/2018

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lecture

Battling le TÉNÉBREUX OU la Mue périlleuse. Roman d'Alexandre Vialatte (1901-1971), publié à Paris chez Gallimard en 1928.

 

Ema Schnorr, Allemande et artiste peintre, débarque un soir d’été dans la petite ville de province où trois collégiens chimériques vivent une adolescence rêveuse. Le narrateur, jamais nommé, et ses condisciples Femand Larache -dit Battling à cause de son allure de « brute paisible » - et Manuel Ferraci - plus âgé de quelques années - sont troublés par cette arrivée. Manuel doit passer en conseil de discipline pour avoir dessiné une caricature obscène, mais aussi pour avoir été vu dans les rues de la ville tard dans la nuit Battling, secrètement amoureux de sa nouvelle voisine, retrouve les mêmes émotions que lors de son enfance misérable, où il écrivait des lettres obscènes à la servante qu'il adorait en cachette. Il fait parvenir à Ema un bouquet de roses, bientôt suivi cf un « hymne à la laideur » qu’il a composé pour elle. Mais Ema se vexe. Quant à Manuel, il est exclu du collège pour huit jours. En réalité, il sortait de chez Ema. Celle-ci, se croyant gravement malade, était venue commander chez l’onde marbrier de Manuel un monument funéraire, une liaison s'en était suivie. Battling songe alors à s’engager dans l'armée. Il se rabat provisoirement sur Céline, chanteuse à l’Alhambra. Mais alors qu'il s'apprête à passer sans véritable envie, la nuit avec elle, il découvre sur la cheminée le carnet de Manuel. Il s’enfuit Pendant que Manuel se lasse doucement d’Ema, Battling désespéré se tire un coup de fusil en pleine poitrine. Par fidélité envers son ami défunt Manuel rompt avec Ema et s’engage.

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« phique et encombrante», d'« un e pudeur extrême ,.

(qui plus loin sera dite « mortelle ,.

) et d'« une totale absence de cynisme ,.

.

Erna Schno rr, elle, incarne le rêve germanique, avec sa c tête étrange et géniale de femme lai de ».

Artiste co mme Manuel, qui dessine et sculpte, « elle avait réalisé le rêve mêm e que l 'enfance bâtit en regardant des livres scolaires ».

C'es t par elle qu'o n en tre pleine­ ment dans le véritable sujet du livre, la c fermentati on » de l'adolescence en ses grand eurs et ses périls : « Les adul­ te s [ ...

] ont peur de ta nt de richesse et de scorie.

,.

Le plus grand adver saire de Battling n'est pas Manuel, c'est lui­ mêm e.

Et so n combat autodestructeur, co ntr e les vestiges de son enfance sor­ dide et sournoi se, es t représen té par la lutte titan esque de Laocoon et des ser­ pents (gravure évoquée de nouveau, et pour cau se, dans le Fidèle Berger, 1943 ).

So n " besoin de souffrir et de faire souffrir », son « avidité de gâcher sa chance» le conduisent comme fatal e­ ment à l'autod épré ciation et à sa forme ultime : le suicid e.

La réussite senti­ mentale de Ma nuel , qu i le devance p artou t, n'agit que comme catalyse ur.

C 'es t p ourquoi l'échange final des des ­ tins des deux personna ges -le clairon légué par Battling rappelant à Ma nu el sa culpabilit é - aboutit pour celui-ci à «u n gâchage qui refuse de s'avouer"· La narrati on rétrospective de cette aventure est conduite comme un véri­ table voyage intérieur : " Il me suffit de ferme r les yeux.

» À la déploration, aux " nevermore » réitérés, aux invocations à Battling s'adjoint une constructio n gigogne qui fait fréquemment appel aux retours en arrière.

Mais surtout , dès ce premie r roman, le ton est trouvé : nostalgie à l 'évocation du "prestige des jeudis lointains "• myth ologie co llégie nne (le vieux gen­ tleman de la vallée, le vieux Sachem, Ubu), subtil mélange des genres où hum our et déri soire se côtoie nt.

Le mon ument funéraire, occasion de la ren cont re de Manuel et d'Erna (qui l'a souhaité " horriblement prétentieux », po ur passer inaperçu) finira par servir de tombeau au pauvre Battling .

En fin de comp t e, ce r oman est avant t o ut un drame de l'impossibi lité de comm uniquer.

B attling , qu e la richesse de l'inspi ratio n oppresse, est incapable de la con verti.r en u ne œuvr e : c Vous n'êtes vraim e nt pas fait pour compr en­ d re l e désespoir romantique ,., dit son pe rspicace professeur de franç ais le j o ur même de sa mort.

De même, il est incapable d'exprime r à Ern a son amour trop immense.

Lui qu i " rêva it de cre­ ver son corps de fatigue » finit par faire exploser d'un coup de fusil " sa poi­ trine b risée comme un œuf de Pâques,., rejoignant pour l 'éte rnité sa nature ténébre use.

Face à la m ort dépeinte Ici dans tou te son horreur , c'est Manuel, dont l a respo nsabilit é n'est qu 'in directe, qui se se nt tenu d'assumer le dest in de Battling en renonçant à sa carrière artistiqu e pour s'engage r, comm e celui-ci voulait le faire.

Et c'est p eut-être à lui-même et à ses rêves d'artiste sacrifiés au ssi bien qu 'à Battling que le narrateur devrait adresser ces mots:" Va, la vie s'est bien passée de toi.

,.. »

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