Autobiographie, chapitre dix de Jacques Roubaud (fiche de lecture)
Publié le 15/10/2018
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Autobiographie, chapitre dix.
« Poèmes avec des moments de repos en prose » de Jacques Roubaud (né en1932), publiés à Paris chez Gallimard en 1977.
En 317 paragraphes numérotés, qui correspondent à la pagination de «cahiers» manuscrits, mais coupent dans le livre l’unité traditionnelle du texte, voire de la phrase, en leur milieu, Jacques Roubaud compose une ironique autobiographie impossible des dix-huit années qui précédèrent sa naissance. La variété formelle, la multiplicité des plans de lecture - le lecteur étant réveillé parfois par des panonceaux, égaré dans le « fragment de l’extrait de préface », évidemment situé vers la fin... - ainsi que la permanente intertextualité déclarée, rendent irrésumable un livre qui est d’abord sa propre expérimentation, et dans lequel le recours à l’ordre mathématique semble en premier lieu mettre en relief l’impossibilité de tout système : « Ce que je dis a l’air en désordre mais ne l’est pas, je dis les choses tout en ordre comme elles sont arrivées. »
Au paragraphe 294, « Afterface (notes pour) », l'auteur paraît livrer l'une des clés possibles d'un texte vertigineusement énigmatique : « La composition de ce livre est son explication ; autrement dit, l'élucidation de la composition par le livre est le livre » : ancrage explicite dans une modernité faisant du texte sa propre aventure, et plus précisément ici dans les expériences, à la fois ludiques et productives, de l'Ouvroir de littérature potentielle (Oulipo) dont Jacques Roubaud, mathématicien et poète, est l'un des plus célèbres membres. Mais dans un entretien avec Pierre Lartigue, il précisera : « À vrai dire, la connaissance du procédé général de construction n'est pas indispensable à [la] lecture ; on n'a pas forcément besoin des plans de l'architecte pour entrer dans une maison, surtout si l'on ne doit pas y vivre. »
«
1932), publiés à Paris chez Gallimard
en 1977.
En 3 17 paragraphes numérotés, qui corres pondent à la pagination de « cahiers » ma nuscrits, mais coupent dans le livre l'unité tradi
tionnelle du texte, voire de la phrase, en leur
milieu, jacques Roubaud compose une ironique
autobiographie impossible des dix-huit années qui précédèrent sa naissance.
La variété fonmelle, la multiplicité des plans de lecture -le lecteur étant réveillé parfois par des panonceaux, égaré dans le « fragment de l'extrait de préface ».
évi demment situé vers la fin ...
-ainsi que la penma nente intertextualité déclarée, rendent irrésuma
ble un livre qui est d'abord sa propre
expérimentation, et dans lequel le recours à l'ordre mathématique semble en premier lieu mettre en relief l'impossibilité de tout système : «Ce que je dis a l'air en désordre mais ne l'est pas, je dis les choses tout en ordre comme elles sont arrivées.
»
Au paragraphe 294, >, l'auteur paraît livrer
l'une des clés possibles
d'un texte verti
gineusement énigmatique : « La com
position de ce livre est son explica
tion; autrement dit, l'élucidation de la
composition par
le livre est le livre >> :
ancrage explicite dans
une modernité
faisant
du texte sa propre aventure, et
plus précisément ici dans les expérien
ces, à la fois ludiques et productives, de
l'Ouvroir de littérature potentielle
(Oulipo)
dont jacques Roubaud, ma
thématicien et poète, est l'un des plus
célèbres membres.
Mais dans
un entre
ti~n avec Pierre Lartigue, il précisera :
>
Plutôt que de s'élancer dans la
recomposition de la savante algèbre
présidant à
la· structure du livre, sans
doute vaut-il mieux interroger
le texte
dans sa substance : que signifie
le pro- jet
d'une autobiographie d'«
avant
soi >> ? Critiquant ou se moquant du
genre autobiographique, Jacques Rou
baud fait de son livre le procès de l'ins
tance qui y préside : « Malgré de nom
breuses plongées dans les biblio
thèques, je fus incapable de dénicher
dans la moindre bibliographie, dans le
moindre catalogue Matières, la plus
petite brochure qui me fût consacrée
(étant fort modeste, persuadé de
mon
insignifiance, je n'en ai pas été surpris
outre mesure ;
comment pourrais-je
être, moi,
une "matière" ?).
>> Ainsi
l'ironie condamne-t-elle ici dans le
même mouvement la complaisance
des littératures personnelles et, plus
profondément, le leurre idéologique
qui les instaure : derrière le caractère
presque fantastique de la recherche de
soi-même avant sa propre naissance
se
profile en effet une mise en question
du statut du « je >>, que le texte au para
graphe 164 avait déjà résumé sous la
formule magistrale, empruntée à
l'Homme approximatif (1931) de Tzara,
de
>.
Machine de
guerre donc,
Autobiographie, chapitre
dix
est aussi une réflexion sur la parole
personnelle, où le voile formaliste
per
met paradoxalement, mais en biais, et
sans la naïveté des
« confessions direc
tes>>, une réinscription de soi-même :
> qui composent d'ordinaire le
récit de vie, l'authenticité de la voix
elle-même est remise ici
en question.
C'est pourquoi
les dates de 1914 à 1932
sont loin de constituer
une simple bou
tade, le livre étant formé dans sa plus
grande partie d'une réécriture des
poè
mes parus dans cette période.
S'y
recomposent ainsi la plupart des
grands textes surréalistes (Éluard,
Ara
gon, Soupault, Breton, mais aussi Des-.
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