Athalie (résumé & analyse) de Racine
Publié le 28/11/2018
Extrait du document
«
décisive;
elle est consacrée à un épisode biblique aussi
essentiel pour un chrétien que l'était le mythe d'Oreste
pour un Athénien; le meurtre d'Athalie, dont la significa
tion paradoxale est la préservation d'une lignée d'où
doit naître le Sauveur, peut faire songer au parricide de
1' Orestie, dont la conséquence ultime était la consécra
tion de la civilisation athénienne.
Déjà , au dénouement
de Phèdre, l'adoption d' Aricie par Thésée avait valeur
de mythe fondateur.
La mort de la vieille reine et le
couronnement de son petit-fils, évoqués au quatrième
livre des Rois et contés de manière un peu différente
dans les Chroniques ou Paralipomènes, n'avaient inspiré
avant Racine que deux auteurs obscurs de tragédies de
collège.
Le poète dut être déçu par la création de la pièce,
objet de « répétitions » sans costumes ni décors, et avec
l'accompagnement d'un simple clavecin.
Le musicien
J.-B.
Moreau était aussi mal servi que le dramaturge.
Synopsis.- L'action se situe au 1x• sièc le avant Jésus
Christ.
au cours de la période où coexistent en Terre sainte
le royaume d'Israël.
avec pour capitale Samarie.
et le
royaume de Juda, constitué des tribus de Juda et de Benja
min.
avec pour capitale Jérusalem.
C'est ce royaume-ci qui
doit préserver la famille d'où naîtra le Messie.
Mais à la
mort de son roi Joram, Athalie, sa veuve.
s'est emparée du
pouvoir et a imposé le culte de Baal.
naguère imposé à
Samarie par son père Achab et sa mère.
Jézabel la
Tyrienne.
Le nouveau roi d'Israël, Jéhu, a.
au contraire,
sous l'inspiration divine, rétabli le culte de Jéhovah, et fait
périr Jézabel, les prêtres de Baal, les descendants d'Achab
et Ochosias, fils de Joram et légitime héritier de Juda.
Furieuse.
Athalie a ordonné le massacre des enfants
d'Ochosias.
A l'aube de la fête des Prémices, où l'on com
mémore la révélation de la Loi faite à Moïse au mont Sinaï.
le grand prêtre Joad tente de raffermir la foi chancelante
d'Abner, officier tenu de servir Athalie mais attaché encore
à la religion de ses pè re s.
On apprend qu'Athalie cherche à
s'emparer d'un trésor caché, dit-on.
dans le temple par
Joad et son épouse Josabet.
Un dialogue entre Joad et
Josabet apprend au spectateur qu'un petit-fils d'Athalie a
été sauvé du massacre, est élevé dans le temple, et que
Joad entend ce jour même révéler son existence (acte 1).
Tandis qu'on s'apprête à célébrer la fête annoncée, Athalie
pénètre dans le temple, où elle aperçoit un enfant dont la
vue la bouleverse.
Le même enfant lui est en effet apparu
en songe, armé contre elle d'un" homicide ancien»; dans
le même songe, le fantôme de Jézabel avertissait sa fille
d'un danger imminent.
Le récit en est fait en présence
d'Abner.
qui tente de calmer Athalie, et de Mathan, prêtre
de Baal, qui la presse de s'assurer d� cet enfant.
Joas,
introduit auprès d'elle sous le nom d'Eiiacin et invité à la
suivre dans son palais.
refuse de quitter le temple pour
vivre auprès d'une« telle mère » (acte Il).
Envoyé à son tour
au temple pour réclamer l'enfant.
Mathan se heurte au
refus de Joad.
qui fait fermer les portes de l'enceinte
sacrée.
Inspiré par Dieu.
le grand prêtre prononce un mor
ceau prophétique.
qui évoque l'histoire à venir du peuple
élu jusqu'à l'avènement de la Jérusalem nouvelle (acte Ill).
Joas est sacré roi par Joad, qui l'instruit des devoirs qui
sont désormais les siens.
Cependant l'armée d'Athalie
s'approche et on apprend qu'Abner « est dans les fers ••
(acte IV).
Le même Abner, li,béré, a été chargé par Athalie
de venir réclamer le jeune Eliacin et le trésor qu'on croit
caché dans le temple.
Joad feint d'accéder à cette
demande et consent à laisser entrer Athalie.
On montre à
la vieille reine l'enfant couronné et siégeant sur le trône
royal.
Les lévites accourent en armes et entourent Athalie.
dont l'armée est en fuite.
le dévoué serviteur Mathan
égorgé.
et qui n'a plus d'autre issue que d'ultimes impréca
tions.
Elle est entraînée hors du temple pour être mise à
mort (acte V).
Dans Athalie, Racine présente une sorte de raccourci
de l'Ancien Testamen t, dont les livres sapientiaux, pro
phétiques et lyriques trouvent ici un reflet, aussi bien
que les livres proprement historiques.
Mais il rattache
également son œuvre à la tradition de la tragédie occi
dentale, en se souvenant d'Ion d'E uripide , qui inspire le
dialogue de l'enfant mysté rieux et de sa grand -mère, en
empruntant plusieurs traits au songe d'Hérode dans la
Mariamne de Trist an l'Hermite (1636), et surtou t en
2004 retrouvant
l'esprit de la Renaissance française: comme
les tragédies de Garnier, et les Juives en particu lier,
Athalie met en œuvre une action violente destinée à tou
cher la sensibilité immédiate, et fait alterner des poèmes
et des discours obligeant l'esprit à s'interroger sur 1' éco
nomie générale de l'histoire.
L'œuvre a trouvé au
xvm• siècle des interprétations dignes d'elle.
Elle a forcé
l'admiration de Voltaire, qui s'en est inspiré dans
Mahomet.
Elle fascine encore nos contemporains, qu'ils
y voient des allusions à la seconde révolution anglaise,
une protestation indirecte contre les persécutions visant
les jansénistes, ou une illustration, parmi d'autres, de
l'histoire humaine, dont on sait bien, quelle qu'en doive
être l'issue, qu'elle s'écrit avec du sang et des larmes.
BIBLIOGRAPHIE G.
Mongrédien, Athalie, Paris, Malfè re, 1929; J.
Orcibal, la
Genèse d'Esther et d'Athalie, Paris, Vrin, 1950; G.
Spillebout,
le Vocabulaire biblique dans les tragédies sacrées de Racine,
Genève, Droz, 1968; H.-P.
Salomon, éd.
d'Athalie, préface par
Jean Mesnard, Paris, Didier, 1969.
Racine au théâtre
Le texte des tragédies de Racine est un texte nu.
Les
didascalies y sont rares.
Si l'on excepte les deux tragédies
bibliques.
le décor est réduit au " palais à volonté».
Il est
même arrivé, comme pour la création d'Iphigénie à Versail
les, que le poète consentît à la substitution d'une décora
tion purement ornementale à ce qu'il indique lui-même en
tête de son texte («la scène est en Aulide.
dans la tente
d'Agamemnon »).
Cette discrétion, dont témoigne encore
la sobriété des notes du décorateur de l'Hôtel de Bourgo
gne, laisse apparemment aux metteurs en scène et acteurs
une très grande liberté.
Cependant.
des traditions de jeu.
celles de l'Hôtel de Bourgogne puis de la Comédie
Française.
se sont transmises de génération en génération
jusqu'au lendemain de la dernière guerre.
Moyennant les
adaptations au goût du public.
qu'il lOt aussi celui du drame
bourgeois, du drame romantique, du théâtre naturaliste ou
du théâtre symboliste, le problème de l'interprétation de
Racine a longtemps été celui de la beauté et de la justesse
de la diction.
C'est dire qu'il restait lié aux qualités propres
à chaque interprète.
sa présence en scène comptant moins
que le timbre de sa voix et sa connaissance de la mélodie
de l'alexandrin.
Une sorte de révolution s'est opérée à partir
de la mise en scène de Phèdre par Gaston Baty en 1939, où
s'imposait une lecture d'ensemble de l'œuvre, considérée
comme une illustration de l'esprit port-royaliste.
Les mises
en scène qui ont suivi se sont souvent inspirées de princi
pes analogues.
Le maître d'œuvre d'une représentation
racinienne entend, aujourd'hui, non plus poursuivre la trad i
tion du bien dire.
mais expliquer la pièce.
contester les
principes qui l'ont apparemment inspirée, voire se servir
d'elle comme du tremplin nécessaire pour une création
nouvelle.
Nous nous limiterons ici aux trois œuvres de
Racine le plus fréquemment représentées: Andromaque,
Britannicus et Phèdre.
Andromaque : Selon Brossette, la pièce .avait été écrite
pour la Du Parc, cette belle actrice de trente ans que Racine
avait enlevée à Moliè re .
Auprès d'elle.
la Desœillets dans
le rôle d'Hermione.
Floridor dans celui de Pyrrhus et
Montfleury dans celui d'Oreste assuraient à l'ensemble une
homogénéité certaine, due à l'âge respectif de ces trois
acteurs.
L'histoire d'Andromaque a été marquée par quel
ques interprètes de choix, tels que Sarah Bernhardt et Julia
Bartet dans le rôle de l'héroine, la Clairon et Rachel dans
celui d'Hermione.
Lekain, Talma et Mounet-Sully dans celui
d'Oreste.
Parmi les mises en scène modernes, on retiendra celles
de Pierre Dux (1964, Comédie-Française).
où la nudité du
plateau, la simplicité du geste et de la diction et la précision
de l'enchaînement visent à mettre en évidence la géomé
trie de l'intrigue sentimentale; de Jean-Paul Roussillon.
qui
prend deux actes de la pièce pour en faire l'occasion
d'exercices d'acteurs (Petit Odéon, 1974); de Daniel Mes
guich (Biothéâtre.
1975).
Britannicus: Le témoignage du gazetier Robinet est
aussi élogieux et imprécis sur la création de l'œuvre que
sur celle des autres pièces de Racine.
Le rôle d'Agrippine
était tenu par la Desœillets; il a été renouvelé au siècle
suivant par la Clairon, qui lui imposait retenue et" naturel »,.
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