Anton Pavlovitch TCHEKHOV : La Steppe
Publié le 24/09/2012
Extrait du document
Tchekhov se souvient des voyages qui duraient plusieurs jours pour arriver chez son grand-père, régisseur de la comtesse Platov, ponctués de "feux allumés le soir, de jeux, de chants et de visages entrevus". Aussi bien, Iégôrouchka-Anton, qui "voit tout en nouveauté", ne peut que s'étonner face au spectacle du "pays fantastique" offert à son regard ravi. Pour dire ce bonheur du souvenir, Tchekhov use d'une écriture sobrement impressionniste : une sensation que suit sa cause naturelle. Son réalisme symbolique le sert pour animer l'inanimé : un anthropomorphisme senti, sans anthropocentrisme, construit, avec une intuition de la nature presque douloureuse, le réel...
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Photo Goldner 1 Sipa-Icono
"Il faut s'attacher à
de petits détails et les grouper de telle
façon qu'une fois le livre fermé, devant
les yeux, se forme un tableau" (Anton
Tchekhov à Alexan dre Tchekhov, 1886).
Ce dont se souvint
l'auteur en compo sant La Steppe en
1888.
Aucun artifice
dans ce paysage tel
un lavis
que sem blent esquisser l' om bre avec la lumière.
Parce qu'à partir du peu qui est dit, tout le reste est visible, le lecteur peut retrou ver, avec l'enfant qu'il fut, le privilège de pallier en imagi nation sa solitude essentielle que sym bolise le peuplier isolé dans la steppe :
une part d'enfance
anime l'écrivain vé ritable.
Le livre
Au péril de la steppe
J
uillet 1870, en Ukraine.
Une briska emporte à travers la
steppe deux marchands de laine, Kouzmitchov, le père
Christophore, ainsi
qu'un enfant de dix ans, Iégôrouchka
Anton, que sa mère, la sœur
de Kouzmitchov, envoie au lycée.
Il leur faut s'entendre avec V arlâmov, régisseur des domaines
de la riche et jolie comtesse Dranîtski, afin de vendre
au mieux
des intérêts de tous.
Kouzmitchov a la garde de son neveu que
le prêtre invite à faire son miel de ce qui lui sera appris.
Leurs
affaires les requièrent de confier provisoirement l'enfant aux
rouliers qui convoient la laine.
Iégôrouchka découvre les mille
et
un vêtements dont s'habille la steppe de l'aube au crépus
cule.
La monotonie du paysage, sa solitude et son infini relatif ef
fraient l'enfant ouvert à toutes les impressions.
Des bergers,
"figures de l'Ancien Testament", y incarnent l'indifférence au
temps fabriqué des horloges.
Le charme soudain de la belle
comtesse sur légôrouchka symbolise pour lui la poésie immé
diate du lieu.
Pour surgir dans la lumière du brasier quotidien
des rouliers, le vagabond représente le péril erratique de la
steppe qu'ils conjurent par leurs légendes.
Une petite musique du temps
" Q ue serait cette nouvelle vie qui commençait pour légô-
rouchka ?" nous demande le narrateur au terme de sa
relation d'un voyage de quatre jours dans la steppe.
La magie
s'évanouira-t-elle au contact de la vie rigoureuse du lycée
? A
un ordre naturel quasi liturgique du temps pour celui qui se
rappelle l'aventure inoubliable de cette traversée va succéder
l'ordre tristement régulier de 1 'étude.
Il ne s'agit pas en effet d'une véritable histoire avec début et
fin mais d'un simple récit
de voyage.
Surprise des impressions
qu'légôrouchka ne relie qu'après la surprise passée
à leur
cause :
"A ce moment quelque chose tomba ...
sur les ballots
(de laine), c'était la
pluie", surprise des rencontres comme si on
s'éveillait soudain, la steppe, que mesure l'alternance régulière
du soleil et de la lune, est ainsi le lieu où chanter l'accord de
l'homme et
du monde..
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