AnabaSE de Saint-John Perse (fiche de lecture)
Publié le 15/10/2018
Extrait du document
AnabaSE. Poème de Saint-John Perse, pseudonyme d'Alexis Saint-Leger Leger, dit aussi Alexis Leger (1887-1975), publié à Paris dans la Nouvelle Revue française en janvier 1924. Les Éditions Gallimard en donnèrent rapidement deux éditions en volume (janvier 1924, 1925), après s'être engagées à renoncer à toute publicité. Ce poème fut composé par l'écrivain durant son séjour en Extrême-Orient (1916-1921).
Deux « chansons », qui se répondent par leur disposition strophique, leur répétitivité (ABA), et leur contenu (opposition), forment l’indpit et la clausule du poème Anobase que Saint-John Perse définissait, par étymologie, comme montée en selle et expédition vers l’intérieur.
«
plus dilué, de la conjonction (1, IV, V),
à la disjonction (causes exposées
en Il, III ; effective en V) et à une nou
velle conjonction
(VII, VIII) qui trouve
sa version ultime dans les épousailles
ré_génératrices des femmes et de
l'Etranger
(IX), sans qu'une clôture au
mouvement soit imposée
(X).
Ce récit
faitintervenir
un narrateur.
( « je » ), qui
s'actualise
·aussi en «nous» (II, VII),
sans que le lecteur sache son nom.
Pur
actant, il enferme· en.
lui des abstrac
tions -la loi, la force
(I), la marche, la
violence (
« Un grand principe de vio
lence commandait à nos mœurs
»,
VIII) - comme ses interlocuteurs
contiennent en eux les songes, la
sédentarité, le
bonheur matériel (VI).
Ainsi, les personnages se définissent-ils
par les fonctions qu'ils remplissent et
les valeurs
dont ils sont porteurs.
Un
tel récit échappe dès lors à toute réfé
rence historique et géographique, tem
porelle
et spatiale, même si quelques
traces orientales surgissent dans telle
partie
du poème (II, III, X).
Anabase est
une épopée de l'humanité, symbolisée
par ce peuple guerrier, législateur, res
pectueux des rites, mais
non produc
teur (voir les travaux de Georges
Dumézil sur les trois classes constituti
yes des sociétés mythiques), et par cet
Etranger fascinant,
« duc d'un peuple
d'images à conduire aux Mers Mor
tes», qui, refusant le culte des images
et la sclérose des sédentaires mirant
leur état présent
(V), va en avant sans
parvenir à
un établissement définitif.
L'Étranger incarne, dans cette société
où il s'installe, le besoin de l'autre
(thème de la soif,
du sel).
L'homme est
mû par le désir de savoir et le désir de
l'être, qui le conduisent, par la science
et surtout la poésie qui lui est supé
rieure, à repousser les frontières
(Dis
cours de Stockholm, 1960).
La rupture et
le nomadisme
ne prennent sens dans
le poème
qu'en fonction de cette
limite toujours présente
dans l'énoncé.
(
« ...
Roses, pourpre délice : la terre
vaste à
mon désir, et qui en posera les
limites
ce soir ? ...
la violence au cœur
du sage, et qui en posera les limites
ce
soir? »1 III).
Le danger ne vient pas
cependant de
la civilisation.
Lois, rites,
codes
et liturgies, classes sociales et
organisation de l'espace sont intégrés,
en de vastes énumérations,
au chant
poétique et célébrés comme autant de
valeurs humaines.
L'accoutumance
nuit à l'homme (voir la thématique de
la graisse et
du minéral, IV).
Significa
tivement, la poésie rompt cette pétri
fication ;
il suffit de comparer l'incipit
de chaque
« chanson » : « n naissait un
poulain sous les feuilles de bronze ,, et
«Mon cheval arrêté sous l'arbre plein
de tourterelles, je
siffie un siffiement si
pur».
Saint-John Perse déclarait en
recevant le prix Nobel : " L'inertie seule
est menaçante.
Poète est celui-là qui
rompt pour nous l'accoutumance.
»
«Et ceux qui l'ont croisé un soir au
détour du chemin
l'ont appelé Trans
gresseur ...
» (Discours de Florence, 1965).
L'Étranger, qui repousse les limites de
l'humain, est le poète,
fils de Dante.
Monté sur son cheval, symbole
du
désir, il ne se satisfait pas du monde
visible et connu (III), ni du songe,
facile conciliation
du présent et de
l'ailleurs.
La poésie est action, au sens
rimbaldien
; le futur exprime un vou
loir qui se réalisera :
«Je m'en irai avec
les oies sauvages, dans l'odeur fade
du
matin ! ...
» (V).
Dans le cours de l'His
toire, la dissémination sous la force
du
vent (motif de la poussière, de là par
cellisation,
II) n'est pas néantisation,
mais fertilisation.
La graine, transpor
tée par les souffles aériens,
et aussi poé
tiques, résume métaphoriquement ce
transport
du sens : « Et la terre en ses
graines ailées, comme
un poète en ses
propos, voyage ...
» (V).
Le temps est
éternel retour
du même pour une régé- ·
nérescence, sans que soit jamais atteint
le
« réel absolu » (Discours de Stoc-.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Amers [Saint-John Perse] - Fiche de lecture.
- Amers [Saint-John Perse] - Fiche de lecture.
- ANABASE, poème de Saint-John Perse
- Fiche Auteur : SAINT-JOHN PERSE
- ÉLOGES Saint-John Perse (résumé & analyse)