Amour LA POÉSIE (L') de Paul Éluard (fiche de lecture)
Publié le 15/10/2018
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Amour LA POÉSIE (L'). Recueil poétique de Paul Éluard, pseudonyme d'Eugène Paul Grindel (1895-1952), publié à Parts chez Gallimard en 1929.
Ce recueil comprend cinq sections : « Premièrement », « Seconde Nature », « Comme une image », « Défense de savoir », « Défense de savoir ». Seules ces deux dernières, au titre identique, ont été publiées séparément, sous la forme d'une plaquette en deux parties, aux Éditions Surréalistes en février 1928 : Défense de savoir, qui constitue, avec les Dessous d'une vie ou la Pyramide de décembre 1926, le seul volume de poésie entre Capitale de la douleur (1926) et l'Amour la poésie (1929). Quelques-uns de ces poèmes avaient eux-mêmes paru dans la Révolution surréaliste durant l'année 1927.
Réunissant ses poèmes. Eluard place « Défense de savoir » en fin de recueil, comme pour en marquer le sommet, l’aboutissement. S’il est évidemment impossible de reconstituer une trame narrative dans l'Amour la poésie - bien que plusieurs poèmes, pris isolément, relatent une expérience au passé simple (« Premièrement », I ; « Seconde Nature », XII) - la composition n'en dessine pas moins une sorte de trajectoire par le jeu de rénonciation. « Premièrement ». en effet fait la part belle au « tu » à la femme aimée - Gala, dédicataire de « ce livre sans fin », tandis que la deuxième personne tend à s'effacer dans les sections « Seconde Nature » et « Comme une image » -, au profit des première et troisième personnes ; « Défense de savoir», qui restaure la prééminence de la desti-natrice et, par là, fait écho à la section inaugurale, permet de « boucler la boude » en une composition circulaire. Bfen que certains des plus beaux poèmes du recueil soient écrits à la deuxième
personne («Tu réponds tu achèves...»), celle-d paraît souvent s’effacer derrière le « je », qui insiste finalement plus sur l'état amoureux que sur l’objet du désir. « L'aube je t’aime j’ai toute la nuit dans les veines... » On notera l’absence complète de poèmes en prose dans ce recueil.
«
de la *Délie de Maurice Scève.
Le recueil
apparaît ainsi comme
un moderne can
zaniere dédié à Gala : «Tout ce que j'ai
dit, Gala, c'était pour que
tu l'entendes.
Ma bouche
n'a jamais· pu quitter tes
yeux.»
Comme dans Capitale de la douleur,
la relation amoureuse entre le poète et
la femme est donc médiatisée par les
grands thèmes de la rhétorique
pétrar
quiste, qu'Éluard connaît bien, comme
l'atteste la
Première Anthologie vivante de
la poésie du passé (1951), qui privilégie
Ronsard,
Du Bellay, Louise Labé et jean
de
Sponde (mais qui néglige un peu,
curieusement, Maurice
Scève).
Parmi
ces thèmes, le regard assassin mais
créateur, métonymique de l'union
charnelle, occupe bien sûr
une place
centrale :
«Tes yeux font l'amour en
plein jour.» On retrouve là encore le
motif de la captivité dans les rets de
l'amour,
motif sur lequel Éluard
compose de subtiles variations
musica
les, selon la plus pure technique renais
sante(«
filets à jeter au hasard,, « piè
ges entre les corps >>1 (ibid., XVII).
L'euphorie de cette
communion lumineuse (
« Nos yeux se
renvoient la lumière ») est admirable
ment exprimée par les images stellaires
qui scandent le recueil.
Dans la plus
pure tradition néoplatonicienne de
nouveau, la femme est métaphorisée
par l'étoile et assimilée au cosmos :
« Une étoile nommée azur 1 Et dont la
forme est terrestre
»1 à l'instar de Délie,
vivante incarnation de l'Idée céleste.
D'où la« mimique étoilée 1 De l'amour
et
sa splendeur nocturne » ( « Défense
de
savoir», Il) et l'omniprésence des
« astres » : « Un nouvel astre de
l'amour
se lève de partout» (ibid., 1).
De sorte que le poète risque de devenir
aveugle
à contempler un « specta
cle [ ...
] lumineux jusqu'à l'éblouisse-
ment»,
ainsi que le dit Mallarmé:
Quel beau spectacle, mais quel beau spectacle À proscrire.
Sa visibilité parfaite Me rendrait aveugle.
( « Défense de savoir», VIl)
La femme, même, «éblouit l'a
mour>> («Premièrement>>, II).
Peut
être faut-il se risquer à interpréter
l'interdiction de
« savoir » comme
l'horreur sacrée de voir la Beauté, au
risque de surévaluer la portée
méta
physique d'une poésie qu'on a peut
être trop rapportée à la « vie immé
diate>>,.
»
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