Mouches et moustiques
Publié le 09/01/2019
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Mouches et moustiques se disputent le titre peu envié de pires ennemis de l'humanité. Les moustiques empoisonnent nos soirées d'été et, sous les tropiques, transmettent des maladies mortelles ; les mouches, associées à la pourriture et à la saleté, font de même : taons, mouches à viande ou tsé-tsé, elles ont toute une série de mauvaises surprises pour nous.
Plus discrètement, l'ordre des diptères, auquel ils appartiennent, cause de graves dégâts aux cultures. Son importance économique est donc considérable et son étude un enjeu important, aussi bien pour le Tiers-Monde que pour les pays développés.
CLASSIFICATION ET DISTRIBUTION
Classification
Les diptères sont des arthropodes, c'est-à-dire des animaux dont le corps est formé de segments articulés. L’embranchement des arthropodes est le plus représenté de tout le règne animal. Il se divise en quatre classes : crustacés, myriapodes, arachnides et insectes. Et c’est à cette dernière classe qu'appartiennent les diptères. Ce sont donc des insectes et, du fait qu'ils possèdent des ailes, on les qualifie d'insectes ptérygotes.
Répartition
Plus de 140000 espèces, réparties en 189 familles, ont aujourd'hui été décrites, mais leur nombre est certainement supérieur. Elles vivent des régions chaudes à la Laponie, dans les conditions les plus variées. On distingue les diptères néma-tocères, aux antennes longues et
Anatomie du moustique
thorax
tète
antenne
trompe
1 mm
palpes maxillaires pendants, qui ressemblent à des moustiques et sont considérés comme primitifs (60 000 espèces), et les brachycères, diptères évolués à antennes courtes et palpes dressés, aux larves acéphales, qui constituent les mouches au sens large (plus de 80 000 espèces).
MORPHOLOGIE
• Contrairement à la plupart des insectes, les diptères n’ont qu'une seule paire d'ailes, (d'où leur nom,
du grec di et ptéron : deux ailes). Leur paire d'ailes postérieures s'est transformée au cours de l'évolution en balanciers, organes en forme de massue qui jouent un rôle sensoriel important dans l'équilibration du vol.
• Leurs pièces buccales sont non-masticatrices : elles forment une trompe rétractile qui leur sert pour piquer ou sucer. Les diptères se nourrissent de liquides, sang, nectar, matières excrémentielles, etc. Leurs larves, issues d'une métamorphose complète, sont toujours apodes (sans pattes) ; elles se transforment en pupes, stade larvaire des diptères au cours duquel la chrysalide prend une forme de tonnelet Ces pupes peuvent être dures, comme chez la mouche, ou mobiles comme c'est le cas chez les moustiques. Le mode de vie des larves est complètement différent de celui des adultes.
• Les yeux composés des diptères occupent une grande partie de la
tête. Ils sont constitués de plusieurs milliers de petites lentilles hexagonales, chacune ayant une orientation légèrement
différente des autres. L'insecte voit donc une mosaïque résultant de
l'ensemble des petites images fournies par chacune des lentilles. • Leurs pattes se terminent par un tarse à cinq articles, segments articulés, dont le dernier porte des griffes et des pelotes (ou pulvilles) garnies de poils adhésifs : ces pulvilles leur permettent de se poser sur les surfaces lisses. Leur taille est comprise entre 1 mm et 5 cm ; leur envergure atteint jusqu'à 6 cm (chez les tipules).
MODE DE VIE DES ADULTES
Alimentation
Beaucoup de diptères sont butineurs et totalement inoffensifs, comme les syrphes, « fausses abeilles » qui font du sur-place devant les fleurs, ou comme les moustiques mâles. Les mouches à viandes adultes (Calli-phora) se nourrissent de sucre, la mouche du vinaigre (drosophile) de fruits ou de matières fermentées. D'autres diptères sont des prédateurs des insectes : les asilidés,
«
ducteur
de la femelle dure 60 heures à
peine ! En lai� chez certains diptères
comme les Tipulidés ou les Oestridés,
la reproduction est l'unique activité
des adultes : il arrive même que leurs
pièces buccales ne leur permettent pas
de se nourrir.
Les males reconnaissent
les femelles au sifflement caracté
ristique de leurs ailes, différent selon
les espèces.
On a ainsi pu montrer
que les antennes plumeuses des
moustiques males vibraient seulement
à la fréquence des battements d'ailes
des femelles de leur espèce.
L'accouplement lui-même est déclenché
par des marqueurs chimiques appelés
phéromones.
Il est extrêmement bref.
•nnwa• Elles occupent les milieux les plus
variés.
Dans les liquides, outre les
mares et les fosses septiques, on en a
trouvées dans des sources chaudes,
dans de la résine de pin, dans des
mares de pétrole et même dans des
échantillons conservés dans le formol !
Elles respirent en surface, comme
celles des moustiques, ou utilisent
l'oxygène de l'eau grâce à des trachée
branchies.
De nombreuses larves de
diptères sont détriticoles, particu
lièrement chez les mouches : elles se
nourrissent de matières organiques en
décomposition.
La plupart sont
coprophages : elles se développent
dans les excréments frais.
D'autres
vivent dans le fromage (absorbées
accidentellement, elles peuvent
provoquer des lésions intestinales),
ou aux dépens des fruits pourris.
Les
"vers à queue de rat» de l'éristale, une
mouche butineuse, vivent dans des
liquides très pollués comme ceux des
fosses d'aisance, à la surface desquels
ils respirent grâce à un tube beaucoup
plus long que leur corps.
Les différentes
espèces de mouches � viande se
succèdent pour pondre sur les cadavres
à mesure de leur décomposition : leurs
asticots, vermiformes et presque sans
tête, ont la curieuse propriété de
produire des antibiotiques actifs contre
le staphylocoque doré.
Certains d'entre
eux ont même pu être utilisés en
thérapeutique humaine.
Il existe également des larves phyto
phages.
Beaucoup attaquent les racines
des plantes, tandis que d'autres '
forment des gales sur les feuilles ou
creusent des galeries dans leur
épaisseur (larves mineuses du
chrysanthème).
La mouche des fruits
Ceratitis capitata attaque une centaine
d'espèces d'arbres fruitiers; d'autres
espèces préfèrent les céréales.
Enfin les
mycétophiles sont bien connus des
amateurs de champignons, où elles
creusent des galeries.
Les larves de certains diptères
parasitent d'autres insectes, ou des
araignées, des escargots, des vers de
terre, etc.
Elles ont un rôle important en
agriculture et peuvent être utilisées
pour lutter contre différents ravageurs.
Sarcophaga kellyi attaque les criquets Transmission
du paludisme
migrateurs en plein vol pour pondre
sous leurs ailes ; sa larve pénètre
ensuite à l'intérieur de l'animal, qui n'y
survit pas très longtemps.
Les
tachinaires (famille des Tachinidés)
parasitent notamment les chenilles.
Tous ces asticots respirent grace à un
tube chitineux greffé sur une trachée de
leur hôte ou s'ouvrant directement sur
l'extérieur.
Les larves des syrphes
(mouches à abdomen rouge et noire),
pour leur part, se nourrissent de
pucerons.
Les larves parasites des vertébrés
peuvent causer des infections graves.
Citons les gastérophiles, qui vivent dans
l'estomac des chevaux, et deux diptères
incubateurs : la mouche Hypodermn
bovls dépose les œufs contenant ses
larves sur le pelage des bovidés, qui les
absorbent en se léchant ; l'œstre, une
grosse mouche, dépose les siennes
dans la narine du mouton, d'où elles
gagnent la cavité nasale et le sinus
frontaL provoquant le "faux-tournis ».
Quant aux espèces du genre
Dermatobia, elles ne se donnent pas
cette peine.
En effet, elles capturent un
autre diptère sur lequel elles collent
leurs paquet d'œufs: les larves
attendent qu'il se pose sur un animal à
sang chaud pour se laisser tomber sur
sa peau, où elles causent des lésions
très douloureuses.
UN VECTEUR DE MAlADIES
Pour la plupart des 3 200 espèces de
moustiques (Culicidés), la maturation
des œufs nécessite un apport protéique
de sang frais.
Chaque repas permet de
nourrir une centaine d'œufs.
Après
l'accouplement, qui a lieu en général à
la nuit tombante, la femelle se met en
chasse.
Elle repère sa victime au
dioxyde de carbone de son haleine et à
son odeur (plus ou moins appétissante
à son goût, ce qui explique pourquoi
nous ne sommes pas tous également
piqués).
En s'approchant, elle perçoit la
chaleur corporelle et vient se poser sur
la penu, dont elle « goûte » les qualités chimiques
avec des récepteurs situés au
bout de ses pattes.
Son aiguillon est
constitué de six pièces piqueuses
entourées d'un fourreau qui se replie
durant leur utilisation : certaines
servent à percer la peau (terriblement
épaisse à l'échelle du moustique),
d'autres à injecter sa salive anti
coagulante ou à pomper le sang.
Chez
l'anophèle, c'est au cours de ce repas
que la femelle transmet ou absorbe le
plasmodium responsable du paludisme.
Celui-ci migre aussitôt dans le foie, où il
se transforme avant de réapparaître
dans la circulation sanguine.
U PLASMODIUM : UN ENNEMI COMMUN
Le paludisme, qui fait des ravages
parmi les populations des régions
tropicales, peut infecter des primates,
des rongeurs, des oiseaux et même
certains lézards : au total une centaine
d'espèces.
Mais il est aussi l'ennemi du
moustique lui-même.
Non content de
vivre à ses dépens et de percer ses
tissus pour passer de son tu be d igestif à
ses glandes salivaires, le plasmodium
inhibe la sécrétion d'anticoagulant de
celles-ci.
De ce tai� la salive injectée par
l'anophèle à ses victimes est moins
efficace et le moustique ne peut
absorber à chaque repas qu'une
quantité minime d'un sang trop
visqueux : il est donc contraint de
multiplier les piqûres, ce qui favorise
la diffusion du plasmodium, mais
représente pour lui un risque multiplié :
la trompe enfoncée dans la peau de sa
victime, il est totalement vulnérable.
C'est certainement l'une des raisons
pour lesquelles le taux d'infestation
au sein des populations d'anophèles
dépasse rarement quelques pour-cent.
QUELQUES DIPTÈRES COURANTS
MOUCHERON
C'est le nom utilisé pour désigner les
diptères bracyphères et nématocères
de petite taille.
Le plus connu des
moucherons, du fait de son importance
dans la recherche scientifique en
génétique , est la drosophile qu'on
appelle aussi mouche des fruits ou
mouche du vinaigre.
MoucHE
BLEUE
C'est sous ce terme que l'on désigne
les différentes espèces brachycères
semblables aux mouches mais d'une
taille supérieure.
La
plus représentative
de cette catégorie
est Cnlllphorn
vomltnrin.
Longue
d'environ 1,5 cm, on
la reconnaît à ses
et des plus répandues.
Elle est aussi
l'un des principaux porteurs de germes.
En déposant des bactéries sur les
aliments, elle est responsable de la
transmission de nombreuses maladies
comme le typhus, la dysentrie, la
tuberculose ou encore la poliomyélite.
En outre, son cycle de reproduction
très court lui permet une multiplication
extrêmement rapide.
Si les pays
industrialisés ont pu en contrôler la
population grace à de bonnes condi
tions d'hygiène, la mouche domestique
reste un véritable ennemi dans les pays
en voie de développement.
Il s'agit d'une nécessité médicale, vété
rinaire et agricole.
La méthode la plus anciennement
utilisée est la suppression des milieux
de vie des larves : les Romains savaient
déj�.
empiriquement, que le drainage
des marais réduisait les fièvres.
C'est un
moyen simple et pourtant difficile à
mettre en œuvre : le fond d'un vieux
pneu suffit au moustique pour pondre.
La découverte des pesticides a
révolutionné la lutte contre les diptères,
particulièrement dans le domaine
r-------.
agricole; leur
emploi n'est pas
toujours sans
inconvénient.
Souvent toxiques
pour d'autres
organismes, ils
suscitent parfois
l'émergence de souches résistantes ou
de ravageurs secondaires.
Ils sont en
outre peu adaptés contre des
hématophages comme la mouche
tsé-tsé, qui parcourt jusqu'à 100 km
pour se nourrir.
Il peut être plus
efficace d'essayer de se protéger des
adultes que de les détruire.
La lutte
s'est donc recentrée sur les larves : il
s'agit de les atteindre dans leur milieu
ou de rendre celui-ci hostile.
On utilise
par exemple aujourd'hui des bactéries comme
le Bti (Boeil/us thuringiensis
israeliensis), inoffensives pour
l'homme mais mortelles pour la larve
de moustique, des huiles et des films
monomoléculaires, qui empêchent
l'adhésion des larves à la surface, ou
des pesticides spécifiques : associés, ces
moyens sont d'une grande efficacité.
L'introduction de poissons prédateurs
donne également de bons résultats : les
Cyprinidés (famille du poisson rouge)
Dans des cas ponctuels, on utilise une
technique de lutte biologique consistant
à disperser au moment de la repro
duction de grandes quantités de males
stérilisés par irradiation, qui viennent
concurrencer les males naturels.
Cette
méthode est particulièrement efficace
contre la lucilie bouchère (Coch/iomya
hominivorax), une mouche dont les
larves dévorent le bétail vivant : les
femelles de cette espèce ne s'accou
plant qu'une fois, très peu d'entre elles
parviennent à se reproduire.
Une
épizootie très grave a été enrayée de
cette manière en Libye en 1991.
Autre exemple : l'aleurode, petite
mouche blanche pond ses œufs dans
les tomates.
Après éclosion, les larves
se nourrissent de la sève du fruit et
rejettent une substance sucrée sur
laquelle se développe un champignon
noir.
Ceci a pour conséquence d'empê
cher la photosynthèse et la respiration
de la plante : des taches apparaissent
alors sur le fruit qui devient invendable.
En outre, l'aleurode s'adapte aux
pesticides.
Pour lutter contre ce fléau,
on utilise des micro-guêpes (ou
encarsia) qui vont pondre leurs œufs
à l'intérieur des larves d'aleurode.
Chaque jeune mouche sera donc
porteuse d'une « tueuse de mouche ».
LES MOUCHES DANS L'ART ET LA
LITT�RATURf
Zeus envoie un taon piquer le cheval
ailé Pégase pour châtier l'orgueil de
Bellérophon : le cheval rue, le héros
tombe et se blesse, il finira sa vie misé
rablement.
C'est la première mention
d'un diptère dans la mythologie.
Les mouches prennent leur importance
au XVII' siècle.
Détail discret, une
mouche peinte sur un fruit ou sur le
vêtement d'une belle femme n'indique
pas la saleté, mais la vanité : tout plaisir
et toute beauté portent en germe leur
pourriture.
C'est aussi dans ce sens
qu'on rencontre en 1857 la mouche
dans les Fleurs du mal de Charles
Baudelaire, évocateur fasciné des
asticots dans le poème Une Charogne,
tandis que le Temps personnifié déclare
dans L'Horloge qu'il a " pompé [sa] vie
avec [sa] trompe immonde».
Les
diptères sont encore mis à contribution
avec la pièce de Jean-Paul Sartre, Les
Mouches, où celles-ci symbolisent
l'omniprésence du remords.
Quant à la
nouvelle de Georges Langelaan, La
Mouche (1957), elle a donné lieu à ce
jour à cinq films d'épouvante..
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