Les arbres
Publié le 08/01/2019
Extrait du document
UN PATRIMOINE COLLECTIF PRECIEUX
Présents sur Terre depuis le carbonifère (entre - 360 et -290 miilions d'années), les arbres sont des organismes fascinants. Ils sont importants dans la plupart des mythologies. Ils ont permis l'essor de l'Occident, grâce à leur bois, matière première irremplaçable au moins jusqu'au xvme siècle. Aujourd'hui encore, ils gardent une place dans notre imaginaire commun.
CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES
Les arbres sont des végétaux ligneux dont les feuilles sont séparées des racines par un tronc unique. Ils ne se distinguent des arbustes que par leur taille. C'est une nuance peu significative : ainsi l'aubépine commune peut-elle être un arbuste, ou un arbre de dix mètres de haut. Les arbres se distinguent par contre nettement des arbrisseaux, ou buissons : la bruyère arborescente (Erico arborea) peut atteindre sept mètres, mais reste un arbrisseau, car elle a toujours plusieurs troncs. À noter aussi que la forme « arbre » ne recouvre aucune taxonomie : de nombreuses familles comme les euphorbiacées, les rosacées, les rubiacées, contiennent aussi bien des arbres que des plantes herbacées, par exemple. Fraisier et poirier sont de la même famille.
Cependant tous les arbres possèdent des caractères communs. Leur organisation répond au même type de contraintes : lutte contre la pesanteur, utilisation de l'énergie lumineuse, nécessité de prélever des éléments dans le sol.
STRUCTURES ET FONCTIONS
Le tronc
Il est constitué de trois couches concentriques. L'écorce, d'épaisseur et d'aspect variables, protège le liber, qui entoure le bois proprement dit.
Le bois
Le bois, ou xylème, est constitué de cellules mortes imprégnées de lignine. Il transporte l'eau et les substances dissoutes des racines jusqu'aux feuilles.
Chez les gymnospermes (conifères, ginkgoacées, taxacées, cycas), le bois est tendre. Il comporte deux types de cellules : les trachéides et les cellules de parenchyme
Les trachéides sont des fibres conductrices épaisses. Elles sont cinquante fois plus longues que larges. Elles communiquent par des zones sans lignine appelées ponctuations. Les cellules du parenchyme ressemblent à des briques disposées en rayons (rayons médullaires). Ce sont elles qui forment le « grain » du bois. Chez les angiospermes (plantes à fleurs), le bois est dur. Les cellules sont de trois types, car les fonctions de transport et de soutien y sont séparées. Au lieu de trachéides, on trouve d'une part de grandes cellules à parois minces, percées à leur extrémité, les vaisseaux, et d'autre part des cellules très pointues à cloisons épaisses, les fibres. Les cellules parenchymateuses sont équivalentes à celles trouvées chez les gymnospermes.
À mesure que l'arbre grandit, le bois perd son eau et son amidon, remplacés par des substances antiputrides comme les tanins. Deux parties se différencient : le bois de cœur sombre, ou bois parfait, et l'aubier, plus clair, où circulent encore les substances dissoutes. À l'extérieur du xylème se trouve une très mince couche de cellules vivantes, le cambium, ou assise génératrice cambiale. Elle produit vers l'extérieur, le liber, et vers l'intérieur, le xylème. Il s'agit d'une croissance indéfinie, qui augmente le diamètre du tronc Si cette croissance est entravée, par exemple par un collier de métal, l’arbre meurt. Il ne s'agit pas cependant d'une croissance continue. Sous nos latitudes, les arbres poussent au printemps, produisant une couche de bois clair avec de gros vaisseaux, puis un peu à l'automne : ils produisent alors une couche plus sombre, à vaisseaux étroits. Cette alternance forme les fameux cernes de croissance annuelle, qui
permettent de déterminer l'âge d'un arbre d'après une section de
son tronc. Sous les tropiques, la croissance est plus rapide, mieux répartie dans l'année, mais également discontinue : l’hévéa (Hevea brasiliensis) produit jusqu'à 4 ou 5 couches par an. En règle générale, plus la croissance est lente, et plus le bois est dur et compact. C'est en teck, pas en peuplier, qu’on construit le mobilier de jardin.
«
seule
nervure, les feuilles des
monocotylédones ont des ��ervures
Pflrllllil.s, tandis que celle des feuilles
de dicotylédones est souvent« en
filet».
Leur forme et revêtement sont
encore plus variés.
Elles ont néanmoins
toutes une structure commune : leur
face supérieure est protégée par
une cuticule et comporte peu d'orifices.
Exposée à la lumière, elle concentre
jusqu'à 80% de la chlorophylle totale.
La face inférieure, au contraire, a un
épiderme nu ; elle est souvent velue.
Elle joue un rôle essentiel dans les
échanges gazeux, gr�ce à sa surface
percée de stomates.
Ce sont de petits
organes circulaires, formés de
deux cellules chlorophylliennes, qui
délim�ent entre elles l'ostiole, un orifice
microscopique de un à deux microns
de diamètre.
l'ostiole peut s'ouvrir ou
se fermer en fonction des conditions
ambiantes.
Il se ferme par exemple en
cas de stress hydrique et la nuit,
quand la photosynthèse s'arrête.
Quand l'ostiole est ouvert, la partie
inférieure de la feuille, formée d'un
tissu très aéré appelé parenchyme
lacuneux, se trouve en contact avec
l'atmosphère.
Elle rejette de l'oxygène
et de l'eau, tout en absorbant du gaz
carbonique.
La partie supérieure est
constituée d'un tissu plus compact.
le
parenchyme palissadique.
La mute des feuilles
Les feuilles sont relativement fragiles.
Elles doivent être régulièrement
remplacées.
Les feuilles « caduques >>
tombent au bout d'un an, par
opposition aux feuilles « persistantes >>,
qui sont plus durables.
Les aiguilles
des conifères, par exemple, vivent
entre deux et sept ans.
La chute des feuilles est habituellement
déclenchée par des processus
climatiques.
Sous nos latitudes, le
raccourcissement des jours est le plus
important.
Perçu par un pigment
spécial.
le phytochrome, il provoque
une série de modifications
physiologiques, grâce auxquelles l'arbre
«se prépare » à la mauvaise saison.
Le
recyclage de la chlorophylle, en
particulier, laisse apparaître la
xanthophylle Oaune) et le CIII'Ot�e
(l'OU�) présents dans les feuilles, qui
acquièrent alors leurs belles couleurs
d'automne.
Puis la feuille meurt et son
pétiole finit par se détacher du rameau
qui la porte.
Chez certaines espèces,
comme le charme, le chêne, le hêtre,
cette chute ne se produit qu'au
printemps, au moment où les
bourgeons axillaires entrent en activité
(feuilles marcescentes).
Chez d'autres,
comme les taxodiacées (cyprès,
séquoias, métaséquoias).
la chute des feuilles
s'accompagne de celle d'une
partie des rameaux.
Sous les tropiques,
certains arbres perdent leurs feuilles à
la saison sèche, d'autres n'en ont qu'à
ce moment-là, comme en Afrique
l'acacia Faidherbio o/bida.
Sur d'autres
encore, on trouve en même temps des
feuilles vertes, des feuilles prêtes à
tomber et des rameaux nus.
SUIFACES
Les arbres sont essentiellement des
surfaces, le tronc constitue leur seule
partie massive.
On estime la surface
aérienne d'un arbre de 40 rn à plus
de 10000 m', soit un hectare (ha) de
feuilles.
Si l'on prend en compte les
surfaces internes, celles du parenchyme
lacuneux, on atteint 30 ha.
Les surfaces
racinaires sont encore plus grandes,
gr�ce aux poils absorbants : on les
estime à 130 ha.
La surface d'échange
totale est donc d'au moins 160 ha pour
un arbre de 40 rn, taille très moyenne
en forêt tropicale.
lM! @i.]!.B!J Le port des arbres est très variable.
Il
dépend à la fois des caractéristiques de
croissance de l'espèce et des influences
de l'environnement.
FAmu•s ENDOCOtNES
Les arbres, comme les autres végétaux.
poussent au niveau de zones de
croissance appelées méristèmes.
Ces
méristèmes se trouvent à l'extrémité
des branches et des racines, dans les
bourgeons et, comme on l'a vu, dans
les profondeurs du tronc.
Lorsqu'ils
sont actifs, l'arbre édifie de
nouveaux tissus.
Le comportement
des méristèmes détermine donc la
morphologie des arbres.
Le port monocaule est le plus simple et
le plus primitif : un méristème unique,
de grande taille, édifie un tronc nu,
garni d'une couronne de feuilles au
--��--.....
sommet,
comme chez
le ,.,.y er
(Carica
popaya).
Quand le
méristème se
transforme en
inflorescence, l'arbre peut
mourir, à moins
que d'autres méristèmes ne prennent le
relais : chez le raphia, ce sont des
bourgeons situ ès près de la base, chez
les jatrophas, près du sommet.
La croissance des arbres ramifiés fait
appel à des phénomènes plus
complexes.
Elle est sous le contrôle
d'un système appelé « prédominance
apicale >> : le sommet est le point de
l'arbre qui grandit le plus vite, car la
pousse des bourgeons latéraux est
inhibée par l'activité du méristème
terminal.
Dans ce cas, la croissance
débute par une phase monocaule
transitoire : il s'agit pour le jeune arbre
d'édifier rapidement son tronc pour se
dégager de la végétation environnante.
La prédominance apicale diminuan�
des branches latérales font leur
apparition.
Contrairement à la pousse
terminale parfaitement ronde, elles
sont de section elliptique et leurs
organes se comportent différemment
selon leur position.
Chez beaucoup de sapins,
par exemple, il n'y a ni aiguilles
ni bourgeons en dessous des rameaux.
Chez le hêtre, les bourgeons placés
à la face inférieure sont favorisès et les
branches poussent « par en dessous >>.
Chez les rosacées
(pnlnkrs,
pommiers),
elles poussent au
contraire « par
au-dessus >>.
Les arbres
les plus âgés
peuvent perdre
complètement la
prédominance apicale.
Ils développent
alors une couronne large, qui leur
permet de profiter au maximum de
l'ensoleillement : c'est le cas des cèdres,
de la plupart des pins et de beaucoup
d'espèces à grandes feuilles (merisiers,
catalpas).
Cette évolution dépend des
espèces : les chênes ont rapidement
plusieurs branches principales,
alors que l'épicéa est toujours formé
d'un axe central unique et de courtes
branches latérales.
Certaines
espèces comme les érables peuvent
aussi connaître des phénomènes de
« relance >> à partir du sommet : un
faisceau de branches apparaît au
dessus d'une couronne déjà bien
épanouie.
fAmUIS EXTEINES
Ils sont évidemment très importants :
les arbres s'adaptent à leur
environnement en développant plus ou
moins leurs organes.
Ainsi, en terrain
découvert, où la lumière est abondante,
ils ont une couronne large et un tronc
court.
En futaie, au contraire, la lumière
est l'enjeu d'une lutte constante :ils ont
une petite couronne, au sommet d'un
tronc mince et pratiquement nu où peu
de branches basses peuvent survivre.
Le vent joue aussi son rôle.
Là où il
est fort.
les arbres prennent un aspect
« soufflé >> : les branches au vent
peuvent se casser et leurs bourgeons
se détacher.
Sur le littoral, elles peuvent
être abîmées par les embruns.
Adaptations au milieu
Chaque espèce d'arbre est adaptée à
un milieu particulier.
Le bouleau, par
exemple, est une espèce pionnière des
régions froides, car il supporte bien la
lumière, les vents froids et les terrains
légers.
Le hêtre ou le sapin, au
contraire, ne se développent qu'à
l'ombre, en atmosphère humide.
Les arbres des
savanes sont
adaptés
au climat
sec : écorce
et feuilles
épaisses,
tronc tortueux,
parfois
transformé
en organe de
rèserve comme celui des blloiHibs,
qui peut contenir jusqu'à 75% d'eau
(140 000 litres).
MH1,!1[4wJil Les arbres se reproduisent par
multiplication végétative ou sexuée,
d'une manière comparable aux autres
plantes supérieures.
Signalons toutefois
les cycas et le ginkgo, gymnospermes primitives
dont les gamètes mâles
sont munis de flagelles : ils nagent
activement pour atteindre les
gamètes femelles.
Chez la plupart des
gymnospermes, les organes sexuels
sont des cônes, chez les angiospermes
ils sont très variès.
Certains arbres
sont hermaphrodites, avec des fleurs
bisexuées, comme le tilleul, d'autres
monoïques, avec des fleurs mâles
et femelles séparées, comme les
conifères, d'autres dioïques, avec
des pieds mâles et des pieds femelles,
comme les ifs, d'autres enfin
polygames, avec des fleurs mâles,
femelles et hermaphrodites sur le
même pied comme chez les frênes.
En raison de la taille des arbres, leurs
fruits peuvent être très gros : la coco
fesse (Lodoicea
mo/divo) atteint
20 kg.
le fruit
composé du jacquier
(Artoc•rpus
lleteropbyllus)
jusqu'à 40 kg.
D'autres au
contraire sont
microscopiques,
comme les graines du bouleau, qui ne
dépassent pas 0,2 mg.
Selon leur
nature, ils sont dispersés par le vent ou
les animaux.
ADAPTATIONS CtNtJIQUES
Beaucoup d'arbres se reproduisent
tardivemen� parfois après plusieurs
dizaines d'années, ce qui pourrait
limiter leurs capacitès évolutives.
Ils compensent ce handicap en
accumulant les mutations somatiques.
Il s'agit de modifications
chromosomiques intervenant au niveau
des méristèmes et qui peuvent être
transmises à tous les organes édifiés
par ceux-ci (par exemple une mutation
donnant des feuilles panachées).
Il n'est
donc pas rare de trouver dans un
arbre plusieurs groupes de branches
possédant des génomes légèrement
différents.
Cela présente plusieurs
avantages : d'une part.
les branches les
plus adaptées aux conditions du milieu
tendent à prendre le dessus et assurent
la survie de l'arbre.
D'autre part.
chaque branche produit ses gamètes :
ceux-ci sont donc plus variés.
Enfin.
cette variabilité a un effet
« décourageant • pour des prédateurs
étroitement spécialisès, comme la
plupart des insectes.
Les arbres mettent en œuvre diverses
stratégies pour se défendre contre leurs
prédateurs et se débarrasser de leurs
concurrents.
Les figuiers étrangleurs sont bien
connus.
Comme le m• (Metrosideros
robusta) en Nouvelle-Zélande, ils
germent dans un arbre en hauteur,
lancent des racines vers le sol et
finissent par tuer leur support.
qu'ils remplacent
Sous nos latitudes, les
hêtres peuvent faire montre d'une
pareille ingratitude à l'égard des
chênes : poussés sous leur ombre,
ils les dépassent et les tuent en les
privant de lumière.
Mais l'essentiel
de la lutte est biochimique : le noyer
produit dans ses feuilles et ses rameaux
une substance, la jug lone, qui est
lessivée par les pluies et bloque la
germination des graines sur le sol
(on parle d'allélopathie).
Le hêtre
obtient un effet similaire grâce à la
décompos�ion de ses feuilles
marcescentes au printemps.
Certains
arbres profrtent de leurs champignons
symbiotes, qui « brûlent» la végétation
autour d'eux.
Ils se défendent contre leurs ravageurs
par des moyens physiques (écorces,
épines), mais surtout en accumulant
dans leurs tissus une multitude de
substances antiseptiques, antifongiques,
insecticides, irritantes ou franchement
toxiques.
Ce sont des gommes, comme
chez les rosacées, des latex, comme
chez les ficus, des essences, comme
chez les agrumes, ou des rèsines,
comme chez les pins.
Plus subtilemen�
certains conifères contiennent des
substances mimétiques d'hormones
d'Insectes, qui ont pour effet de
stériliser ceux-ci.
En Afrique du sud,
les Acacia coffra pratiquent une
défense collective contre les koudous
(Troge/ophus strepsiceros) : quand
l'un deux est brouté, ses feuilles
deviennent astringentes e� comme
beaucoup de plantes blessées, il dégage
de l'éthylène.
Prévenus par ce signal
chimique, tous les acacias situés sous le
vent deviennent eux aussi astringents.
Si la densité de koudous dépasse 0,03 à
l'hectare, ils ne peuvent plus se nourrir,
car les acacias n'ont pas le temps de
redevenir comestibles entre leurs
visites.
Dans les deux cas, l'arbre limite
efficacement la prolifération de son
prédateur.
IMPORTANCE ÉCOLOGIQUE
Les forêts reprèsentent des
écosystèmes essentiels à la diversité
terrestre.
Elles abritent la plus grande
partie des espèces vivantes.
Un simple
arbre isolé permet la vie de plusieurs
espèces de microorganismes, de
plantes et d'animaux.
La forêt a aussi
l'avantage de maintenir et d'enrichir
les sols, de régulariser les cours d'eau,
et probablement aussi le régime des
pluies.
Les coupes à blanc, encore
pratiquées de nos jours dans des pays
à haut niveau d'éducation (États-Unis,
Canada, Australie), sont donc
particulièrement désastreuses, pour ne
pas parler du sort de l'Amazonie ou de
la déforestation de l'Himalaya, qui noie
le Bangladesh.
Sur la dizaine de milliers
d'espèces d'arbres, plus de la moitié est
menacée d'extinction.
Avec elles
périront plusieurs millions d'autres
espèces, dont la plup art nous sont
inconnues..
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