le vol
Publié le 08/01/2019
Extrait du document
UN ART ENVIE PAR LA TECHNOLOGIE HUMAINE
Oiseaux, insectes ou chauves-souris volent autour de nous, et leurs performances sont si familières qu'elles semblent normales. Pourtant, le vol est un défi extraordinaire pour les animaux, chez qui le mouvement rotatif complet, comme celui d'une hélice, est impossible. L'aile, qui l’a rendu possible, est un chef-d’œuvre de haute technologie naturelle que nous sommes incapables de copier. L'originalité de l'aile des animaux repose sur le fait qu'elle combine à la fois la fonction de soutien du corps dans l'air et la fonction de propulsion. Dans tous les engins volants humains munis d'ailes, celles-ci sont fixes et ne servent qu'à supporter le poids de l’engin dans l'air. La propulsion est assurée par un système différent, hélice ou moteur à réaction le plus souvent. Depuis Léonard de Vinci, toutes les tentatives pour construire un véhicule volant battant des ailes ont
échoué. La nature elle-même a fait
de nombreux brouillons, et n'est parvenue que quatre fois à la réussite en 3 milliards d'années
d'évolution de la vie. Si insectes, oiseaux et chauves-souris sont toujours là, l'une des tentatives, celle des reptiles volants dont le
ptérodactyle est le représentant le plus connu, a échoué : cette lignée s’est en effet éteinte à l'époque des dinosaures.
COMMENT LE VOL EST-IL POSSIBLE ?
Pour qu'un animal vole, il lui faut produire des forces qui surmontent les effets de la pesanteur et qui entraînent le corps en avant. Ces forces résultent de l'interaction entre le corps de l'animal et l'air environnant. Dans le vide n'importe quel oiseau, comme n'importe quel avion, tomberait au sol comme une pierre sous l'action de la pesanteur. L'air n'exerce une force contre un corps qui s'y trouve que s'il y a un
mouvement : soit l'air se déplace par rapport au corps, soit le corps se déplace dans l'air. En l'absence de vent, aucun cerf-volant ne peut se maintenir en l'air.
La densité de l'air étant très faible, pour que son action soit efficace, il faut que la surface du corps volant soit très importante relativement à son poids. La première fonction de l'aile, qui prend grossièrement la forme d'une lame plate horizontale,
est d'augmenter considérablement cette surface. L'aile, exactement horizontale dans un courant d’air, sera emportée dans la direction de celui-ci si aucune force ne s'y oppose. Si le bord situé face au courant, appelé bord d'attaque, est légèrement soulevé en faisant pivoter l’aile, ou si le bord situé à l'opposé, ou bord de fuite, est abaissé, le courant aura tendance à entraîner l'aile vers le haut. Inversement, si le bord d'attaque s'abaisse, l'aile aura tendance à être entraînée vers le bas.
Ces mouvements complexes s'expliquent par l'existence de deux forces qui s'exercent sur l'aile : une force verticale ou portance, tendant à soulever l'aile, et une force horizontale ou traînée, tendant à l'entraîner dans la direction du courant. Le vol devient possible à partir du moment où ces deux forces équilibrent exactement le poids de l'oiseau ou de l’avion. Dans l'avion, l'aile produit seulement la portance. C'est l'hélice ou le moteur à réaction qui crée la force s'opposant à la traînée en tirant ou en poussant l'appareil vers l'avant. Chez les animaux volant activement, ces deux fonctions sont exercées par les ailes.
AU COMMENCEMENT FUT LE VOL PLANÉ
Il est difficile d'imaginer que la nature ait un jour inventé une aile complète et totalement opérationnelle. Le vol n'est apparu que progressivement. Les ailes ou les organes équivalents à l'aile n'ont au début servi qu'à assurer la portance du corps. Les premiers animaux volants volaient passivement, c'est-à-dire planaient comme le fait un planeur sans moteur.
Les premiers insectes ont inventé l'aile. Contrairement aux vertébrés qui ont utilisé un organe déjà existant, une patte destinée à la
«
Les
insectes les plus primitifs ont quatre
ailes, en général encombrantes car ne
pouvant se replier vers l'arrière.
Elles sont articulées et les puissants
muscles du thorax les font se mouvoir.
Les articulations, permettant des
mouvements très complexes, autorisent
un vol à la fois puissant et aisé.
Les grosses
libellules
poursuivent
en vol leurs
proies et
sont capables
d'accélérations
foudroyantes, de change
ments de cap
quasiment
instantanés et de voler tout en
maîtrisant une proie remuante.
Les espèces les plus évoluées replient
les ailes vers l'arrière et ont cherché
des solutions pour augmenter la
coordination des ailes, gage d'efficacité.
La plupart, comme les orthoptères
(criquets et sauterelles), les coléoptères
(coccinelles et h11nnetons), ou les
seule paire.
t:autre est transformée en
étui de protection chez les deux
premiers groupes, et en minuscule
massette servant à stabiliser le vol chez
les diptères.
Les hyménoptères, comme
les abeilles, ont préféré une solution
plus originale : le couplage des ailes
deux à deux par un système de
crochets.
C'est une solution en partie
adoptée par les papillons.
Malgré leur petite taille, certains
insectes ont des capacités étonnantes
de vol.
Le criquet migrateur peut
traverser l'Atlantique d'est en ouest , et
le papillon monarque d'ouest en est.
Régulièrement d'autres papillons,
comme la belle-dame (V11neSS11
c11rdui) ou des sphinx.
partent du nord
de l'Afrique pour coloniser l'Europe,
dépassant parfois le cercle polaire.
Les sphinx sont des as de la voltige.
Outre leur capacité à parcourir de
longues distances, ils sont capables de
butiner les fleurs en vol.
Le vol sur
place, et même en arrière, leur est
possible.
La décomposition du vol des insectes
est difficile, car leurs mouvements sont
très complexes.
Vu de côté, le bout de
l'aile battant de bas en haut et de haut
en bas ne décrit pas un segment de droite,
comme on pourrait s'y attendre,
mais un 8.
Et la fréquence des
battements atteint des sommets.
La plupart des insectes inférieurs, des
papillons et des coléoptères, battent
des ailes de s à so fois par seconde.
Ces battements sont commandés par
des influx nerveux venant du cerveau.
Les abeilles, avec 200 battements par
seconde, ou certains moucherons, avec
plus de 1 000, doivent utiliser des
mouvements réflexes et non plus des
mouvements volontaires pour
entretenir la cadence du vol.
Il est vrai
que dans ces groupes, les muscles ne
sont pas directement attachés aux ailes,
mais au thorax.
C'est la déformation du
thorax qui lait battre les ailes.
Les oiseaux, aux morphologies très
variées, possèdent des caractéristiques
communes permettant le vol : squelette
creux et très léger; sternum (os plat
situé en avant de la cage thoracique)
renforcé par une crête, le bréchet, qui
constitue un point d'appui solide aux
muscles des ailes ; corps couvert de
plumes, à la fois très légères et
résistantes, qui conservent la chaleur
du corps, protègent de la pluie et
d'autres agressions extérieures tout
en fournissant aux ailes une surface
portante considérable et à la queue
un gouvernail très précis pour guider
la trajectoire.
La forme et la longueur des ailes sont
également très diverses.
Il n'y a rien de
comparable entre l'aile courte et large
du macareux moine (Fratercul11
Drctic11) et celle longue et effilée de
l'albatros.
C'est pourquoi chez les
différentes espèces, les performances,
en termes de vitesse, de maniabilité, de
souplesse, en vol plané comme en vol
porté ou ramé, sont si diverses.
Mais
ces ailes partagent le même mode de
fonctionnement : elles battent de façon
synchrone, d'une manière régulière,
prenant appui sur l'air pour soulever
l'oiseau et fonctionnant comme une
rame pour le propulser en avant, d'où
le terme de vol ramé ou battu.
Au cours du vol de déplacement, chez
les moine11ux par exemple, les ailes
battent avec une amplitude
relativement faible.
Quand elles sont
au plus haut, elles ne se rejoignent
pas mais forment un V.
Puis elles
descendent à l'horizontale, avant de se
plier sous le corps.
Durant cette phase,
le corps de l'oiseau s'élève légèrement,
et il est propulsé en avant.
Puis l'oiseau
garde ses ailes plus ou moins pliées
dans son mouvement pour les
remonter, avant de les étendre à leur
extension maximale.
Dans cette phase,
elles ne servent pas à la propulsion et
l'oiseau avance sur la vitesse acquise, son
corps redescendant parfois
nettement.
C'est pourquoi le vol de
certaines espèces, notamment les petits
passereaux, peut apparaître ondulé.
Au cours du décollage, l'effort au
niveau musculaire est plus intense, les
déformations de l'aile plus importantes
et l'amplitude des mouvements plus
grande.
Les ailes peuvent remonter
presque à la verticale, et se toucher
sous le corps, ce qui est le cas chez les
pigeons.
Mais alors les battements vers
propulsent l'oiseau et lui permettent de
s'arracher du sol et de prendre une
altitude suffisante pour passer au vol de
déplacement, bien moins fatigant.
Si les
pigeons sont capables d'effectuer des
vols de plus d'un millier de kilomètres
d'une seule traite, ils refusent de
décoller plus de 7 ou 8 fois à la suite
lors d'expériences sur le vol.
lis ont
besoin d'une période de repos pour
reconstituer leurs forces.
Le groupe des oise11ux-mouches,
spécialisé dans le butinage des fleurs,
représente une exception remarquable
à ce schéma.
Leur aile est rigide,
l'articulation entre le bras et l'avant
bras n'étant plus fonctionnelle.
Par
contre, la musculature est beaucoup
plus importante et l'aile développe
autant de puissance en montant qu'en
s'abaissant.
En fait, elle fonctionne un
peu comme celle d'un insecte, d'où le
nom de vol vibré donné par les
ornithologues.
Les oiseaux-mouches, comme certains
insectes, sont en effet capables
d'accélérations foudroyantes, de
changements de direction quasiment
instantanés, de voler sur place ou à
reculons, capacités très utiles à ces
butineurs de fleurs.
Les sphinx,
papillons aux mœurs semblables, ont
un type de vol quasiment identique : la
fréquence des battements d'ailes est
chez eux de 50 à 70 par seconde, pour
22 à 80 battements par seconde chez
les oiseaux-mouches.
différent de celui des oiseaux,
l'architecture de leurs ailes n'étant
pas identique mais comparable.
La surface de l'aile, n'est pas constituée
par les plumes, matière morte et donc
insensible aux pertes de chaleur,
comme chez les oiseaux, mais au contraire
par de la peau, tissu vivant et
irrigué.
Leurs ailes sont donc plus
fragiles que celles des oiseaux, qui sont
régulièrement remises à neuf par la
mue, remplacement des vieilles plumes
par des nouvelles.
D'autre part, engendrant une grande
perte de chaleur quand le temps est
froid, elles obligent les ch11uves-souris
à hiverner dans les régions tempérées
ou froides.
En fait, elles supportent mal
la compétition avec les oiseaux.
Leur réussite certaine, puisqu'elles
représentent un quart des mammifères,
s'explique par la spécialisation dans le
vol de nuit grâce à leur système de
sonar.
Très peu d'oiseaux se sont
spécialisés dans cette niche écologique.
l 'ART DE DECOLLER
ET D'AnERRIR
• Le moment le plus délicat du vol est
certainement le décollage.
Si le vol est
aisé, une fois une certaine vitesse et
une certaine altitude acquises, il faut
arriver à s'arracher du sol dans les
meilleures conditions.
Cela demande
souvent beaucoup d'énergie, comme
nous l'avons vu avec l'exemple du
pigeon.
Les solutions utilisées sont
diverses.
La plus fréquente, employée
par la majorité des oiseaux, est un
battement d'ailes particulier, produisant
la force nécessaire au décollage et à
l'acquisition de la vitesse de croisière
en un temps relativement bref.
Les insectes au vol puissant, comme
les abeilles, les mouches, les libellules,
les papillons, sont capables de
s'arracher de leur support ou du sol
de quelques battements d'ailes.
Des techniques plus marginales sont
parfois nécessaires.
La plus simple est l'utilisation de la
pesanteur.
Beaucoup, comme la
punaise verte ou la coccinelle, se
placent sur un point haut avant d'ouvrir
les ailes et de sauter dans le vide.
Leur
corps chute légèrement avant que le
battement des ailes à plein régime
ne leur permette de prendre de
l'altitude ou de garder une trajectoire
horizontale.
criquets, sautent avec leurs puissantes
pattes arrière avant de déployer leurs ailes
et de continuer leur vol.
Certains oiseaux utilisent aussi la
pesanteur en se laissant tomber d'un
point haut.
Ce sont en général de bons
planeurs, encombrés par de longues
ailes quand ils sont à terre.
Ainsi les frégates et les albatros se
lancent du haut des falaises côtières, et
les martinets des parois rocheuses ou
des façades des b�timents.
D'autres sont obligés d'acquérir une
certaine vitesse grâce à leurs pattes, en
courant, avant de décoller : certains
vautours, les cygnes, les gros canards
sont coutumiers du lait.
La plupart des
autres espèces s'envolent sur place,
comme nous l'avons vu, mais en
s'aidant souvent au départ d'un saut
des pattes qui fléchissent puis se
détendent en même temps que les ailes
se mettent à battre.
• t:atterrissage est également un
moment qui peut s'avérer délicat.
Parmi les insectes, ceux qui ont du mal
à décoller rencontrent souvent les
mêmes problèmes quand ils se posent
grosses punaises et coléoptères en
particulier.
D'autres, comme les
papillons, les mouches ou les abeilles,
peuvent se poser dans n'importe quelle
position, même tête en bas.
Leur
contrôle du vol est si précis qu'ils ont
une vitesse quasiment nulle quand
leurs pattes touchent le support.
Les oiseaux utilisent leurs pattes
exactement comme un train
d'atterrissage.
Alors que durant le vol
elles sont généralement rabattues en
arrière du corps pour ne pas gêner la
pénétration dans l'air, l'oiseau bascule
son corps vers l'arrière et tend les
pattes vers l'avant au moment de
toucher le sol.
Puis il les laisse
progressivement fléchir pour absorber
la brusque décélération : elles
fonctionnent comme des amortisseurs.
Les oiseaux qui se perchent utilisent
aussi une autre méthode.
Ils freinent
leur vol jusqu'à faire presque du sur
place, pour se laisser descendre de
quelques coups d'ailes sur leur
perchoir.
C11n11rds, plongeons et autres nageurs
de surface utilisent la technique de
l'hydravion.
Ils se posent sur l'eau.
Le choc de la décélération est absorbé
par la poitrine qui glisse sur l'élément
liquide dans un jaillissement d'eau..
»
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