Landes et Marais
Publié le 17/09/2013
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Il y a cinq mille ans, de denses forêts couvraient la plus grande partie du nord de l'Europe : des chênes poussaient dans les plaines et des sapins sur les pentes des montagnes au climat plus rude. Au cours des millénaires précédents, les arbres avaient envahi toutes sortes de terrains. Quelle qu'ait été la nature des roches sous-jacentes, ils avaient trouvé de quoi se nourrir dans le lit de feuilles sous lesquelles elles étaient enfouies. À l'abri des arbres poussait une large gamme de plantes plus petites qui servaient de nourriture à toutes sortes d'animaux.
La forêt primitive existe encore dans le nord de l'Amérique, de la Scandinavie et de l'Asie, mais dans le nord de l'Europe, elle a été en grande partie détruite il y a des milliers d'années par les hommes vivant à la fin de l'âge de pierre et à l'âge du bronze et du fer. En effet, ils abattirent les arbres pour faire place à des pâturages destinés à leurs troupeaux et à des champs où ils firent pousser des plantes afin de se nourrir.
D'une manière générale, l'agriculture et l'élevage intensifs sont encore pratiqués dans les régions ainsi défrichées mais dans certaines
Sauvages et balayées par
les vents, les régions de landes
du nord de l'Europe semblent faire
partie d'un monde primitif qui
a miraculeusement échappé à
l'influence de l'homme. La vérité
est pourtant toute autre.

«
Landes et Marais
A
Le lichen
et la busserole
sont les plantes
les plus communes
de la lande
des plaines.
Les quatre
phases
de croissance
de la bruyère.
Stade pionnier
(3-6 ans): des touffes
poussent à partir
de racines enterrées.
Développement:
la plante s'étend.
Maturité (après
15 ans): la plante a
sa taille maximale.
Dégénération: elle
intervient 15 ans
plus tard.
Cette caractéristique n'a pas de conséquen-
ces très graves dans le cas de terrains couverts de
forêts.
En effet, les feuilles qui tombent des arbres
fournissent en pourrissant toutes sortes de sub-
stances nutritives.
Les branches forment, d'autre
part, une sorte de parapluie qui empêche l'eau
de tomber directement sur le sol et d'éliminer le
calcaire qui peut s'y trouver.
L'eau de pluie, légè-
rement acide, a en effet la propriété de dissoudre
les matières alcalines - dont le calcaire - et de les
entraîner vers des couches situées en profondeur.
L'absence de forêt accélère ce processus et, au
bout de plusieurs siècles, les couches supérieures
d'un sol exposé à l'action de pluies saisonnières
se trouvent privées des substances nutritives alca-
lines nécessaires à la croissance des plantes.
Ces
terres sont donc acides et infertiles.
Les sols
riches en substances nutritives sont habités par
une population florissante de vers qui, en y creu-
sant des galeries, mélangent les diverses couches
du sol, de sorte que certaines des matières qui
avaient été entraînées en profondeur remontent
vers la surface.
Mais un tel processus ne peut pas
avoir lieu dans les sols infertiles car ils ne contien-
nent pas assez de vers pour ce renouvellement.
Ceux-ci disparaissent même des couches supé-
rieures à mesure qu'elles s'acidifient et la situa-
tion ne cesse alors de se dégrader.
Ce phénomène n'atteint jamais des propor-
tions dramatiques dans le cas de sols imper-
méables car l'eau qui y est retenue un certaiii
temps est riche en substances nutritives.
En
revanche dans les sols sableux, rien ne permet à
l'eau de se fixer: ne pouvant y séjourner, elle
s'écoule librement en entraînant toutes les
faibles réserves minérales nécessaires à la vie.
C'est pourquoi, dans les plaines, la lande occu-
pe toujours des terrains sablonneux que la
moindre pluie lessive, emportant avec elle tout
ce qui aurait pu les rendre fertiles.
Il suffit de creuser le sol d'une lande pour se
rendre compte de ce qui se passe.
Juste sous la
surface, là où les substances nutritives ont dispa-
ru, on voit une couche sèche, grise, comme cen-
dreuse, le podzol (d'un mot russe signifiant « terre
de cendre»).
Plus bas, à un endroit que les
racines de la plupart des plantes n'atteignent pas,
se trouve une zone très colorée où les substances
nutritives se sont accumulées.
Des oxydes de fer y
forment parfois une croûte dure appelée alios qui
empêche l'écoulement de l'eau.
Plus bas encore,
le sol a une couleur normale, brune ou d'un
brun jaune.
Dans les régions très plates, cette
croûte devient parfois complètement imper-
méable et, au-dessus d'elle, le sol est détrempé et
se transforme parfois en marécage.
La végétation
de la lande des plaines
Plusieurs couches de plantes en décomposition
recouvrent toujours ce type de sols.
Comme
ceux-ci ne contiennent pas beaucoup de micro-
organismes capables de transformer les matières
végétales en humus, celles-ci ont alors tendance
à s'accumuler peu à peu en un amas appelé
tourbe.
Les champignons qui y poussent contri-
buent à sa désagrégation et libèrent ainsi de
petites quantités de substances nutritives.
Rares
sont cependant les plantes qui sont capables
d'en faire leur profit.
Parmi celles qui y réussis-
sent
éuss
is
sent se trouvent les bruyères.
Ce sont des
-
buis-
A
Le lagopède d'Écosse (Lagopus lagopus
scoticus) se nourrit surtout de bruyère.
On ne le trouve qu'en Grande-Bretagne
et en Irlande mais son proche parent,
le lagopède des saules (Lagopus lagopus),
est très répandu dans les autres régions
du nord de l'Europe.
sons nains à feuilles persistantes dont on compte
de très nombreuses espèces.
Dans les régions
sèches, c'est la callune aux fleurs pâles qui, en
l'absence de toute concurrence, envahit tout.
Le
bruyère cendrée aux fleurs violacées apparaît sur
les terrains un peu plus humides et, à mesure que
l'humidité croît, la bruyère des marais aux nom-
breuses fleurs roses prend la relève.
La callune ne peut pas prendre racine dans
les zones où la végétation est dense.
Elle attend
donc pour s'installer que des animaux ou un
incendie aient dégagé le terrain par endroits.
Le feu joue en fait un rôle important dans l'exis-
tence
'exis
tence des callunes, ainsi d'ailleurs que dans celle
des ajoncs: il détruit les vieilles plantes et ses
concurrentes potentielles et il encourage la ger-
mination des graines qui assureront la perpétua-
tion de l'espèce.
Mais en attendant la repousse,
les bruyères cendrées et les myrtilles prennent
,temporairement leur place.
Elles ont en effet des
marcottes (tiges ou branches prenant racine)
souterraines que les flammes n'atteignent pas.
Lorsqu'elles ne sont ni brûlées, ni broutées,
les callunes finissent par dégénérer.
Une plante
de vingt à trente ans se dégarnit et sa tige traîne
sur le sol.
Des ajoncs et des herbes poussent sur
le terrain qu'elle occupait et finissent par l'élimi-
ner.
Il arrive qu'une graine de bouleau y germe
aussi et, une fois que l'arbre a grandi, il offre un
abri idéal à un jeune pin qui se développe dans
son voisinage.
Au bout de nombreuses années,
un chêne remplace même parfois le pin et la
forêt reprend ses droits.
Dans la pratique, on empêche le déroule-
ment de ce processus naturel en mettant inten-
tionnellement le feu à intervalles réguliers afin de
favoriser la croissance de nouvelles pousses de
bruyère et d'herbes.
Les moutons, les vaches et
les chevaux laissés en semi-liberté les broutent,
encourageant la croissance des herbes que man-
s
396.
»
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