Renaissance, musique de la - musique.
Publié le 16/05/2013
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Cette évolution eut un effet considérable sur le nombre d'emplois offert aux musiciens de talent et sur leur statut dans le monde de l'art.
Ils furent en mesure de revendiquer un statut et d'obtenir des avantages, notamment financiers (parfois
énormes), qui leur permirent de s'élever au-dessus du statut d'artisans.
Des compositeurs comme Josquin des Prés ou, plus tard, Adrian Willaert (chef de musique de la basilique Saint-Marc, à Venise, entre 1527 et 1562) devinrent des « dieux de la
musique ».
L'étude des biographies des musiciens et des autres artistes de cette période montre d'ailleurs un accroissement frappant de leur mobilité.
Compositeurs et interprètes se servirent des courants d'échanges commerciaux et des alliances
politiques pour leurs carrières personnelles.
Luca Marenzio, madrigaliste renommé, quitta l'Italie pour la Pologne avec d'autres compositeurs, tandis qu'un certain nombre de compositeurs espagnols et portugais allaient s'installer dans le Nouveau
Monde.
7 NAISSANCE DE L'ÉDITION MUSICALE
En outre, l'invention de l'impression des partitions musicales, due à Ottaviano Petrucci vers 1500, et les améliorations techniques postérieures comme l'impression en un seul passage, mise au point à Paris par Pierre Attaingnant au milieu des années
1520, permirent de diffuser la musique.
On vit naître l'édition musicale dans les grandes imprimeries de Paris, de Venise (Antonio Gardano et Girolamo Scotto), d'Anvers (la dynastie Phalèse), puis de Londres (Thomas East).
L'imprimerie, en
permettant une transmission fiable des textes originaux à une échelle inconnue de la tradition manuscrite, bouleversa la pensée musicale de l'époque.
8 LES GENRES MUSICAUX
Son effet sur la musique est évident, qu'il s'agisse de l'apparition du langage musical international que devint alors la polyphonie imitative, dont Josquin était l'initiateur, ou de celle des genres autour desquels s'articula l'activité des musiciens de cette
époque : messes pour la liturgie, motets pour la liturgie et la prière, chansons sur des textes en langues vernaculaires (madrigaux italiens et anglais, chansons françaises, lieder ( voir Chant) germaniques et villancico espagnol), pièces pour un ou
plusieurs instruments (luth, clavecin, flûte à bec, viole), qu'il s'agisse de formes « abstraites » (le ricercar organisé en imitation ou la canzona, arrangement instrumental de chansons) ou de danses.
Il existait d'étonnantes passerelles entre ces
genres, comme en témoigne la « messe parodiée » qui utilise un matériel sacré préexistant, pour un usage profane.
Mais dans le même mouvement, chacun de ces genres, et les styles qui leur étaient associés, suivait son histoire propre et évoluait
par des voies différentes, bien que reliées entre elles, au fur et à mesure que les compositeurs exploitaient les possibilités de l'imprimerie, à la fois pour s'approprier les œuvres passées et en concevoir de nouvelles.
L'uniformisation et la codification des styles et des genres fut le prix de cette démocratisation.
Mais certains compositeurs qui n'avaient pas su commercialiser ainsi leurs œuvres, trouvèrent refuge auprès d'un mécène désireux de tirer parti d'un style
musical original destiné à un cénacle de spécialistes.
Par exemple, la musica reservata, destinée à un milieu particulier (comme le très expressif Lagrime di San Pietro, écrit pour le duc de Bavière par Roland de Lassus), ou la musica segreta, créée par
les interprètes virtuoses de la cour du duc Alphonse II d'Este à Ferrare, dépassèrent de loin les normes de la musique courante, et en furent d'autant plus appréciées.
9 PARTICULARITÉS RÉGIONALES
Des variations significatives reflètent des contextes régionaux particuliers.
Dans la seconde moitié du XVI e siècle, la polyphonie sereine et équilibrée de la Contre-Réforme qu'illustre le compositeur Romain Palestrina s'oppose à la sensualité mystique
de l'Espagnol Tomás Luis de Victoria et à la pompe cérémonielle des œuvres d'Andrea et de Giovanni Gabrieli.
Au nord des Alpes, les différences sont plus accusées encore.
En Angleterre, William Byrd était en relation avec au moins un Italien, Alfonso
Ferrabosco l'Ancien, et, en Allemagne, Heinrich Schütz fit des études à Venise avec Giovanni Gabrieli puis avec Claudio Monteverdi.
Mais leurs styles respectifs — le motet graduel de Byrd In tempore paschali, ou le madrigal de Schütz Ride la
primavera — gardent une saveur locale.
En France, la polyphonie reçut un traitement particulier avec les chansons profanes du style « parisien », gai et détaché, initié par Clément Jannequin, dont on peut citer la Bataille de Marignan, le Chant des
oiseaux ou les très évocateurs Cris de Paris, et Claudin de Sermisy (1490-1562).
En fait, l'Angleterre, quelque peu isolée (pour des raisons géographiques et religieuses) des grandes tendances du continent, connut un développement particulier tout
au long du XVI e siècle, comme le montre la musique sonore de Thomas Tallis, professeur de Byrd.
La Renaissance élisabéthaine fut un phénomène tardif, déterminé par des circonstances particulières et qui donna naissance à des genres et à des
styles typiquement anglais : l'anthem métrique (comme When David heard, de Thomas Weelkes), le madrigal anglais (comme The Silver Swan, d'Orlando Gibbons), l'air pour voix et luth (comme Come Again, Sweet Love Thou Doth Invite, de John
Dowland).
10 NAISSANCE DU MANIÉRISME
Au moment où la Renaissance anglaise atteignait son plein épanouissement, les arts prirent, en Italie, une nouvelle direction.
D'une part, les pressions révisionnistes du concile de Trente et la Contre-Réforme, par laquelle l'Église catholique cherchait
à répondre au défi protestant, firent porter aux nues l'architecture sévère des œuvres de Palestrina.
D'autre part, le désir de plus en plus vif de rendre la musique capable d'exprimer et de provoquer les passions de l'âme rendit caduc l'équilibre
classique caractéristique du style Renaissance.
Le chromatisme intensément érotique des madrigaux de la fin du XVI e siècle — comme en témoignent les œuvres de Carlo Gesualdo, telles que Dolcissima mia vita — avait indubitablement des
références humanistes, mais révéla surtout que ce style avait atteint l'extrême limite de son développement.
Que l'on considère ces tendances maniéristes (en musique comme dans d'autres arts) comme l'annonciation d'un nouveau style ou comme
un symptôme de décadence de la Renaissance, une évolution avait lieu.
L'apparition, d'abord à Florence, d'un nouveau style de chant, déclamatoire, expressif et dramatique, soutenu par une basse continue, porta un nouveau coup à la polyphonie imitative de la Renaissance.
Il fut illustré par les chansons pour soliste de
Giulio Caccini Le Nuove Musiche (1602) et par le premier opéra complet qui soit parvenu jusqu'à nous, Euridice (1600), de Jacopo Peri.
Les Florentins cherchèrent à réformer le style contrapuntique que l'on jugeait incapable par définition d'exprimer
et de provoquer des émotions, et justifièrent cette tentative en invoquant le modèle de la tragédie grecque.
Ironie du sort — typique de cette période complexe —, cette attitude essentiellement renaissante de se référer aux classiques conduisit
directement à la destruction du style Renaissance et à l'apparition des techniques dites baroques.
11 CLAUDIO MONTEVERDI
Cependant, si l'on prend en compte les styles d'improvisation et d'interprétation (chant pour voix seule, associations spécifiques de voix et d'instruments, ornementations improvisées d'une grande virtuosité, etc.), la nouvelle musique florentine et le
récitatif d'opéra furent bel et bien les héritiers du passé récent et ancien, comme le montre l'œuvre de Claudio Monteverdi, qui fut peut-être le plus grand compositeur de ce temps.
L'introït de ses Vêpres, Deus in adjutorium, composé en 1610, semble
entièrement baroque par sa splendeur sonore, par la force de ses rythmes forts et par le mélange vibrant des voix et des instruments.
Cependant, les techniques (l'organisation en cantus firmus, surtout) et les pratiques d'interprétation de la.
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