Relégués autrefois par les Occidentaux au rang de curiosités exotiques, puis de témoins ethnographiques sans valeur esthétique, les statuettes, les masques ou les manifestations picturales des sociétés traditionnelles d'Afrique noire, d'Océanie et d'Amérique du Nord sont pourtant de véritables oeuvres d'art. Dans les arts « primitifs », le sens d'un objet particulier réside dans le rapport que l'on peut établir entre son aspect formel et son contexte d'usage. En effet, toute oeuvre est dotée d'une certaine efficacité liée à la religion. Or la forme, l'esthétique sont des vecteurs essentiels de cette efficacité. Lorsque les Européens ont commencé à s'implanter en Afrique noire, dans les îles de l'océan Pacifique et en Amérique du Nord, ils ont appelé les populations autochtones « primitives » : les sociétés rencontrées ne connaissaient pas l'écriture, ne possédaient pas d'industrie, et, bien que leur organisation fût complexe, elles n'avaient pas de forme sociale dite évoluée. Les oeuvres produites par ces peuples ont donc été désignées comme « objets d'art primitif ». Néanmoins, ces arts et ces peuples n'ont rien d'arriéré ni d'attardé. Ils possèdent une histoire ; les objets renvoient à des normes esthétiques spécifiques, et, comme dans toute société, l'art est régi par un nombre variable de codes. Depuis le XIXe siècle, l'anthropologie a permis de mieux saisir le fonctionnement des sociétés et donc d'approcher indirectement le domaine des arts. À la fin du XIX e et à l'aube du XXe siècle, de nombreux artistes, parmi lesquels Gauguin et Picasso, en rupture avec la tradition occidentale classique se sont intéressés aux arts africains et océaniens, dont les formes offraient des solutions plastiques radicalement nouvelles. En revanche, victime d'un mythe du « mauvais sauvage » véhiculé par la conquête de l'Ouest, l'art des peuples d'Amérique du Nord continuait, à la même époque, à être relativement ignoré. Plus tard, les surréalistes, en répudiant arbitrairement le réalisme africain, ont encensé l'art océanien, puis découvert celui de l'Amérique du Nord. Depuis, entre la perception purement fonctionnelle des ethnologues et celle exclusivement esthétique des peintres et des collectionneurs occidentaux, la connaissance des arts primitifs a beaucoup progressé. La sculpture est le mode d'expression dominant dans les arts dits primitifs. Mais, ajoutés à celle-ci ou traités indépendamment, les arts de la peinture et de la parure y tiennent aussi une place importante. Mis à part ces points communs, ainsi qu'un rapport vivace avec la religion, les arts des peuples africains, océaniens et nord-américains sont profondément dissemblables. Leur étude doit donc être menée séparément. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats cubisme - Le cubisme synthétique ethnologie Indiens - Expressions artistiques primitif - 1.ETHNOLOGIE primitivisme sculpture - Les différents types de sculptures et de matériaux Les arts africains Situées au sud du Sahara, les populations d'Afrique noire ont créé, de tout temps, un très grand nombre d'oeuvres d'art. L'histoire africaine est marquée par l'existence d'empires ou de civilisations qui se sont succédé. Au Nigeria, la civilisation de Nok s'est développée entre 600 avant J.-C. et 250 après J.-C. ; le royaume d'Ife a atteint son apogée entre le XIe et le XVe siècle ; celui du Bénin, au sud d'Ife, est apparu au XIIe siècle. Le delta du Niger (zone où fut fondée, probablement vers l'an 800, la ville de Djenné, connue pour ses célèbres terres cuites de fouille) a été dominé respectivement par les Empires du Ghana (VIIIe XIe siècle) et du Mali (XIIIe -XVIe siècle). Plus à l'est, le royaume de Zimbabwé (IXe -fin du XVe siècle) a laissé d'importantes traces architecturales. Certains de ces États ont été reconnus par les Portugais (comme par exemple le Kongo en 1482) au XVe et au XVIe siècle. Les populations qui n'étaient pas organisées en royaume possèdent également une riche histoire. Au XVe siècle, on sait que les Dogons de l'actuel Mali ont remplacé les Tellems dans leur habitat ancien. Les Mandés, originaires de l'Empire du Mali, se sont retirés au XVIe siècle vers le sud, où ils ont constitué en partie le noyau des futurs groupes Dans et Gouros. Au XVIIe et au XVIIIe siècle, des ensembles issus de la Confédération achantie (créée dès le XIVe siècle) de l'actuel Ghana se sont dirigés vers l'ouest et sont devenus les Baoulés, Agnis ou Abrons. Depuis le XVIIe jusqu'au XIXe siècle, les groupes Fangs n'ont cessé de se déplacer dans les régions du Gabon actuel... L'histoire des dynasties ou des ensembles déterminés, de leurs relations, aide, comme dans toute forme d'art, à comprendre l'agencement complexe des styles. Elle rend possibles les datations et facilite le repérage des auteurs. Pour aborder les productions artistiques d'Afrique noire, il est permis de distinguer, d'une part, celles qui ont vu le jour dans les cours royales et qui sont principalement réalisées dans des matières telles que le bronze, le métal, l'or ou l'ivoire, et, d'autre part, celles des sociétés décentralisées, qui sont en bois. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Achantis Afrique noire - Beaux-arts Agnis Bénin (royaume de) C ongo Djenné Dogons Fangs Ghana (empire du) Ife Mali Nok (culture de) Zimbabwe Les arts des cours royales. Dans les arts de cour, les matériaux nobles sont réservés exclusivement au roi, et parfois à ses plus proches parents ou dignitaires. On peut citer l'art d'Ife avec ses têtes et ses figures royales en bronze souvent striées de haut en bas, celui du palais d'Abomey (ancien Dahomey) composé notamment des statues du dieu de la guerre (Gu) en acier martelé et de bas-reliefs en terre polychromée qui ornaient l'édifice royal, celui des Achantis dans lequel l'or jouait un rôle déterminant, et surtout l'art du Bénin. Celui-ci, en bronze et en ivoire, est typique des arts de cour africains. Les artistes étaient des professionnels qui oeuvraient pour le souverain et constituaient des castes spécifiques : deux corporations travaillaient respectivement, l'une l'ivoire, l'autre le bronze. Depuis 1400, date à laquelle un artiste d'Ife (Iguégaé) vint enseigner l'art de la fonte du bronze à la cire perdue, jusqu'à la colonisation britannique (1897), cet art se décompose en cinq périodes successives. Les têtes commémoratives de l'oba (roi) ou de reines mères vont d'un réalisme mesuré à une emphase quasi baroque en passant par un stade classique de figuration idéalisée (troisième et quatrième période : moitié du XVIe -XVIIIe siècle). Durant tout le XVIe siècle, les artistes du Bénin ont fondu dans le bronze quelque neuf cents plaques, glorifiant les obas et leur cour, qui étaient accrochées sur les piliers de soutènement du palais. Au Bénin, la succession historique des styles et des sujets renvoie à une évolution des critères esthétiques contrôlés par le roi (ajout de tel ou tel trait, création de nouvelles formes artistiques). Plus le royaume est stable et rayonnant, plus le style est sûr. Comme dans les cours européennes, les images royales étaient toujours idéales, à ceci près qu'il ne s'agissait pas de représenter un roi particulier, mais de rendre hommage, à la mort de l'un d'eux, à l'ensemble des souverains du passé en instaurant le culte d'une nouvelle tête. L'art permettait d'assurer régulièrement le lien, via la personne divine de l'oba, entre le monde invisible et le monde des hommes. Il avait aussi un rapport étroit avec l'histoire, dont il entretenait de manière permanente le souvenir. Souvent, l'art des anciennes civilisations ou des royaumes révolus n'est pas sans rapport avec celui de leurs descendants actuels. Ainsi, de l'art de Nok en terre cuite, qui présente un nombre conséquent de têtes, à celui des Yorubas en bois, en passant par l'art de cour d'Ife, certains traits ou évolutions stylistiques parcourent plus de deux mille ans d'histoire. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Achantis Bénin (royaume de) bronze Dahomey (royaume du) Ife ivoire Nok (culture de) Yorubas Les livres Achantis - masque en or, page 27, volume 1 primitifs (arts) - art de cour du Bénin (Nigeria), page 4119, volume 8 primitifs (arts) - art de cour du Bénin (Nigeria), page 4119, volume 8 Les arts des sociétés décentralisées. Face aux arts de cour, on trouve, dans les sociétés décentralisées ou non étatiques, des ensembles considérables de masques et de statues, généralement en bois. Certaines de ces sociétés ont une véritable mythologie qui « explique » la création du monde, commente l'histoire, renvoie à des dieux associés aux éléments naturels ou géniteurs d'un peuple complet. Chez les Dogons, différentes statues aux bras levés ou à genoux sont associées à des personnages mythiques. En Angola, les groupes Tchokwés ont figuré leur héros civilisateur, Tshibinda Ilunga, sous la forme de remarquables sculptures. L'art est présent dans divers événements de la vie sociale et religieuse. Des groupes d'érudits ou d'initiés sont chargés, grâce aux masques, si nécessaire, d'assurer un bon équilibre dans le village et de former les jeunes. La mort des êtres chers ou des personnes importantes fait souvent l'objet de cérémonies ou de cultes qui nécessitent la confection d'objets particuliers. Parallèlement, l'art peut revêtir un caractère plus privé sous la forme de statuettes ou d'objets détenus, sur les conseils d'un responsable religieux, par un individu. Les Dogons possèdent une statuaire anthropomorphe extrêmement riche et de très nombreux masques aux allures abstraites. Les Dans et leurs voisins Guérés ont créé de multiples masques qui vont du réalisme idéalisé à des visages plus stylisés. Les Gouros sont connus en Côte-d'Ivoire pour leur art du masque (visages féminins rehaussés de superstructures ou de cornes, figures zoomorphes), tout comme les Sénoufos dont les grands masques-heaumes aux mâchoires proéminentes appartiennent à des sociétés secrètes. Les masques des Fangs (longs visages peints en blanc) ont presque tous disparu dans les deux premières décennies du XXe siècle. Leurs statues anthropomorphes, associées à la garde des reliques des ancêtres ou des défunts, figurent parmi les chefs-d'oeuvre de l'art africain. Les Baoulés possèdent de nombreux masques, mais ils sont surtout connus pour leur statuaire, dont la forme mesurée et raffinée a très rapidement été appréciée par les collectionneurs occidentaux. Diverses régions ont produit des objets dont le caractère stylisé s'oppose a priori à ceux qui offrent une tendance naturaliste. Sous la forme de masques ou de statues, ils montrent généralement des esprits ou des génies (art mumuyé, mambila, songyé, kwélé, toma, grébo...), qui n'existent pas dans la nature et ne peuvent donc pas ressembler à quoi que ce soit de connu. Ce peut être des gardiens de reliques (Kota), dont la fonction est comparable à ceux des Fangs, des masques dont l'usage ne diffère pas obligatoirement de celui d'objets dits naturalistes, des objets magico-religieux (Vilis). Il est donc inutile de dissocier les objets stylisés de ceux qui présentent une tendance naturaliste plus ou moins nette. En effet, les uns comme les autres peuvent coexister au sein de la même société (Dogons), voire au sein des mêmes cultes (Dans et Guérés). Ils peuvent également être réalisés par un même sculpteur. On remarque aussi, chez les Mossis par exemple, qu'une forme anthropomorphe peut constituer la superstructure d'un masque stylisé. De plus, si réalisme il y a, celui-ci n'est pas le fruit d'une ressemblance mimétique à un individu particulier, mais il tient plutôt à une ressemblance générique ou idéalisée. Diverses études ont montré que les critères esthétiques constituaient une véritable grammaire qui, comme dans les oeuvres de cour, régissait les arts. Ainsi, l'équilibre d'une statue baoulée, yoruba ou fang sera apprécié et commenté par un mot particulier. Telles hypertrophies apparentes d'un cou (Mendés, Achantis), d'un crâne (Mangbétus), des yeux (Dans-Guérés, Grébos), telle forme du nez (Gouros) ou des mollets (Baoulés), correspondent, pour les sociétés considérées, à un idéal du beau renvoyant au corps humain ou à la nature de l'entité figurée, lui assurant une bonne efficacité rituelle. En effet, un objet dont la forme est satisfaisante pourra accueillir au mieux l'esprit, le génie, l'essence divine d'un roi défunt, voire l'individu ou l'entité mythique auquel il est associé, en détournant ainsi sa puissance au profit des hommes. Dans les cours royales comme dans les sociétés décentralisées, la religion, fondement de la cohésion sociale, est donc relayée par l'esthétique. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats bois - 1.BOTANIQUE Dogons Fangs masque - La tradition du masque hors d'Europe Mossis mythologie - Les mythes de la création Sénoufos Les livres primitifs (arts) - art dan (Côte-d'Ivoire), page 4118, volume 8 primitifs (arts) - art tchokwé (Angola), page 4118, volume 8 primitifs (arts) - art sapi (Sierra Leone), page 4119, volume 8 primitifs (arts) - art baoulé, page 4119, volume 8 primitifs (arts) - art songyé (Zaïre), page 4120, volume 8 primitifs (arts) - art mahongwé (Gabon), page 4120, volume 8 primitifs (arts) - art fang, région d'Oyem (Gabon), page 4120, volume 8 primitifs (arts) - art de Djenné (Mali), page 4118, volume 8 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Afrique noire Angola Côte-d'Ivoire Gabon Ghana Mali rites - Rites d'élévation et rites d'inversion Les livres bijou - pendentif africain, page 647, volume 2 Dogons - coupe rituelle d'un chef religieux dogon, page 1494, volume 3 Dogons - village dogon dans les falaises du plateau de Bandiagara, page 1494, volume 3 Afrique - sculpture baoulé, page 60, volume 1 Les arts océaniens Entre l'Asie et les Amériques, le monde océanien réunit différentes îles et archipels que les anthropologues décomposent communément en quatre ensembles : Australie, Mélanésie, Micronésie et Polynésie. Le peuplement de l'Océanie s'est effectué d'ouest en est à partir de l'Asie. Diverses vagues ont occupé d'abord l'Australie, puis la Mélanésie, où la population papoue, en Nouvelle-Guinée, est la plus ancienne. Partis de Mélanésie orientale, des mouvements migratoires, commencés au Ier millénaire avant J.-C., ont progressivement engendré le peuplement polynésien, notamment celui de la Nouvelle-Zélande qui a débuté au VIIIe siècle, puis s'est prolongé jusqu'au XVI e , et celui de l'île de Pâques. Entre-temps, des Polynésiens qui entreprenaient un mouvement inverse vers la Mélanésie se seraient installés dès le Xe siècle en Micronésie. Parallèlement, des migrations internes et des contacts entre différents groupes ont eu lieu. Ainsi, les origines historiques et culturelles sont relativement homogènes. Mais les réalités sociales sont très diverses ; elles résultent d'une adaptation des peuples aux conditions écologiques, aux variations de la pression démographique et aux événements historiques. De fait, les productions artistiques des peuples océaniens, qui n'ont pas développé à proprement parler d'art de cour, présentent à la fois nombre de traits communs tout en étant d'un point de vue stylistique très diverses. Des t apas (étoffes végétales obtenues en battant le liber de certains arbres) polynésiens (Hawaii, Samoa, Tonga, Tahiti) ou mélanésiens (Nouvelle-Guinée : région du lac Sentani) aux sculptures monumentales en pierre volcanique de l'île de Pâques, en passant par les chefs-d'oeuvre polychromes de la Nouvelle-Irlande, les figures surmodelées ou les oeuvres en tronc de fougère arborescente du Vanuatu et tant d'autres objets, l'art revêt des formes multiples. Néanmoins, la peinture et la sculpture sur bois, mêlées ou séparées, sont les formes dominantes. Pour illustrer ces deux aspects, on peut étudier, d'une part, l'art pictural des aborigènes d'Australie et, d'autre part, la sculpture d'une région artistique particulièrement riche, celle du fleuve Sépik en Nouvelle-Guinée. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Hawaii (îles) Mélanésie Micronésie Nouvelle-Guinée Nouvelle-Irlande Pâques (île de) polychromie Polynésie Polynésiens Samoa (îles) Tahiti Tonga (îles) Vanuatu Les livres primitifs (arts) - art de l'archipel Bismarck (Nouvelle-Irlande centrale), page 4122, volume 8 primitifs (arts) - art pascuan (île de Pâques), page 4122, volume 8 primitifs (arts) - art kanak, nord de la Grande-Terre (Nouvelle-Calédonie), page 4122, volume 8 primitifs (arts) - art des Papous du golfe d'Orokolo (Papouasie-Nouvelle-Guinée), page 4123, volume 8 L'art pictural des aborigènes d'Australie. Les peintures traditionnelles d'Australie peuvent être décomposées en trois catégories : pétroglyphes (motifs gravés sur des parois rocheuses), peintures rupestres et enfin peintures mobilières, sur sable ou sur écorce. Les pétroglyphes, ou gravures rupestres, sont surtout présents dans le Sud-Ouest et le Sud-Est (Tasmanie). Les techniques utilisées sont simples : pointillage (qui a probablement disparu depuis longtemps), traits gravés (stries, rainures). En détruisant la patine brun foncé de la roche, laissant ainsi apparaître par contraste les motifs, le martèlement rupestre permet de tracer des images d'animaux vus de profil (kangourou, émeu, opossum) combinées avec des signes abstraits. Le site de Mootwingee est l'un des plus notoires. Les datations des peintures rupestres, comme celles des pétroglyphes, restent aujourd'hui incertaines. Néanmoins, elles peuvent remonter au Ve ou au IVe millénaire avant J.-C. Sur des parois, des plafonds ou des abris rocheux peu profonds, les peintures rupestres sont réalisées en trois couleurs (ocre, blanc et noir) d'origine naturelle. Un style naturaliste de figures humaines (Wondjinas, du district de Kimberley) ou animales marquent le NordOuest, l'Est et le Sud, tandis qu'un style abstrait plus ancien peut être observé au Centre et à l'Ouest. On peut citer les petites figures rouges Giro-Giro (immédiatement à l'est des monts Kimberley), qui évoqueraient des scènes de la vie quotidienne du peuple d'esprits qui leur a donné leur nom. Les autres manifestations picturales sont liées aux cérémonies religieuses ; elles ont des supports variables : sable, écorce, et, dans un style inspiré de celui utilisé sur ces supports, armes et objets usuels. Chez les groupes Arandas et Warramugas du Centre-Nord, les artistes sont accompagnés de chants et refont quotidiennement sur le sol les oeuvres dont les motifs sont associés à des éléments mythiques. En terre d'Arnhem, la peinture est appliquée sur des écorces. Ces oeuvres montrent, outre des dessins géométriques, des représentations de mimi (esprits filiformes protecteurs des êtres humains que l'on retrouve également dans les peintures rupestres), des images, dites « aux rayons X », d'animaux figurés avec leurs organes. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats aborigènes grotte pariétal (art) Tasmanie Les livres primitifs (arts) - Terre d'Arnhem, Milingimbi (Australie), page 4123, volume 8 Les oeuvres du Sépik. La région du fleuve Sépik peut être décomposée en trois sous-régions (bas, moyen et haut Sépik) qui sont en rapport entre elles ainsi qu'avec les groupes environnants ; elles peuvent être découpées à leur tour en une douzaine de centres stylistiques au total. Dans ces régions, où l'on échangeait depuis les temps anciens divers biens, mais aussi des statues, des masques et des rites, les hommes ont toujours été attentifs à l'originalité et à la nouveauté des oeuvres qu'ils détenaient, leur prestige y étant directement attaché. C'est dire si l'esthétique jouait un rôle important dans la société. Les objets sculptés sont multiples. Ce sont notamment des masques, des tambours monumentaux, des tabourets, des poteaux, des personnages, des lances, des trompes, des bouchons de flûte d'initiation. En raison des nombreuses distorsions opérées à partir du corps humain ou animal par les artistes, les oeuvres du Sépik revêtent pour nous un aspect fantastique et prodigieusement inventif dont l'immense variété plastique avait séduit les surréalistes (d'après eux, le centre du monde artistique était la Mélanésie). Le nez a parfois un aspect busqué et allongé au point de rejoindre le bas du corps de certaines figures (bas Sépik). La tête de divers personnages est juchée sur un corps simplifié et constitue en volume et en surface plus de la moitié du tout (fleuve Yuat, bas Sépik). Des oiseaux à long bec, parfois perchés sur la tête de figures anthropomorphes, sont souvent rehaussés de couleurs violemment contrastées. Des quelques superbes plaques peintes du Sud-Maprik (haut Sépik) ou des panneaux végétaux peints « aux rayons X » des Kambrambos (moyen Sépik), aux visages sculptés et peints des Tambanums (moyen Sépik) par exemple, en passant par les bouchons de flûte des Biwats (bas Sépik), on note que la peinture et la sculpture sur bois constituent deux pôles complémentaires entre lesquels s'inscrit une grande variété d'objets à polychromie plus ou moins affirmée. Parallèlement, l'art du modelage et du surmodelage (des structures préexistantes ou assemblées à dessein constituent un noyau sur lequel est appliquée de l'argile) occupe une place importante. En effet, de nombreux crânes surmodelés (essentiellement chez les Iatmuls du moyen Sépik) matérialisent la présence des défunts. Parfois, des crânes aux traits presque sereins s'écartent sensiblement des représentations dites fantastiques. L'art des crânes surmodelés se retrouve fréquemment en Mélanésie, à Malekula notamment, où ils sont fixés sur des mannequins formant les rambarambs associés aux rituels funéraires. L'art pictural des aborigènes d'Australie et la sculpture du Sépik peuvent constituer une bonne introduction aux autres arts océaniens, qu'ils soient plus ou moins proches ou lointains (Nouvelle-Irlande, îles Carolines, île de Pâques...). Comme en Afrique noire, l'art est étroitement lié à la religion. Depuis fort longtemps, les artistes océaniens ont su allier leur talent particulier aux principes esthétiques de leur culture afin de transmuer les forces de leurs morts ou de leurs entités spirituelles en d'authentiques oeuvres d'art. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Carolines (îles) Mélanésie Nouvelle-Guinée Papouasie-Nouvelle-Guinée polychromie Les livres primitifs (arts) - art volume 8 primitifs (arts) - art volume 8 primitifs (arts) - art page 4121, volume du bas Sépik (Papouasie-Nouvelle-Guinée), page 4121, biwat, bas Sépik (Papouasie-Nouvelle-Guinée), page 4121, iatmul, moyen Sépik (Papouasie-Nouvelle-Guinée), 8 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats masque - La tradition du masque hors d'Europe Océanie - Arts Les arts d'Amérique du Nord Du nord au sud du continent nord-américain, les peuples autochtones, dont les ancêtres seraient venus d'Asie par le détroit de Behring entre 35 000 et 20 000 ans avant J.-C., peuvent être décomposés en quatre grands ensembles : Inuits (Esquimaux), Indiens des côtes nord-ouest et ouest, Indiens des plaines et enfin Indiens de l'Est. D'un point de vue artistique, il est possible d'opposer, d'une part, un art de la sculpture sur bois (Inuits, côte nord-ouest) et, d'autre part, un art de la parure (Indiens des plaines), en effectuant une transition par d'autres formes telles que celles de l'art des Indiens du Sud-Ouest (confection de poupées ou de masques rituels en matériaux divers, peintures sur sable...). La sculpture sur bois. Situés au nord, de l'Alaska au Groenland, les Inuits ont sculpté des objets en ivoire et en bois. Ce sont parfois des masques montrant les génies tutélaires des chamans (responsables religieux qui assurent la liaison entre le monde réel et celui des esprits) ou des figures de Tupilak en bois (petit personnage grotesque, surnaturel et dangereux, tenant à la fois de l'homme et de la bête, que seul le chaman pouvait tenter de contrôler). Remarquablement étudiée par Claude Lévi-Strauss, l'une des productions artistiques les plus riches de la côte nord-ouest est celle des peuples et des groupes situés à proximité des Salishs de l'île Vancouver, qui ont réalisé, outre des objets en bois (statuettes, masques, mâts totémiques, armes sculptées), des plaques de cuivre gravées, et de nombreuses peintures (aux « rayons X ») sur des supports de bois. Dans les masques, les codes esthétiques, s'ils sont rapprochés des mythes et des moeurs de ceux qui les ont produits, révèlent un discours complexe. Ainsi, les Salishs possèdent un masque qu'ils nomment swaihwé. Les Kwakiutls détiennent un masque appelé xwéxwé, qu'ils ont emprunté aux Salishs, et un autre nommé dzonokwa. Le xwéxwé a le même agencement formel que le swaihwé, tandis que le dzonokwa est l'inverse, plastiquement, du swaihwé, donc du xwéxwé (ainsi, les yeux des uns sont exorbités, ceux de l'autre sont en creux). Or le swaihwé et le dzonokwa favorisent tous les deux l'acquisition des richesses, tandis que le xwéxwé est incompatible avec la fortune. Le sens de ce dernier est donc opposé au premier, bien que leur forme soit identique. Forme et signification (issues de la mythologie et de l'usage) constituent donc deux éléments complémentaires indissociables qui régissent directement l'art des masques salishs et kwakiutls. Plus au sud, les Hopis sont connus pour leurs poupées rituelles montrant des esprits associés à la pluie et à la fertilité. Ces kachinas, qui peuvent également être figurés par des masques en cuir peint rehaussés de bois, sont de petites sculptures polychromes en bois montrant généralement des personnages ou des animaux. Étroitement associées aux danses, ces statuettes sont distribuées aux enfants par les danseurs masqués. Elles ont un but pédagogique lié à l'enseignement religieux. Ainsi, grâce à elles, les enfants, qui les gardent accrochées dans les maisons, apprennent à distinguer les différents esprits. En général, la signification particulière de tel ou tel objet est donnée par les motifs peints. Les oeuvres les plus anciennes, contrairement aux plus récentes, qui sont par ailleurs fréquemment articulées, offrent peu de détails sculptés. À proximité des Hopis, il faut évoquer les peintures sur sable, liées à la maladie ou aux rêves prémonitoires, des Navajos. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Alaska Canada - Arts - Beaux-arts - Inuits et Indiens chamanisme Esquimaux Groenland Hopis Lévi-Strauss Claude masque - La tradition du masque hors d'Europe Navajos t otem Les livres Amérique - maison tribale, page 193, volume 1 primitifs (arts) - art inuit, Muruban, île Kodiak (Alaska, États-Unis), page 4124, volume 8 primitifs (arts) - art kwakiutl, Alert Bay (Colombie-Britannique, Canada), page 4124, volume 8 primitifs (arts) - art inuit (Alaska, États-Unis), page 4124, volume 8 primitifs (arts) - art hopi (Arizona, États-Unis), page 4124, volume 8 Un art de la parure. L'art des Indiens des prairies peut être dissocié en deux catégories complémentaires : d'une part, les pein- tures appliquées sur divers supports en cuir (vêtements, boucliers...) et, d'autre part, un art de la plume. Dans les deux cas, il s'agit de formes artistiques qui sont en rapport étroit avec l'individualité, le rang ou les faits et gestes de leur propriétaire, qu'il soit apache, cheyenne, comanche, pawnee, mandan ou autre. Ainsi, par exemple, il n'est pas rare de trouver des robes en peau de buffle peintes par ceux qui les possèdent. Ici, les motifs montrent les divers exploits d'un chef, ses victoires. Tout en constituant des sortes de documents officiels vérifiables par tous, l'art joue donc un rôle nettement ostentatoire. Certains motifs forment aussi d'authentiques calendriers (Dakota). Ailleurs, les Pieds-Noirs, chez qui la chasse était très organisée, ont confectionné des boucliers ceints de plumes au centre desquels est figuré un bison. Chez les Dakotas, d'autres robes en peau de buffle arborent des dessins abstraits qui restent difficiles à interpréter. On peut mentionner enfin, au nord-est, les oeuvres des Iroquois (mocassins décorés, masques aux visages déformés des sociétés secrètes dites des « fausses faces »), les récipients en écorce des Crees montrant des motifs naturalistes réalisés par grattage, au sud-est, les masques cherokees (en bois ou résultant d'un assemblage de morceaux de citrouille), ainsi que les divers tuyaux à fumer, têtes de pipes, mortiers, que l'on rencontre d'ouest en est, créations qui font écho à l'art de la peinture, d'une part, et à celui de la sculpture, d'autre part. Au premier abord, en matière d'art « primitif », on est tenté de réduire une forme artistique, un style, à une culture ou à une ethnie. Pourtant, l'exemple des masques salishs et kwakiutls montre qu'entre deux groupes le cloisonnement arbitraire des populations rend moins compte des phénomènes stylistiques que des échanges interculturels. Il en va de même en Afrique et en Océanie où les contacts, les relations directes ou indirectes, ont permis l'éclosion de formes artistiques originales. Par ailleurs, les responsables ou les notables d'une région ont parfois fait appel à des artistes issus de régions voisines, qui étaient donc capables de travailler à la fois selon les critères esthétiques de leur culture et selon ceux de leur commanditaires étrangers. En Afrique, on note, par exemple chez les Hembas du Zaïre, qu'un grand nombre de statuettes ont été réalisées par un maître luba nommé Ngongo ya Chintu. Que ce soit en Afrique, en Océanie ou en Amérique du Nord, l'artiste, loin d'être anonyme, est toujours largement connu et reconnu. Malheureusement, l'aspect individuel de la création n'a généralement pas retenu l'attention des anthropologues. De plus, depuis le début de la pénétration occidentale, des peuples entiers ont parfois disparu, laissant derrière eux de remarquables objets, seuls témoins du savoir-faire insigne de leur créateur. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Apaches buffle Cheyennes Comanches costume - Une histoire du costume européen - Le costume des autres.. Indiens - Expressions artistiques Iroquois plume Les livres primitifs (arts) - art des Indiens des prairies (États-Unis), page 4125, volume 8 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Indiens - Expressions artistiques Les livres primitifs (arts) - art tlingit ou tshimshian, région de la rivière Nass (ColombieBritannique, Canada), page 4125, volume 8 Complétez votre recherche en consultant : Les médias primitifs (arts) - l'importance des échanges primitifs (arts) - le sens de la forme Les indications bibliographiques G. Guiart, Océanie, Gallimard, l'Univers des formes, Paris, 1963. W. Haberland, Amérique du Nord, Albin Michel, Paris, 1972. J. Kerchache, L. Stephan et J.-L. Paudrat, l'Art africain, Mazenod, Paris, 1988. J. Laude, les Arts de l'Afrique Noire, Livre de poche, Paris, 1990 (1966). P. Sally, Arts primitifs, regards civilisés ENSBA, Paris, 1995.