père réel, père imaginaire, père symbolique.
Publié le 07/04/2015
Extrait du document
père réel, père imaginaire, père symbolique. Registres différents sous lesquels se présente la paternité, dans la mesure où on la rapporte à la fonction complexe qui est la sienne.
Si le complexe d'CEdipe*, posé par S. Freud comme constitutif pour le sujet humain, semble d'abord s'ordonner comme triangulation, l'enfant prenant comme objet d'amour le parent du sexe opposé et rivalisant avec le parent du même sexe, il est certain que les positions de la mère et du père ne sont pas équivalentes.
Comment concevoir en effet ce qu'il en est du père ? A la fois objet d'une identification* primaire, pris d'emblée comme idéal, il apparaît en même temps, au moins chez le garçon, comme le rival, lorsque l'enfant tente de s'approprier le premier objet
d'amour, la mère. Chez la fille, les choses se compliquent encore du fait que dans un premier temps cet objet d'amour est le même, et que, au moins pour Freud, ce n'est qu'au terme d'une histoire que le père peut être choisi comme objet. Mais surtout on ne peut manquer de s'apercevoir qu'il y a une distance importante entre la figure du père dans le mythe oedipien et la personnalité du père telle qu'elle apparaît dans la réalité familiale. Ce n'est pas dire qu'un de ces deux termes doit être disqualifié au profit de l'autre, mais cela oblige à distinguer les niveaux et les fonctions de nos références au père, d'autant que ces distinctions sont essentielles dans l'expérience de la cure.
Appelons, dans un premier temps, père réel le père concret, celui de la réalité familiale, celui qui a ses particularités, ses choix, mais aussi ses difficultés propres. Sa place effective dans la famille varie, à la fois en fonction de la civilisation, qui ne semble pas toujours lui laisser les coudées franches, mais aussi en fonction de son histoire singulière, qui ne va pas sans impasses ou inhibitions. Or c'est de ce père, pourrait-il sembler, qu'il est attendu beaucoup : qu'il fasse valoir la loi symbolique, qui est d'abord prohibition de l'inceste, qu'il ménage un accès tempéré à la jouissance sexuelle. En ce sens, «il faudrait, souligne J. Lacan
Cette discordance a des conséquences essentielles. Dès 1938, dans un article sur
Sans doute cependant n'est-il pas satisfaisant de présenter la question de la carence du père comme si elle pouvait être représentée sur une échelle de valeur unique, le père réel ayant à se mettre à la hauteur exigible du père symbolique. La fonction paternelle ne peut être exposée dans sa complexité que si l'on spécifie ce qui
Le père symbolique, c'est celui auquel renvoie la loi, l'interdit étant toujours, dans la structure, proféré au Nom-du-Père*. On peut ajouter que c'est le père mort: si Freud, dans
lui est attribué, c'est la castration, ou mieux la privation* de la mère, le fait qu'elle ne possède pas le phallus symbolique auquel l'enfant s'est d'abord identifié. Dans la logique de la théorie freudienne, c'est parce qu'il bute contre le manque de la mère que l'enfant est introduit à la question de sa propre castration.
Dans cette perspective il faut faire, avec Lacan, une place à part à la notion de père réel. La fonction du père réel n'est pas de proférer l'interdit, qui résulte finalement de la prise du langage sur le sujet humain, et qui s'organise autour du Nom-du-Père. Le père réel est celui qui permet à l'enfant d'avoir accès au désir sexuel, celui qui permet notamment au garçon d'avoir une position virile. Pour cela, il convient que le père réel puisse faire la preuve qu'il possède l'atout maître, le pénis réel: l'interdit ne peut faire passer le sujet à une position sexuée qu'à la condition que la mère, interdite pour lui, ne soit interdite que parce que le père la possède, non parce que la sexualité serait en général activité vulgaire ou inconvenante. Si le père de la réalité peut être dit carent, c'est en tant qu'il ne soutient pas la fonction du père réel pris en ce sens. On veillera cependant à ne pas prendre tous ces énoncés comme des normes proposées à l'homme contemporain: pas plus qu'elle ne prêche pour la loi (par exemple dans les institutions psychiatriques où l'on a trop confondu le règlement avec la loi symbolique), la psychanalyse ne commande au père réel un comportement déterminé par rapport à ce qui serait son rôle viril. Elle se contente de démontrer les conséquences de la structure.
Dans son séminaire sur
époux discret, est carent malgré sa présence constante et attentive auprès de Hans. Freud intervient alors comme père imaginaire, presque comme divinité, proférant l'interdit de l'inceste «du Sinaï«. Ce qui a valeur symbolique à partir de cette intervention, ce sont les «mythes«, les fantasmes que Hans va peu à peu forger et qui vont permettre à cet enfant de faire finalement l'économie de son symptôme phobique.
Liens utiles
- L'imaginaire, le symbolique et le réel
- L'art relève-t-il du réel ou de l’imaginaire
- Le monde réel et le monde imaginaire.
- Quelle personne éprouve un sentiment de danger (réel ou imaginaire) devant l'état de « non-servitude >>, devant le pouvoir spirituel de dire oui ou non ?
- Peut-on déceler entre imaginaire et réel des relations plus subtiles, peut-être même une complémentarité ?