Nietzsche par Halévy
Publié le 20/11/2011
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Le livre de poche publie la première biographie de Nietzsche parue en français. Elle date de 1909, mais a été considérablement remaniée par son auteur, Daniel Halévy, à la fin de la derniere guerre. Même si la connaissance de l'oeuvre nietzschéenne n'est plus comparable à ce qu'elle pouvait être au début ou au milieu de ce siècle, parce que les études et la documentation n'ont cessé d'apporter des éléments nouveaux sur l'homme et sur sa pensée, le travail d'Halévy constitue toujours l'essentiel. Il y a une légende de Nietzsche que sa vie dramatique, ses vagabondages intellectuels et géographiques, ses rapports amoureux avec la famille Wagner et Lou Salomé (qu'on retrouve ensuite dans l'intimité de Rainer Maria Rilke), la folie enfin du philosophe ont inspirée. Il y a une autre légende selon laquelle, à partir d'une théorie de la puissance, Nietzsche aurait inspiré le nazisme.
«
de tout sérieux.
Pour lui, la langue n'est pas la
forme de la pensée, mais son contenu.
On ne peut
pas séparer la rationalité et les instruments, comme
la parole ou l'écriture, qui servent à penser.
Qui est Dieu ?
C'est une vieille question, mais la philosophie
occidentale se la pose depuis deux siècles pour
donner la preuve qu'à l'encontre d'une idée divine
qui serait l'explication finale de tout,
il y a la raison
et que c'est par le savoir qu'il faut atteindre le réel,
non par la foi.
La transcendance n'existe pas.
Ce
sont ces problèmes constants qu'évoque Maurice
Clavel dans
Deux siècles chez Lucifer au Seuil ; à
travers son expérience de philosophe il s'interroge
sur Dieu, plus exactement l'histoire de la philoso
phie, l'interroge, car Hume, Kanr, Fichte ou
Nietzsche, Marx surtout, qui encadrent notre pen
sée et ont contribué à fonder pour beaucoup, notre
société ont constamment pose la question de Dieu
pour ouvrir la voie à l'athéisme.
Marx est
le seul à
avoir su imaginer une pensée déliée de toute trans
cendance ; les autres n'y échappaient pas.
Puisque le réel est seul atteignable pour l'esprit humain et
qu'il n'y a que la Chose en soi, au dire de Kant, qui
puisse être connue, n'est-ce pas déraisonnable pour
la raison que
de chercher à comprendre un Absolu
dont rien n'est accessible en dehors de la foi ? Fich
te oppose le savoir à la foi : « L'esprit, note-t-il, est
déjà mûr pour se consacrer sous sa propre figure et
oser rétablir son unité primitive (grecque) avec soi
même dans une nouvelle religion dans laquelle la
souffrance et toute la gravité de son déchirement
(chrétien) seront à la fois assumées et sereinement
supprimées.
».
Ainsi, l'humanité, revenant à une
pensée qui est grecque, remplace-t-elle le divin par
l'humain ; l'homme a pris la place de Dieu.
C'est
ce que Maurice Clavel reproche à notre époque : il faut dépasser la raison et le savoir et atteindre, à
travers eux une dimension spirituelle qui fait dra
matiquement défaut à notre temps.
Si l'auteur parle si bien de Nietzsche, c'est qu'il reconnaît sa propre
inspiration dans le souffie de cet homme, dans son
inquiétude, dans
ce doute et cette volonté de le dépasser.
Nietzsche n'a atteint l'absolu que dans la folie.
Atteindre Dieu, est-ce raison, est-ce dérai son? C'est peut-être la seule question.
Jacques
Pohier, dominicain, se la pose aussi (Quand je dis Dieu, éditions du Seuil).
L'auteur est
exégète, théologien, professeur, et c'est parce que
cette triple fonction
ne satisfaisait pas entièrement
son goût qu'à partir d'elle, il a voulu écrire, dans la
liberté, un ouvrage sur Dieu.
Que peut être Dieu à
la
fin du xx• siécle pour un homme qui le mesure
à travers la philosophie, la science, l'histoire et qui
a la foi ? Question étrange, mais qui est essentielle,
parce que, après tout, c'est chercher la difficulté et
tenter
de la dépasser.
Jacques Pohier s'interroge,
mais son interrogation, qui pourrait être celle de tout incroyant inquiet comme de tout croyant
incertain, est fondee sur une sensibilité religieuse
qui, pour sa part, trouve sa raison d'être dans la
raison, autrement dit dans une connaissance préci
se des textes et de leur critique, de l'archéologie et de la spiritualité.
« Quand je dis à mes amis, écrit
l'auteur dans la préface de son livre, quel en est le sujet, ceux qui sont incroyants pensent que je suis fou ; ceux qui sont croyants le pensent aussi, mais, en outre, ils ont peur ; un peu de moi, et beaucoup
pour moi...
».
Il est vrai qu'une telle entreprise
aurait eu quelque chose de hasardeux si Jacques Pohier n'avait eu, pour s'y lancer, un extraordinai
re bagage : on serait tenté de dire qu'il parle en connaissance de cause.
C'est élémentaire, dira-t-on,
mais dans son cas, le résultat vaut le pari.
Parler de Dieu en 1978, c'est chercher Dieu.
Le découvrir
aussi avec un langage de notre temps.
Une autre rencontre est proposée par Françoise
Dolto dans L'Evangile au risque de la psychanaly
se (Editions J.-P.
Delarge).
Psychanalyste, mada me Dolto pour qui la religion a une signification, a
voulu la regarder à travers son expérience person
nelle comme à travers celle de ceux qui viennent lui
parler,
ce que peuvent exprimer les évangiles quand
on les lit selon la leçon freudienne.
« Les textes,
déclare-t-elle, éclairent les lois de l'inconscient
découvertes au siècle dernier.
Ils sont la confirma
tion
de cette dynamique vivante à l'œuvre dans le psychisme humain et sa force qui vient de l'incons
cient, là où le désir prend source.
En lisant les
Evangiles, je découvre un psychodrame ».
Voici quelques notations qui intéressent : «En Joseph, rien n'est possessif de sa femme; en Marie,
rien n'est a priori possessif de son enfant ...
Ici est
décrit un mode de relation au phallus symbolique,
c'est-à-dire au manque fondamental de chaque
être.
».
Et ceci : « Tout fils voudrait que sa mère fût vierge.
C'est un fantasme qui vient de la nuit des
temps.
».
Françoise Dolto rejoint saint Paul quand
elle rappelle que le Christ a dit : « Qui me voit, voit le Père.
».
Elle ne prend pas la phrase dans son sens
premier, qui fonde, en bonne exégèse, la divinité de
Jésus ; elle le prend dans le sens freudien; le Christ
est «une greffe divine».
Les évangiles s'apparen
tent au mythe, sans donner un sens péjoratif au
mot; ils sont dans leur unité et leur diversité, l'ex
pression d'une révélation qu'en langage chrétien on
appelle
un mystère.
La rencontre de Freud, qui se flattait d'être athée, et des évangélistes, vaut d'être
notée..
»
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