n'entend pas.
Publié le 31/10/2013
Extrait du document
«
Les
rencontres auxquelles pouvaitdonnerlieucette silarge hospitalité paraissent, aprèscoup,d'uneassez
irrésistible drôlerie.«Les princes dusang etles filsderégicides sontassis surlemême canapé, unisleplus
obligeamment dumonde danslespolitesses estivales.Ainsilefils deMichel LePeletier varetrouver lefils du
suicidé LeBas etces messieurs, sousleregard attendri d'Hortense deBeauharnais, parlentdesimmortels
principes de89tandis quelagrande-duchesse deBade, untricot àla main, souritàla réunion descharmants
jeunes gensquipénètrent l'espritdufutur empereur deteintes révolutionnaires.
»
Dans ceslignes duesàFerdinand Bac—qui évoque unescène de1827 dontfutprobablement letémoin son
père Charles Henri—apparaît unenouvelle foislenom dePhilippe LeBas qui,après Hortense, est
probablement lapersonne quiaura leplus profondément marquélaformation deLouis Napoléon.
C'était
son précepteur depuis1820.L'enfant bénéficiera ainsideses services deson douzième anniversaire jusqu'à
sa vingtième année.
Choix inattendu s'ilenest, etmême stupéfiant.
Etpourtant choixexcellent, sinonfranchement génial.
Tous lesévénements auxquelsavaitétémêlé lejeune prince, etses pérégrinations, n'avaientpaseu,ons'en
doute, leseffets lesplus heureux surson éducation.
Cetteexistence longtemps chaotiquen'étaitguèrepropice
à l'étude, d'autant qu'onavaitd'abord donnéàl'enfant, enguise deprécepteur, unhomme, charmant au
demeurant, l'abbéBertrand, dontl'absence d'autodiscipline n'étaitpasdumeilleur augurenidu plus édifiant
exemple.
LeroiLouis, toutéloigné qu'ilfût,eut vent duclimat dedissipation danslequel onlaissait s'ébattre son
rejeton.
Ilmenaça delereprendre.
Ducoup, onsemit àchercher entoute hâteunremplaçant.
Legénéral
Drouot —auquel onavait d'abord songé—ayant décliné l'offre,onserabattit surLeBas.
Et avec LeBas, effectivement, leschoses allaient changer dutout autout.
Mais quelle quefûtl'ouverture d'espritd'Hortense, ilfallait quand mêmequ'ilyeût urgence poursesatisfaire
d'un éducateur dotéd'untelpedigree.
Philippe LeBas, néen1794, n'estriendemoins quelefils d'un amideRobespierre, quis'était suicidé quelques
heures aprèsle9Thermidor pourlui-même échapper àla guillotine.
Etcomme sicela nesuffisait pas,samère
n'était autrequelafille dumenuisier Duplay,luiaussi fidèle del'Incorruptible, etqui l'avait longtemps hébergé:
elle-même futenfermée, avantdevivre dans lamisère.
C'est,onpeut ledire, d'unménage dechoc qu'est issu
le nouveau précepteur.
PhilippeLeBas avait toutpour devenir unrépublicain farouche.Ill'est.
Franc-maçon,
c'est desurcroît unhomme austère, ombrageux, appliqué,jalouxdanssesconvictions.
Le Bas avingt-cinq ansen1820.
Ils'est engagé en1813, apris son congé aulendemain deWaterloo et,après
avoir enseigné àSainte-Barbe, s'estretrouvé fonctionnaire àla préfecture delaSeine.
Quelmobile abien pule
pousser àaccepter unetelle mission, luiqui nereniera jamaissesidées? Ilva secharger pourtant d'assurer la
formation d'unprince exilé,sachant bienentendu qu'onnourrit poursonélève desambitions decarrière fortpeu
compatibles avecsespropres espérances.
Sansdoute y
a-t-il làune illustration del'ambiguïté desrapports entrelaRépublique etlebonapartisme, qui,face àun
ennemi commun, éprouvent toujoursbeaucoup demal às'exclure l'unl'autre.
Lestemps étantcequ'ils étaient,
Le Bas setrouvait devantundilemme: servirunBourbon ouservir unBonaparte.
Ainsis'explique sansdoute sa
décision.
LeBas sera congédié parlareine en1827, nonpoint parce quesesidées avaient finipar déplaire,
mais toutsimplement parcequesonménage étaitdevenu encombrant, àun moment oùles va-et-vient avec
l'Italie s'étaient faitsplus nombreux.
Dans unâge oùl'esprit seforme, oùlecomportement sedessine, oùl'homme sebâtit, Louis Napoléon vaêtre
ainsi imprégné heureaprèsheure, jouraprès jour,del'idéal, delaphilosophie, desthèses républicaines:
jacobinisme, souveraineté dupeuple, liberté,égalité, générosité, telssont lesprincipes qu'onluiinculque, sans
parler d'uneteinte d'athéisme.
Ilen sera profondément etdurablement marqué.
Hortense savaitmieux quequiconque ceque LeBas introduisait dansl'esprit deson fils.Cela n'était paspour
la gêner oul'effaroucher.
Elleétait letémoin d'autant pluscomplaisant desemballements deLouis Napoléon
qu'elle yétait elle-même sujette.Encorequecene fûtpoint toujours aumême degréoudans lesmêmes
domaines.
Elleétait probablement, parexemple, moinsencline queluiàconsidérer Schillercommeunesorte
de dieu, ayant subitropd'épreuves pournepas avoir acquis unesolide dosederéalisme...
Etquand Louis
Napoléon rêvaittouthaut dedémocratie, sepromettant derestituer lepouvoir aupeuple, ellelemettait en
garde ou,plus précisément, luiprédisait qu'ilnepourrait parvenir àses fins.
En tout étatdecause, cetterencontre insenséeavecLeBas est,àn'en pasdouter, unedesclés dela
compréhension decet esprit complexe qu'estLouisNapoléon.
Plus tard, l'ancien précepteur connaîtraunecarrière exceptionnelle: professeuràl'École normale supérieure, il
finira président del'Institut.
Endépit del'amertume queluiavait causée sonrenvoi, ilest patent qu'ilcontinua de
porter àson ancien élèveunvéritable amourpaternel.
Maissonengagement l'emportasurses sentiments.
Il.
»
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