MONLUC (Blaise de)
Publié le 27/01/2019
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MONLUC (Blaise de), homme de guerre et mémorialiste français (Saint-Puy 1502 - Estillac 1577). Soldat de métier, il fut mêlé jusqu'en 1570 à la plupart des grands épisodes guerriers de l'histoire du royaume (Pavie, Cérisoles, Sienne). D'abord favorable à la Réforme, il prit parti, à partir de 1561, contre les huguenots qu'il combattit du côté des forces royales. Lieutenant général du roi en Guyenne (1565), il fut maréchal de France en 1574.
Dans leur première version, rédigée entre novembre 1570 et juin 1571 (la carrière militaire de Monluc venait de se trouver brusquement arrêtée par la grave blessure au visage qu'il avait reçue au siège de Rabastens), ses Commentaires répondent à un dessein essentiellement juridique et justificatif : accusé par ses ennemis (les « politiques », dont c'est à l'époque le triomphe) de prévarication dans son gouvernement de Guyenne, il entreprend de se défendre auprès du roi. Ce propos initial va cependant se fondre dans un projet beaucoup plus vaste et ambitieux. Les Commentaires qu'on peut lire dans l'édition posthume de 1592 apparaissent ainsi comme un manuel destiné aux « capitaines », un recueil d'exemples et de conseils tactiques. Mais, par-delà le propos technique, se profile un but politique : Monluc se présente comme le fidèle défenseur de la monarchie et de la religion contre les ennemis de celles-ci ; son histoire devient celle d'une Vie exemplaire, dans la tradition historiographique antique et moderne. Au surplus, et bien que leur auteur se soit toujours catégoriquement refusé à endosser l'étiquette d'écrivain (« Je prie ceux qui les liront de ne les prendre point comme écrits de la main d'un historien, mais d'un vieux soldat »), il est aisé de déceler dans les Commentaires un projet spécifiquement littéraire : Monluc a lu les historiens anciens et modernes (notamment Martin du Bellay) et il leur emprunte l'arsenal de la rhétorique historiographique — harangues, réflexions morales, portraits, récits de bataille « dramatisés ». Cette entrée dans le monde de la littérature a également pu, comme le suggère C. G. Dubois, constituer pour Monluc l'une des formes tardives de cette promotion sociale dont ce gentilhomme de petite naissance et dépourvu de patrimoine nourrit jusqu'à sa mort le désir effréné. Car les Commentaires se proposent également (c'est là leur ultime dessein) un but étroitement carriériste : Monluc espère, grâce à ce témoignage de loyauté, recouvrer l'ancienne faveur royale.
Le problème de l'authenticité historique des Commentaires concerne l'histoire plus que la littérature. Il est certain que tout n'est pas exact dans le portrait que Monluc dresse de lui-même : mais les distorsions (volontaires ou inconscientes) que l'autobiographie fait subir à la réalité passée — cette réalité fût-elle celle de son moi — constituent, elles aussi, la vérité de ce moi : dans l'autobiographie, le mensonge lui-même devient, à un second niveau, vérité. Comme les Confessions de Rousseau (ouvrage, lui aussi, justificatif), les Commentaires de Monluc appellent une lecture à plusieurs niveaux, tous également (quoique différemment) significatifs.
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