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LUXEMBOURG (littér.)

Publié le 23/01/2019

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LUXEMBOURG (littér.). Si le grand-duché du Luxembourg est un pays strictement unilingue du point de vue de la communication orale (entre indigènes on ne parle que le luxembourgeois), il est trilingue quant à l'expression écrite (luxembourgeois, allemand, français). La conséquence de cette situation linguistique inhabituelle est un fait non moins intéressant : l'existence de trois littératures qui toutes les trois peuvent se prévaloir d'une tradition plus que séculaire. En effet, si l'on considère le grand-duché actuel non comme unité territoriale et politique, mais comme le reste d'un ensemble politique, culturel et ethnique beaucoup plus vaste tel que l'était l'ancien duché de Luxembourg, on peut considérer Hermann von Veldenz,

 

qui a écrit, vers 1290, un poème épique de 5 963 vers en moyen haut-allemand, retraçant la vie de la princesse Yolande de Vianden, comme le fondateur à la fois et de la littérature d'expression allemande et (la langue standardisée étant inexistante) de la littérature dialectale. Pareillement, les virelais, ballades et rondeaux de Wenceslas Ier, duc de Luxembourg et de Brabant, le « gentil duc » (1353-1383), que Jean Froissait apubliés dans son Méliador peuvent être tenus pour les premières traces d'une littérature d'expression française en Luxembourg. Mais ce n'est que tardivement, dans la seconde moitié du xixe s., que les trois littératures prennent leur véritable essor.

 

Littérature d'expression française. Tous les historiens de la littérature luxembourgeoise d'expression française sont d'accord pour considérer Félix Thyes (1830-1855) comme le premier véritable auteur luxembourgeois en langue française : il fut l'ami intime de Charles De Coster, qui participa à l'édition posthume de son roman Marc Bruno, profil d'artiste (1855). Félix Thyes est en même temps le premier historien de la littérature dialectale luxembourgeoise par un essai paru en 1854 à Bruxelles dans la Revue trimestrielle. Après lui, J.-E. Buschmann (1814-1853), auteur de ballades, odes et satires, Félix Servais (1872-1916), qui ne pouvait se défaire d'un classicisme épi-gonal, Étienne Hamelius (1856-1929), auteur des Scènes de la vie des Ardennes, et Charles Kayser (1867-1887) composent le panorama de la littérature luxembourgeoise d'expression française au xixe s.

 

C'est une deuxième génération qui produira ce véritable « connétable des lettres » françaises à Luxembourg que fut Marcel Noppeney (1877-1966) : il domina pendant un demi-siècle la littérature luxembourgeoise de langue française, moins par son lyrisme qui joue tout à la fois du néoromantisme, du symbolisme et du réalisme parnassien [le Prince d'avril, 1907) que par la précision et la verve voltairienne de sa prose. Paul Palgen (1883-1966), en revanche, est un grand poète qui, de la Route royale (1917) à Guanabara (1933), s'inscrit dans la double lignée des Rimbaud et des Verhaeren. A leurs côtés, Nicolas Ries (1876-1941), fondateur de la revue bilingue les Cahiers luxembourgeois, est le romancier du Diable aux champs (1937) et de Sens unique ( 1940) : peintre de la vie quotidienne paysanne et citadine, il fait contraste avec l'idéalisme de Willy Gilson (1891-1974), porté à la méditation philosophique (Â la recherche de l'amour perdu, 1940 ; Je maintiendrai, 1947 ; Cora ou les Brigands livresques, 1952) et avec Nicolas Konert (1891-1977), conteur savoureux et sans détours. Dans le domaine de la critique avec Joseph Hansen (1874-1952), grand animateur de l'« Alliance française », qui popularisa l'œuvre des grands auteurs romantiques à Luxembourg, se distinguent Matthias Esch (1882-1928), Matthias Tresch (1876-1942) et Charles Becker (1881-1952), auteur d'essais sur Maupassant.

 

Une « nouvelle vague », dont la doyenne, Ry Boissaux (née en 1900), s'est consacrée à la littérature enfantine, apparaît avec un poète comme Edmond Dune (né en 1914) et les romanciers Joseph Leydenbach (né en 1903), conteur qui sait camper des personnages, et Albert Borschette (1920-1976), qui dresse le bilan des aventures, des rêves et des déceptions de la « génération sacrifiée » [Continuez à mourir, 1959). Cette génération, d'autre part, produit deux remarquables essayistes : Léon Thyes (1899-1979), qui, sous le pseudonyme de Jean-Marie Durand, tint une rubrique écoutée dans le quotidien Luxemburger Zeitung, et Alphonse Arend (né en 1907), qui fit connaître ses « Perspectives » dans le supplément culturel du Luxemburger Wort. Tony Bourg (né en 1912) s'est fait une réputation comme historien de la littérature française par ses études sur le cercle littéraire des Mayrisch à Colpach et le séjour de Victor Hugo à Luxembourg.

 

Parmi les talents plus récents, on retiendra Marc Elter (né en 1935) pour son théâtre, Rosemarie Kieffer (née en 1932) pour ses nouvelles, les poètes

 

Marcel Gérard (né en 1915) et Anise Koltz (née en 1928), Anne Berger, Pierre Roller, René Welter, Marion Biaise. Claude Conter (né en 1929) est le maître de l'aphorisme et du genre épistolaire, tandis que l'historien Joseph Goedert et le critique d'art Joseph-Emile Müller méritent une place dans toute histoire de la littérature luxembourgeoise d'expression française.

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