Les roches sont soumises aux influences de l'atmosphère et de l'hydrosphère, ainsi qu'aux conditions de pression et de température en profondeur. Les modifications de ces conditions physico-chimiques engendrent des transformations minérales qui sont à l'origine de la disparition ou de l'apparition de nouvelles roches. L'étude géologique des roches permet, notamment, de reconstituer, à travers l'échelle des temps, la structure de l'écorce terrestre et l'évolution de la vie. Les roches sont des matériaux naturels de l'écorce terrestre présentant une certaine homogénéité à l'échelle de l'affleurement ; elles sont le plus souvent cohérentes, mais elles peuvent aussi être meubles (sable), liquides (pétrole), voire gazeuses. Cohérentes ou meubles, elles sont constituées par un agrégat de minéraux qui peuvent être originels (roches endogènes : d'origine interne), hérités (roches exogènes : d'origine externe) ou transformés (roches métamorphiques). Les différentes familles de roches Les roches endogènes. Appelées aussi magmatiques, les roches endogènes sont originaires de l'intérieur du globe et proviennent de la solidification d'un magma. Leur vitesse de solidification détermine leur structure, ce qui conduit à les classer en deux grands groupes : les roches plutoniques et les roches volcaniques. Les roches plutoniques se sont solidifiées au sein de la lithosphère, et leur refroidissement a été lent. Constituées de minéraux généralement bien cristallisés, elles sont de structure grenue. Mais, lorsque le refroidissement a été plus rapide (faible profondeur ou filons), les minéraux formés sont de petite taille : la structure est alors microgrenue. Les roches volcaniques, extrusives, effusives ou éruptives proviennent d'une éruption qui les a conduites à l'air libre (ou sous l'eau), où elles se sont solidifiées rapidement ; on n'y observe que des cristaux minuscules, noyés dans une pâte vitreuse caractérisant la structure microlithique. Le magma originel, engendré en profondeur, provient d'une fusion partielle du manteau ou de la croûte, résultant d'une modification des conditions de pression et de température. La présence d'eau abaisse la température de fusion (dans les zones de subduction par exemple). La montée du magma entraîne une baisse de la pression et une diminution modérée de la température. Des minéraux cristallisent à partir de la phase liquide du magma. La cristallisation peut être isomorphe : les minéraux appartiennent à une même famille dans laquelle certains éléments chimiques peuvent se substituer les uns aux autres (par exemple, le calcium et le sodium dans le système des feldspaths). Les conditions de solidification varient suivant la composition du magma. Ainsi, le magma granitique atteint son point de solidification bien avant le magma basaltique. C'est pourquoi la plupart des roches plutoniques sont de type granitique (ou granitoïde), alors que les roches basaltiques forment la majorité des roches effusives. La composition du magma varie au fur et à mesure que les minéraux cristallisent en faisant diminuer dans le liquide la proportion des éléments qui entrent dans leur constitution. Les minéraux successivement formés sont donc différents : la cristallisation est fractionnée. La classification des roches endogènes est fondée essentiellement sur la composition chimique de la roche, exprimée par sa constitution minéralogique. L'élément servant de base à la classification est la silice ; on peut ainsi distinguer deux grands groupes : les roches saturées en silice, la saturation s'exprimant par la présence de quartz ; les roches sous-saturées en silice. Ces grands groupes sont divisés en familles constituées en fonction de la nature des feldspaths, qui peuvent être alcalins, riches en potassium, comme l'orthose, feldspath des granites, ou sodicalciques, riches en sodium et calcium, et qui forment la famille des plagioclases. Cette classification est très commode : il est satisfaisant de faire correspondre une roche récoltée à une case du tableau. Elle est aussi arbitraire : le passage d'une case à l'autre étant progressif, il existe des roches de composition intermédiaire. On leur attribue alors un nom composé avec ceux des cases voisines (par exemple, le trachyandésite, entre trachyte et andésite). En outre, certaines roches sont exceptionnelles et ne correspondent à aucun des termes de classification ; on leur attribue alors un nom correspondant à celui du minéral le plus abondant : par exemple, une péridotite n'est composée presque exclusivement que de péridot. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats andésites basaltes éruptive (roche) feldspath gabbro granite magma obsidienne orthose pegmatite phonolite plagioclase plutonique (roche) ponce porphyre quartz rhyolite silice syénite trachyte volcanologie - L'origine des magmas volcanologie - La différenciation des magmas Les livres roches - coulée de basalte, page 4418, volume 8 roches - microphotographie d'une lame mince de granite à mica noir, page 4419, volume 8 Les roches sédimentaires. Les roches sédimentaires sont issues de la diagenèse de sédiments, c'est-à-dire de la consolidation (ou lithification) de ceux-ci par perte d'eau et compaction. Les sédiments résultent d'actions extérieures à la lithosphère (hydrosphère, atmosphère, biosphère) ; ils sont dits exogènes et peuvent se former en plusieurs étapes : altération des roches préexistantes, érosion et transport, et enfin sédimentation. Lorsque l'altération agit seule, les débris de la roche altérée, désagrégée, constituent une altérite, ou roche résiduelle. Les produits de l'altération peuvent être transportés par le vent et constituer des dépôts éoliens (dunes), par l'eau sous forme solide (sables) ou dissoute (roches salines, calcaire, silice). Les produits dissous se transforment en sédiments, soit par évaporation de la solution de transport, soit par utilisation des produits dissous par des organismes. La vie apparaît ainsi comme productrice de roches. Ces dernières peuvent être siliceuses et produites par l'accumulation de débris siliceux provenant du « squelette » d'organismes capables de fixer la silice : frustules de diatomées (diatomite), tests de radiolaires (radiolarite), spicules de spongiaires (dans nombre de silex). Les roches calcaires biogéniques résultent de l'activité d'organismes constructeurs qui fixent le calcaire et, de ce fait, immobilisent une part importante du dioxyde de carbone atmosphérique. Les coralliaires, certaines algues (lithothamniées) construisent des récifs dont le volume peut être important. De nombreux micro-organismes édifient un test calcaire dont l'accumulation fut génératrice de roches : les globigérines (foraminifères) et les coccolithophoridés (algues) jouèrent un rôle majeur dans la formation de la craie. De même, les débris de tests de mollusques peuvent également participer à l'édification de roches ou les constituer en totalité (lumachelles). Les roches sédimentaires apportent des informations précieuses sur les conditions régnant au moment de leur formation. Elles sont le plus souvent disposées en couches, ou strates, superposées, dont l'étude est à la base de la stratigraphie. Chacune de ces roches peut être identifiée grâce à son faciès, ensemble de ses caractères lithologiques et paléontologiques. Chaque faciès est significatif du milieu de dépôt : faciès lacustre, faciès corallien, faciès néritique (de nerita, « coquille »), faciès de plage. L'extension d'un faciès permet de reconstituer la paléogéographie de la période de formation de la roche. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats bassin sédimentaire bauxite calcaire désagrégation des roches détritique (roche) diagenèse diatomées dolomie faciès falun foraminifères grès - 1.GÉOLOGIE griotte gypse houille lumachelle marne meulière molasse poudingue radiolaires sable sédiment silex silice spongiaires strate stratigraphie travertin Les livres roches - microphotographie, en lumière naturelle, de calcaire à échinodermes, page 4419, volume 8 Les roches métamorphiques. Les roches soumises à des pressions et à des températures différentes de celles de leur mise en place subissent des transformations, dont l'ensemble constitue le métamorphisme. Ces modifications peuvent avoir des causes variées engendrant différents types de roches métamorphiques. Le métamorphisme de contact, ou thermométamorphisme, est lié à l'intrusion d'un massif granitique. Les roches métamorphiques résultantes sont organisées en auréoles parallèles aux limites du massif. La nature des roches engendrées dépend étroitement de celle des roches originelles et de leur proximité de la masse granitique. Ce type de métamorphisme, sans déformation ni modification importante de la composition, est qualifié de topochimique. Les roches les plus transformées sont évidemment les plus proches du granite et correspondent à la zone des cornéennes. Les grès sont les roches les moins transformées et donnent des quartzites. Le métamorphisme général se développe lorsque des contraintes dynamiques se superposent à l'élévation de température. Les minéraux nouvellement formés s'organisent alors en feuillets ou en lits perpendiculaires à la contrainte majeure (ils peuvent être déformés ultérieurement) : schistes, micaschistes, gneiss. Ces roches apparaissent le plus souvent dans les zones de formation des chaînes de montagnes, où elles se disposent en bandes parallèles. Lorsque les conditions thermodynamiques deviennent extrêmes, les roches fusionnent et donnent un magma. La cristallisation de celui-ci aboutira à la formation d'un granite, appelé granite d'anatexie, terme ultime du métamorphisme. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats cornéenne gneiss granite granulite magma marbre - 1.GÉOLOGIE métamorphisme micaschiste schiste Les livres roches - microphotographie de lames minces de quartzite, page 4418, volume 8 roches - microphotographie de gneiss oeillé, page 4419, volume 8 roches - microphotographie de grès de Fontainebleau, page 4419, volume 8 roches - conditions de pression et de température de genèse des roches métamorphiques, page 4420, volume 8 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats brookite clastique (roche) cristal - 1.GÉOLOGIE paléogéographie structure - 1.GÉOLOGIE Les livres roches - genèse, évolution et cycle des roches, page 4419, volume 8 L'étude des roches Toutes les roches renferment une grande quantité d'informations sur les conditions physico-chimiques qui régnaient au moment de leur formation et, s'agissant des roches sédimentaires, sur l'état de leur environnement biologique. L'étude des fossiles inclus dans les roches a permis de reconstituer le lent cheminement de l'évolution de la vie qui a conduit à l'état actuel de la biosphère. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats fossile Les différents niveaux de l'observation. La recherche de ces informations nécessite une étude en plusieurs étapes correspondant à des échelles différentes de l'observation. Au niveau de l'affleurement, la roche peut être placée dans son cadre stratigraphique et tectonique, la disposition géométrique des roches renseignant sur les déformations survenues postérieurement à leur formation. Au niveau de l'échantillon, un premier examen, avec l'aide d'une loupe, permet souvent d'identifier la roche ou sa famille, et d'en déduire le faciès. À l'échelle millimétrique, au laboratoire, l'examen microscopique d'une roche nécessite un traitement approprié à la cohérence de celle-ci. Une roche cohérente est sciée, façonnée en un petit parallélépipède, collé sur une lame de verre, puis usé sur une meule garnie de poudre d'émeri jusqu'à devenir transparent (la transparence est obtenue pour une épaisseur voisine de 0,002 mm). Les roches peu cohérentes ou meubles peuvent être consolidées à l'aide de résines ou lavées de façon à ne conserver que les résidus solides. L'examen microscopique permet d'identifier les microfossiles, les minéraux constitutifs de la roche. Il faut, dans ce dernier cas, utiliser un microscope polarisant. Les roches opaques (minerais) sont étudiées par réflexion. À l'échelle du micromètre, l'observation est rendue possible par l'utilisation du microscope électronique. Il est aussi possible d'analyser des volumes très réduits de roche (de l'ordre du microncube, dont la masse est d'environ 10 -11 g) grâce au microanalyseur à sonde électronique ou à la diffraction des rayons X. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats émeri faciès géologie - Introduction géomorphologie microscope stratigraphie tectonique L'altération des roches. Les roches ne sont pas immuables. Les actions de l'air, de l'eau, de la végétation, de l'homme, font évoluer la face de la Terre en altérant, érodant et détruisant la partie superficielle de la lithosphère. Toutes les roches ne présentent pas la même vulnérabilité. Certaines paraissent ne pas changer aux yeux des hommes. Ainsi, les mégalithes (en granite ou en grès), les pyramides (en calcaire) ont conservé un aspect proche de celui qu'ils présentaient au moment de leur édification, ce qui ne permet pas pour autant de présager qu'il en sera ainsi dans 100 000 ans. La tranche de temps concernée par l'humanité ne représente en effet qu'un peu moins de 1/1 000 de la durée de l'histoire de la Terre. Certaines roches présentent en revanche une fragilité telle qu'elles disparaissent, qu'elles perdent leur identité, dès leur affleurement. Tel est le cas de l'argile, dissociée, délayée, dès la première pluie, ou des roches salines rapidement dissoutes ; les affleurements naturels de gypse sont, sous climat tempéré, extrêmement rares. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats argiles calcaire désagrégation des roches granite grès - 1.GÉOLOGIE Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Terre - L'histoire de la Terre - Introduction Les livres roches - série sédimentaire, page 4420, volume 8 Les roches et l'homme Dès les premiers âges, l'homme comprit le parti qu'il pouvait tirer de la pierre : ce fut le début de l'industrie lithique, fondée essentiellement sur l'usage du silex, dont il subsiste d'anciennes carrières dans le nord de la France et en Belgique. D'abord transformées en outils et en armes, les roches furent utilisées à d'autres fins quand l'homme prit conscience de leur variété et de la diversité de leurs propriétés. Les roches couvrent en effet un éventail très large des besoins humains : matériaux de construction (élévation, remplissage ou liant), sources de métaux (les minerais), sources d'énergie (charbon et pétrole), matériaux pour l'orfèvrerie et la décoration (pierres précieuses, pierres statuaires ou de parement). Les roches peuvent intervenir de plusieurs façons dans la construction. De façon directe, sans modification physico-chimique, les pierres de construction ne subissent qu'une mise en forme par taille ou sciage. De façon indirecte, la roche subit des transformations par broyage, cuisson, mélange, hydratation, etc., dont le résultat final en fait un liant : le plâtre, à partir du gypse ; le ciment, à partir de calcaire et d'argile ; le verre, à partir de sable siliceux ; les céramiques, à partir d'argiles. Les pierres de construction furent longtemps le produit d'une extraction locale : granite dans le Massif central et en Bretagne, calcaire grossier (pierre de taille) et meulière en Île-de-France, tuffeau en Touraine... Le développement des moyens de transport a dispersé les matériaux de construction loin de leur lieu d'extraction, avant que le béton n'uniformise malencontreusement nos paysages urbains. Certaines roches, les minerais, contiennent des minéraux utiles à l'homme ; leur extraction nécessite diverses opérations physicochimiques. Les roches combustibles ne sont pas des minerais. Ceux-ci peuvent être métallifères : oligiste, pyrite pour le fer ; galène pour le plomb ; cuprite pour le cuivre... D'autres sont non métallifères : la fluorine, pour le fluor ; la silice, pour le silicium, dont la consommation par les industries électroniques et informatiques s'est considérablement accrue. Il apparaît ainsi que les roches ont participé de façon importante à l'essor de l'humanité en lui fournissant abri, énergie et matières premières. Malheureusement, ces ressources ne sont pas renouvelables, ni inépuisables en ce qui concerne les minerais et les sources d'énergie. La maîtrise de leur exploitation deviendra ainsi un problème vital. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats architecture - Les matériaux de l'architecture argiles calcaire ciment cuprite galène granite gypse matériau matière première métaux meulière minerai pierre plâtre pyrite ressources naturelles sable silex silice tuffeau Les livres roches - carrière de gypse, en Île-de-France, page 4421, volume 8 roches - carrière de pierre de taille, au nord de Paris, page 4421, volume 8 Les roches et l'art La roche des parois des cavités souterraines constitua le premier support des manifestations artistiques humaines conservées jusqu'à nos jours. Très vite, les roches furent employées directement comme moyen d'expression artistique. L'argile, malléable, fut la première roche utilisée dans le façonnement de statuettes. Le souci de perfection, de pérennité de l'oeuvre conduisit peu à peu l'artiste à faire appel à des matériaux de plus en plus fins, de plus en plus durs, tel le marbre, qui fit la célébrité des sculpteurs grecs et romains. Même si d'autres roches furent utilisées (porphyre, onyx, albâtre), le marbre est resté la roche symbole de la pureté et de l'éternité des formes. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats albâtre argiles marbre - 1.GÉOLOGIE onyx pariétal (art) porphyre Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats géomorphologie lithosphère minéral stéatite Les livres roches et minéraux, volume 8 Les indications bibliographiques J. Aubouin, R. Brousse et J.-P. Lehman, « Pétrologie », in Précis de géologie, Dunod, Paris, 1985. A. Clark, les Minéraux, Bordas, Paris, 1984. A. Foucault et J.-F. Raoult, Dictionnaire de géologie, Masson, Paris, 1988 (1980). W. R. Hamilton et A. C. Bishop, les Minéraux, roches et fossiles du monde entier en couleurs, Elsevier Séquoia, Paris, 1974 (Bordas, 1979). F. Michel, Roches et paysages ont une histoire, BRGM, Orléans, 1986.