Le temps désigne à la fois l'éternité du passé et du futur, et l'impondérabilité de l'instant présent. C'est le témoin du vieillissement et de la mort, mais c'est aussi celui qui donne les marques de l'impérissable, de l'immuable. Cette ambivalence trouve son expression dans les deux concepts complémentaires de temps linéaire et de temps cyclique. Au premier est associée l'idée d'évolution, d'histoire ; le second porte avec lui la certitude d'un éternel retour, d'un cycle rassurant conforté par la succession régulière des jours, des lunes et des saisons. Le terme « temps » s'applique à la fois à la chronologie, qui permet de classer des événements comme étant antérieurs ou postérieurs les uns aux autres, et aux durées, mesurables par comparaison avec l'évolution de systèmes de référence. Qu'il s'agisse de longueurs, de volumes, de masses ou d'énergies, presque toutes les grandeurs physiques du monde qui nous entoure sont manipulables. Nous savons en prélever une partie, la transporter et la comparer à une autre partie. Pour le temps, il n'en est rien. Il n'est pas possible de découper une parcelle de temps pour la comparer avec une autre parcelle. Pour mesurer le temps, il faut choisir autour de nous un phénomène que nous savons manipuler et qui se reproduit identique à lui-même à notre gré. Ce n'est pas le temps lui-même que nous mesurons, c'est sa manifestation à travers un phénomène physique de notre choix, et cette mesure n'a de sens que si nous sommes persuadés que ce choix est judicieux. À côté de la difficulté inhérente à la mesure, il en est une autre qui tient à l'ambiguïté de ce qui est mesuré. La plupart des dispositifs inventés par l'homme mesurent des intervalles de temps, autrement dit des durées, qui traduisent l'irréversibilité de l'écoulement du temps, mais qui ne permettent pas de situer sans équivoque la chronologie des événements. Mesurer le temps, c'est aussi savoir repérer les événements les uns par rapport aux autres, les dater. Les divisions du temps que nous suggèrent les cycles des astres, l'alternance des saisons, des phases de la Lune, du jour et de la nuit, permettent d'établir ces chronologies en nous suggérant un temps cyclique marqué par un retour périodique de situations identiques et dont il ne reste plus qu'à faire le décompte. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats calendrier - Les principaux systèmes calendaires - Introduction chronologie La notion physique Historique de la mesure du temps À l'aube de la civilisation. Parmi tous les témoignages archéologiques de la préhistoire humaine, très peu semblent avoir un rapport avec la mesure du temps. Des os datant de l'époque paléolithique, qui portaient des incisions régulièrement espacées, ont été trouvés. On a supposé qu'il s'agissait peut-être d'une sorte de calendrier lunaire. Il paraît, en tout cas, fort probable que certains monuments mégalithiques, dont le plus célèbre est le cromlech de Stonehenge en Angleterre (entre 2500 et 1500 avant J.-C.), avaient des fonctions astronomiques et jouaient sans doute également un rôle de calendrier. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats cromlech Stonehenge Les livres temps - le grand cañon du Colorado, aux États-Unis, page 5118, volume 9 temps - temple de Sethi Ier à Abydos, en Égypte, page 5119, volume 9 Chronologies et calendriers. L'observation du ciel, de jour comme de nuit, révéla très tôt la complexité du mouvement des astres. À la rotation apparente complète du ciel autour de l'étoile Polaire, qui se fait en vingt-quatre heures moins quatre minutes, s'ajoute la lente progression du Soleil à travers le zodiaque (voir ce mot), dont il parcourt les treize constellations en une année de 365 jours 1/4. À cause de ce mouvement, le Soleil se décale un peu chaque jour par rapport aux étoiles, ce qui donne au jour solaire une durée de vingt-quatre heures. La Lune, de son côté, prend chaque jour presque une heure de retard sur la veille, ce qui fait qu'elle retrouve la même place dans le ciel et le même aspect tous les 29 jours 12 heures 44 minutes 2,9 secondes. Toutes ces données semblent avoir été mesurées avec grande précision par les astronomes babyloniens dès 1800 avant notre ère. Elles servaient à établir un calendrier fondé sur le mois lunaire, qui avait donc tantôt 29, tantôt 30 jours. La prédiction de ces durées nécessitait une connaissance remarquable des mouvements apparents du Soleil et de la Lune. Les Égyptiens, dont la vie était rythmée par les crues du Nil, avaient choisi un calendrier annuel, dont l'année valait exactement 365 jours, ce qui la décalait par rapport à l'année solaire, et donc à l'année agricole, d'un jour tous les quatre ans. Année civile et année solaire ne coïncidaient donc que tous les 1 460 ans ! Presque toutes les civilisations de la Terre ont fondé leur calendrier, soit sur le mois lunaire, soit sur l'année solaire, malgré la difficulté inhérente au fait que l'année n'est pas divisible en douze mois égaux. Chaque civilisation a donc inventé son propre système de rattrapage, plus ou moins fixe, plus ou moins arbitraire, ce qui conférait un grand pouvoir à la hiérarchie, religieuse ou politique, dont dépendait cette décision. Si l'arbitraire des réajustements a disparu aujourd'hui, la variété des calendriers et des cultures que ceux-ci reflètent existe toujours. Voir aussi le dossier calendrier. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats année bissextile (année) calendrier - La mesure de l'année calendrier - Les principaux systèmes calendaires équation du temps Lune - Les mouvements et les phases mois Terre - Données astronomiques - Les mouvements de la Terre - Le mouvement annuel zodiaque Les livres temps - tapisserie de la reine Mathilde, à Bayeux, page 5119, volume 9 temps - la réforme du calendrier julien, page 5120, volume 9 Les temps du jour et de la nuit. Les besoins de la vie quotidienne, religieuse et domestique ont tôt fait apparaître la nécessité d'un repérage, d'une chronologie à l'échelle du jour et de la nuit. Bons astronomes, les Égyptiens ont dressé le catalogue des étoiles qui, chaque jour de l'année, se lèvent juste avant le Soleil, indiquant ainsi le début de la dernière heure de la nuit. Ayant décidé, par souci de simplification, d'accorder ce rôle à la même étoile durant 10 jours consécutifs (un décan) avant de passer à une autre, ils ont établi des tables donnant pour chaque nuit de l'année l'ordre dans lequel elle se levait, du crépuscule à l'aube. Pour les 365 jours de l'année, il y avait ainsi 36 décans. Étant donné que, lors des courtes nuits d'été, on pouvait assister à douze levers de ces étoiles-décans, il fut décidé de diviser la nuit en douze « heures ». Pendant le jour, la hauteur du Soleil, et donc la longueur de l'ombre d'un objet de référence (le gnomon) sur une règle graduée, fut également utilisée par les Égyptiens pour mesurer l'écoulement du temps. Dès le milieu du deuxième millénaire avant notre ère, on trouve de telles « règles solaires » montrant une division du jour en douze heures, ce qui permet d'attribuer aux Égyptiens l'invention des vingt-quatre heures, inégales toutefois, puisque nuits et jours n'ont pas la même durée au cours de l'année. Les plus anciens cadrans solaires connus sont égyptiens, mais il est certain que des objets identiques existèrent très tôt dans d'autres civilisations, en particulier en Chine, à Babylone et sans doute aussi dans l'Amérique précolombienne. Du simple bâton planté verticalement dans le sol jusqu'aux instruments raffinés qui permettaient encore, à la fin du XIXe siècle, de régler les montres sur l'heure solaire, le cadran solaire a donné, dans toutes les civilisations et sous toutes les latitudes, l'heure la plus fiable, la plus accessible à tous, la plus indéréglable, à condition que le soleil brillât... Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats astronomie cadran solaire calendrier - La mesure de l'année crépuscule gnomon heure jour nuit semaine Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats calendrier - Introduction Les premières machines À côté des calendriers et cadrans solaires, qui donnent des chronologies, c'est-à-dire des repérages d'instants sur une échelle dont l'origine a été fixée, on trouve très tôt des instruments qui mesurent des durées, des intervalles de temps dont on peut choisir l'origine à sa guise. La plus ancienne horloge à eau connue, découverte dans le temple de Karnak en Égypte, date de 1400 avant notre ère. C'est un vase conique percé d'un trou à sa partie inférieure et portant des séries de traits horizontaux gravés à l'intérieur. Rempli d'eau, il se vidait lentement, et la hauteur de l'eau, mesurée sur les traits gravés, indiquait le temps écoulé depuis le remplissage. À partir de cette représentation de l'écoulement du temps par celui d'un liquide, les horloges à eau, ou clepsydres, se sont diversifiées à travers les civilisations et ont donné lieu à une immense variété de modèles. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats clepsydre Karnak Savoir l'heure Au milieu du Moyen Âge, l'immense majorité de la population du monde était paysanne, et l'activité agricole se contentait du temps que marquait le soleil dans le ciel. La demande d'une connaissance précise du temps vint de la religion, car les heures de prière, autant pour l'isl?m que pour la chrétienté, devaient être respectées avec exactitude. Elle émanait sans doute aussi des astronomes-astrologues, peu nombreux, mais proches du pouvoir dans tous les pays. C'est aux XIe et XIIe siècles que se développa en Europe une vie urbaine nouvelle, où prospéra l'artisanat et où naquirent l'industrie et la banque. Ces activités nécessitaient un temps nouveau, précis et consultable à tout moment, que ne fournissaient pas les anciennes machines. Les conditions étaient réunies pour que s'invente, dans l'anonymat, l'horloge mécanique à poids et à foliot, à la fin du XIIIe siècle, ce qui fut sans doute un des tournants les plus importants dans l'histoire de la science et de la technique. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats horloge Les livres temps - le Livre d'Heures de la duchesse de Bourgogne (1450), page 5119, volume 9 Une précision de plus en plus grande. L'histoire de l'horlogerie mécanique est exemplaire de l'histoire des techniques. Pendant sept siècles, elle n'a cessé de perfectionner ses produits, répondant ainsi à une demande sans cesse plus exigeante. Elle fut un constant moteur de progrès, tant par les possibilités nouvelles qu'elle offrit aux autres techniques et à la recherche scientifique que par l'ingéniosité de ceux qui contribuèrent à la faire avancer. L'évolution des horloges mécaniques, du XIII e au XX e siècle, s'est traduite par une amélioration constante de la précision, de la fiabilité, de la miniaturisation et du prix de revient. On ne peut que résumer cette évolution : les premières horloges dérivaient facilement d'une heure par jour et s'usaient en une dizaine d'années, alors qu'il avait fallu un an pour les fabriquer. Les meilleurs chronomètres de marine mécaniques construits au XIXe s iècle sont précis au dixième de seconde par jour et marchent toujours aussi bien cent ans après leur fabrication. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats chronomètre horloge horlogerie Les livres temps - horloge anglaise du XVIIe siècle, page 5118, volume 9 temps - horloge à eau tirée du Traité des arts mécaniques, d'Al Jazari (1206), page 5120, volume 9 temps - horloge astronomique (1827), page 5120, volume 9 temps - l'horloge de la cathédrale de Florence, page 5120, volume 9 temps - montre en argent (1720) et montre en or (1780), page 5120, volume 9 Un temps universel. Jusqu'au XIXe siècle, peu de gens voyageaient, et ils n'allaient jamais vite. Chaque ville ou village avait si peu de relations avec ses voisins qu'il pouvait vivre à son heure, c'est-à-dire à celle que lui donnait son cadran solaire, bien plus précis que les horloges. Tout a changé avec le chemin de fer et le télégraphe, qui ont progressivement inséré dans un même réseau toutes les villes du globe, les contraignant à s'accorder sur un système cohérent de temps. Le système des fuseaux horaires, qui ont tous des heures différentes, mais les mêmes minutes synchronisées sur un temps universel, fut proposé en 1885 et adopté par le monde entier en moins de trente ans. Cette synchronisation, assurée d'abord par le télégraphe, l'est aujourd'hui par des satellites au millionième de seconde près. Une telle précision n'est pas nécessaire dans la vie quotidienne, mais elle est indispensable pour certaines applications scientifiques et en radionavigation. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats fuseau horaire UTC (Universal Time Coordinate) Les livres temps - Penn Station, une gare de New York, dans les années quarante, page 5121, volume 9 Quartz et césium. Jusqu'au XXe siècle, le pendule pesant fut ce que l'on avait découvert de plus régulier comme oscillateur. La mise en évidence des propriétés de certains cristaux minéraux, dont les vibrations mécaniques s'accompagnent d'oscillations électriques, a suggéré de remplacer les vieux balanciers par des cristaux de quartz judicieusement taillés, ce qui fut fait en 1928. La première horloge à quartz était encombrante et médiocrement précise. Soixante ans plus tard, grâce aux progrès de l'électronique, on sait construire des montres qui, pour un prix minime, sont plus précises que ne l'étaient les meilleures horloges des observatoires. Grâce à elles, l'heure s'affiche, avec les mêmes minutes et les mêmes secondes, sur toute la surface du globe. La Terre elle-même, dont la rotation était l'étalon absolu du temps, a montré ses faiblesses lorsqu'un nouvel oscillateur bien plus précis que le quartz est devenu accessible dans les laboratoires de physique : l'atome, principalement de césium 133, dont une certaine oscillation assez facilement excitable a permis de définir un nouvel étalon de temps ; depuis 1967, la seconde est officiellement « la durée de 9 192 631 770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les deux niveaux hyperfins de l'état fondamental de l'atome de césium 133 ». Mesuré avec cette nouvelle seconde, le temps que met la Terre pour faire une révolution s'est révélé fluctuant et variable, bref inutilisable. Les meilleures horloges atomiques permettent de conserver le temps avec une précision de l'ordre de la seconde par million d'années, mais une nouvelle génération d'horloges plus précises est en train de voir le jour. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats horloge horlogerie montre oscillateur pendule quartz seconde Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats techniques (histoire des) - La Renaissance et l'âge classique Les livres horloge - horloge de la gare de Lyon, page 2407, volume 5 horloge - pendule de cheminée, page 2407, volume 5 horloge de Giovanni Dondi, page 2407, volume 5 horloge mondiale, page 2407, volume 5 montre, page 3286, volume 6 Le temps et la vie Le temps n'est pas seulement un cadre abstrait et réglementé de nos activités, contrôlé à l'échelle du monde et affiché à des milliards d'exemplaires tout autour de nous. C'est aussi celui des rythmes, des pulsations internes auxquels tous les êtres vivants sont soumis. Certains durent quelques millièmes de seconde, d'autres plusieurs années, la plupart se synchronisant sur les rythmes astraux, diurne, lunaire ou annuel. L'étude scientifique de ces temps biologiques, la chronobiologie, a révélé l'existence universelle des horloges biologiques, sans toutefois proposer pour l'instant, à quelques exceptions près, de modèle physiologique de fonctionnement. Cependant, des résultats intéressants ont été obtenus dans l'étude des variations, sur la durée des cycles biologiques, de certaines activités biochimiques, en particulier en relation avec l'administration de médicaments. Pour agir, un médicament transporté par le sang doit imprégner les cellules, les tissus. Mais le foie s'efforce de l'inactiver et les reins de l'éliminer. L'efficacité et la toxicité du traitement dépendent donc en grande partie des temps qui interviennent entre la prise et l'élimination du médicament. On a constaté que l'efficacité et/ou la toxicité des drogues variaient en fonction des organes sur lesquels elles agissent, suivant les heures d'application. Certaines substances sont très efficaces lorsqu'on les prend au réveil et presque sans effet le soir. Dans un tout autre domaine, certains insecticides tuent bien mieux à certains moments qu'à d'autres. La chronopharmacologie cherche à déterminer expérimentalement pour chaque médicament l'heure de meilleure efficacité et l'heure de moindre toxicité. D'après ces résultats, la chronothérapeutique permet d'administrer un médicament à l'heure la plus favorable, celle du maximum d'efficacité et du maximum de tolérance. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats chronobiologie nycthéméral (cycle) Les livres temps - l'horloge florale d'après Linné, page 5122, volume 9 temps - le clignotement des lucioles, page 5122, volume 9 La flèche du temps Le temps s'écoule inexorablement toujours dans le même sens, ce que traduit l'évolution irréversible de la plupart des phénomènes que nous connaissons : le glaçon fond dans le verre d'eau ; les êtres vivants, mais aussi les étoiles, naissent, puis meurent. Le phénomène inverse, qui correspondrait à un renversement de sens du temps, est impensable. Cette situation est paradoxale, car la physique classique, et surtout la dynamique newtonienne et lagrangienne, censée décrire les interactions et les mouvements des corps dans l'univers, est parfaitement réversible par rapport au temps : un film montrant le choc entre deux boules de billard peut être passé à l'endroit ou à l'envers sans qu'un spectateur puisse identifier quel est le sens dans lequel l'événement a été filmé. Cette situation existe pour toutes les collisions et interactions à l'échelle atomique responsables des phénomènes macroscopiques que nous observons. C'est à Ludwig Boltzmann que revient l'idée que l'évolution irréversible d'un système vient du fait que ce système évolue spontanément vers son état de probabilité maximal, qui se trouve être l'état de désordre maximal : l'état où le cube de glace aux molécules bien rangées et le verre d'eau aux molécules en pleine agitation cohabitent est moins désordonné du point de vue microscopique que celui où toutes les molécules sont mélangées et possèdent des énergies comparables. C'est donc vers ce second état que le système va évoluer spontanément, imposant au temps une direction bien précise. On a découvert ensuite que le raisonnement de Boltzmann contenait en fait des hypothèses cachées qui introduisaient insidieusement l'irréversibilité pour la retrouver à la fin. Il semble que de tels tours de passe-passe soient inévitables, ce qui laisse supposer que les lois de la mécanique, classique et quantique, ne se suffisent peut-être pas complètement à elles-mêmes pour décrire le monde. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Boltzmann Ludwig entropie irréversibilité mécanique - 1.PHYSIQUE sciences (histoire des) - La matière - Du calorique au kWh symétrie - 2.PHYSIQUE Temps et relativité Galilée, puis Newton avaient admis qu'il existe un temps absolu, commun à tous les systèmes de référence, quels qu'en soient les mouvements relatifs. La mécanique classique s'inscrivait parfaitement dans ce schéma, et l'exactitude obtenue dans la description des mouvements des astres en était la preuve. Le développement de la théorie électromagnétique par James Clerk Maxwell et Hendrik Antoon Lorentz ne pouvait se faire dans ce cadre qu'au prix d'hypothèses ad hoc nullement vérifiables, qui embarrassèrent les physiciens à la fin du XIXe siècle. Ce fut un des traits de génie d'Einstein de comprendre que la seule façon de réconcilier l'électromagnétisme avec la relativité galiléenne consistait à remettre en cause le principe du temps absolu (voir relativité). Chaque système de référence possède son propre temps. L'intervalle de temps séparant deux événements n'a pas la même valeur dans le système où ces événements se déroulent et dans un autre système en mouvement par rapport à lui. Toutes les notions que nous avons du temps restent parfaitement valables à l'intérieur de notre propre système, mais doivent être remises en perspective lorsqu'il s'agit d'un autre système. Cette entorse à nos intuitions est le prix qu'il faut payer pour restaurer une admirable cohérence dans notre description du monde physique. Voir aussi le dossier sciences (histoire des). Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats contraction Einstein Albert espace-temps Galilée (Galileo Galilei, dit en français) Lorentz Hendrik Antoon Maxwell James Clerk Newton (Isaac) référentiel relativité sciences (histoire des) - L'espace - Espace et relativité symétrie - 2.PHYSIQUE Les médias relativité Complétez votre recherche en consultant : Les livres clepsydre, page 1141, volume 2 équation du temps, page 1687, volume 3 Le concept philosophique Définir le temps ? Sans doute serait-il vain de prétendre contenir la notion de temps dans une définition générale préalable : en effet, la définition du temps intervient, à titre d'argument, à l'intérieur de chaque système de pensée qui s'intéresse à ce problème, et est déterminée en fonction des impératifs que chacun d'eux s'impose ; si bien qu'elle se trouve redéfinie par chaque philosophe. D'autre part, la notion de temps semble par ellemême rétive à toute définition, au point que cette remarque pourrait faire office de définition, à tout le moins négative. Il est possible ici de généraliser les remarques de Bergson, sans nécessairement adhérer à son projet philosophique global, qui révèlent que le langage et le concept sont inaptes à saisir le temps, tandis qu'ils sont mieux adaptés à exprimer l'espace. Dire et concevoir le temps, c'est, du même coup, le laisser échapper. Dans le même sens, saint Augustin parlait de l'« énigme du temps ». C'est la raison pour laquelle le temps n'est pas conçu en lui-même, mais rapporté à une autre notion, qui apparaît, à juste titre ou non, plus claire, mieux conceptualisable, qu'il s'agisse, par exemple, de l'éternité, du mouvement, de la conscience ou de l'histoire. Pourquoi autant d'interrogations sur la notion de temps ? À l'occasion de leur expérience du temps, les hommes éprouvent leur condition, à savoir leur finitude : être dans le temps, c'est avoir un commencement, et donc une fin. L'épreuve du temps est source d'angoisse, comme le révèle le mythe de Cronos qui dévore ses enfants, marquant nettement que, si le temps nous engendre, il nous abolit. Épicure enseignait déjà que la crainte de la mort vient de ce que nous ressentons le désir d'éternité. Nous ne pouvons plus dès lors nous rendre compte que la mort n'est rien pour nous : lorsqu'elle est là, nous ne sommes plus, et, si nous sommes, c'est qu'elle n'est pas. L'angoisse interdit la lucidité. Autant dire que, plus que jamais, par rapport au temps, la double vocation de la philosophie, théorique et éthique, doit jouer pleinement son rôle. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Augustin (Aurelius Augustinus, saint) Bergson Henri Épicure finitude Kronos m ort mort - Mort et cultures roman - Le temps de la fiction temporalité Les médias temps - les trois temps de l'âme Les livres temps - Saturne dévorant ses enfants, de Goya, page 5123, volume 9 La philosophie aux prises avec le temps Une répartition commode, quoique schématique, des différentes conceptions philosophiques du temps peut prendre appui sur l'opposition entre Héraclite et Parménide. Pour Héraclite, les difficultés qui s'attachent au concept de temps ne sauraient constituer une objection : ce penseur appréhende toute réalité comme étant en devenir, en guerre avec elle-même comme avec les autres. Le temps est constitutif de la réalité, et les paradoxes de son concept sont l'expression adéquate de cette dernière. Pour Parménide, en revanche, de telles difficultés furent un motif suffisant pour abandonner le concept de temps. La thèse parménidienne soutient, en effet, que seul l'un existe et que le multiple n'est pas. Les différentes conceptions du temps qui se font jour dans l'histoire de la philosophie peuvent ainsi être considérées comme plus ou moins héraclitéennes, ou plus ou moins parménidiennes, selon qu'elles accordent plus ou moins de réalité au temps. Platon, qui profite de la distinction du monde sensible et du monde intelligible pour attribuer le temps au monde sensible et réserver l'intemporalité au monde intelligible, est assurément parménidien, dans la mesure où le sensible constitue pour lui un moindre être au regard de l'intelligible. Hegel, au contraire, peut être rangé dans le camp des héraclitéens, pour autant qu'il insiste sur la dimension historique de l'esprit, qui ne se réalise qu'à travers la série d'expériences que la conscience fait d'elle-même. Il reste que le caractère abrupt de cette distinction mérite d'être atténué : Platon procède à une réévaluation du temps lorsqu'il le définit, ensuite, comme une sorte d'image mobile de l'intelligible dans le sensible, tandis que l'esprit hégélien, historicisé, n'en est pas moins premier, et, à ce titre, hors du temps. Aussi faut-il laisser place à la nuance lorsqu'il s'agit d'apprécier la conception de chaque philosophe. C'est ainsi que la définition kantienne du temps comme forme a priori de la sensibilité, au sens où toute expérience sensible ne peut avoir lieu que dans le temps, a pu acquérir une dimension psychologique avec Jean Piaget, qui l'inscrit dans l'évolution de l'individu ; tandis que la durée, temps réel dans lequel il y a véritable écoulement, par opposition au temps spatialisé de la science, où les instants sont seulement juxtaposés et qui est posée par Bergson comme le fonds intime de la conscience, semble échapper à cette dernière, dans la mesure où elle est requise par l'action, qui se satisfait de la mesure du temps spatialisé. Le temps serait-il irréductible ? « Qu'est-ce donc que le temps ? Si personne ne me le demande, je le sais ; mais si on me le demande et que je veuille l'expliquer, je ne le sais plus ! » (saint Augustin, Confessions, XI, 4). Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats devenir Hegel Georg Wilhelm Friedrich Héraclite d'Éphèse historicisme Kant Emmanuel Parménide d'Élée Piaget Jean Platon temporalité Les livres temps - Vanité, de Philippe de Champaigne, page 5123, volume 9 temps - les Phases de la lune (1939-1944), de Paul Delvaux, page 5123, volume 9 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats sciences (histoire des) - Le temps Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats sciences (histoire des) - Le temps Les indications bibliographiques J.-P. Auffray, l'Espace-temps, Flammarion, Paris, 1996. D.-S. Landes, L'heure qu'il est : les horloges, la mesure du temps et la formation du monde moderne, Gallimard, Paris, 1987. F. Laupie, Leçon philosophique sur le temps, PUF, Paris, 1996. J. Matricon et J. Roumette, l'Invention du temps, Presses-Pocket, coll. Explora, Paris, 1991.