Le refoulement en psychanalyse
Publié le 07/04/2015
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refoulement n.m. (angl. Repression; allem. Verdrângung). Processus de mise à l'écart des pulsions qui se voient refuser l'accès à la conscience.
Il existe pour S. Freud deux moments logiques du refoulement: le refoulement originaire et le refoulement proprement dit. Le refoulement originaire est la mise à l'écart d'une signification qui, en vertu de la castration, se voit refuser la prise en charge par le conscient: la signification symbolique supportée par le phallus, objet imaginaire.
Dans l'après-coup intervient le refoulement proprement dit, le refoulement des pulsions orale, anale, sco-pique, invocante, c'est-à-dire de toutes les pulsions liées à des orifices réels du corps. Le refoulement originaire les entraîne à sa suite en les sexualisant. Il exige leur mise à l'écart.
DEUX SORTES DE REFOULEMENT
Une première remarque sémantique permet de distinguer deux termes indifféremment traduits en français par refoulement : Unterdrückung, qui littéralement signifie «répression« et témoigne de la poussée sous-jacente et active de l'élément réprimé, et Verdran-gung, ordinairement traduit par « refoulement « mais pour lequel l'appellation mise à l'écart conviendrait mieux. Freud lui-même le définit en ces termes : « Son essence consiste seulement en la mise à
l'écart (allem. die Abweisung) et en le fait de maintenir éloigné du conscient (allem. die Fernhaltung).
Ce que le refoulement met à l'écart et tient éloigné du conscient est ce qui est susceptible de provoquer un déplaisir. Mais, remarque Freud, « avant un tel niveau d'organisation psychique, les autres destins pulsionnels, comme la transformation en son contraire, le retournement contre la personne propre viennent à bout de la tâche de défense contre les incitations pulsionnelles «. En d'autres termes, si dans certaines conditions des incitations pulsionnelles sont susceptibles de provoquer du déplaisir et que le refoulement n'a pas encore eu lieu, Freud remarque qu'elles sont détournées par d'autres processus pulsionnels. Ces processus sont caractéristiques de la névrose obsessionnelle, comme le fait de transformer une incitation en son contraire — ne pas tuer un proche — ou de s'infliger un impératif punitif.
LES DEUX MOMENTS LOGIQUES DU REFOULEMENT
Selon Freud, nous sommes donc en droit d'admettre un refoulement originaire (allem. Urverdrângung), une première phase du refoulement qui consiste en ceci que le représentant de la pulsion, qui va faire qu'il y ait représentation (allem. Vorstellungsrepresen-tânz), se voit refuser la prise en charge par le conscient. Avec lui est donnée une fixation; le représentant concerné reste dès lors établi de manière invariable et la pulsion lui demeure fixée [...1. Le second stade du refoulement, le refoulement proprement dit, concerne les rejetons psychiques du représentant refoulé ou bien des chaînes d'idées qui, venant d'ailleurs, se sont associées avec ledit représentant. «Non seulement ces représentations connaissent le même destin que le refoulé originaire mais «le refoulement proprement dit est [...] un refoulement après coup.«
LE REFOULEMENT DES INCITATIONS PULSIONNELLES
Les incitations pulsionnelles proviennent d'abord des orifices réels du corps. (-> désir.) Qu'il s'agisse de la pulsion orale, anale, scopique, invocante, elles trouvent «faveur, dit Lacan, du trait anatomique d'une marge ou d'un bord : lèvres, "enclos des dents", marge de l'anus [...], voire cornet de l'oreille«. Freud parle encore des incitations pulsionnelles quand il évoque ces chaînes d'idées, signes d'une excitation organique, qui se trouvent aspirées «après coup« par l'effet du refoulement originaire. Le refoulement originaire les entraîne à sa suite et, du même coup, elles se trouvent refoulées comme s'il s'agissait d'un «coup de lame« porté par le sens sur les orifices corporels, supports de l'excitation.
Si maintenant l'on admet avec Freud «le primat du génital«, c'est-à-dire le fait que « la fixation« de cet objet imaginaire, le phallus, va venir exiger le refoulement de toutes les autres pulsions, en même temps qu'il les sexualise, on peut admettre que le représentant originairement refoulé dont parle Freud soit précisément le phallus. C'est le seul objet pour lequel, malgré l'existence du pénis, il n'y ait pas de support réel. Il exige, dans un après-coup logique, le refoulement proprement dit. Les pulsions non génitales sont désormais rattachées à la jouissance que représente le phallus. Il les sexualise et les entraîne dans sa mise à l'écart. Il appelle au sacrifice de la jouissance, quel qu'en soit l'objet.
LE SENS COMME CAUSE DU REFOULEMENT
En vertu de quoi? En vertu du sens, un sens univoque d'être phallique et supporté par le signifiant, que ce soit un mot, une phrase, une lettre. Il est à ce titre remarquable en clinique que «l'émergence dans la vie psychique d'une incitation pulsionnelle LI de
quelque ordre qu'elle soit, va [...] rencontrer automatiquement la lame qui va l'ébarber, [...] exiger que soit renoncé à cette incitation pulsionnelle, qu'elle soit rendue inoffensive, annulée, transformée, détournée, sublimée ou encore, si elle doit être réalisée, cela ne se pourrait qu'à certaines conditions pour que le plaisir éventuellement s'ensuive« (Ch. Melman,
Par le refoulement, le sujet sacrifie toute jouissance. L'objet imaginaire, le phallus, qui signifie la jouissance est en vertu du signifiant mis à l'écart et le sujet lui sacrifie toutes ses incitations. Enfin, cette aspiration des incitations pulsionnelles par la signification phallique mise à l'écart, ainsi que la sexualisation simultanée des signifiants qui s'y rattachent dans les différentes pulsions, peut fort bien se produire sans que la fonction paternelle intervienne. Le refoulement originaire du phallus est seulement déterminé par un effet de sens lié pour l'enfant à des énoncés signifiants.
LA FONCTION PATERNELLE DANS LE REFOULEMENT
Dans le même temps, l'idée courante selon laquelle le père interdirait et serait l'initiateur de la castration mérite d'être précisée. Certes, il revient au père par sa seule présence réelle de manifester au garçon en particulier qu'il doit renoncer à cet objet imaginaire qu'il croit détenir à travers le désir de sa mère. Mais c'est le sens véhiculé par la chaîne signifiante qui opère la
castration véritable, alors que la fonction paternelle semble avoir au contraire a comme effet d'empêcher que le mécanisme implacable du refoulement n'entraîne l'inhibition définitive du sujet. La fonction paternelle autorise le sujet à être moins timoré dans son désir, bref moins frappé par une castration qui, sinon, l'annulerait comme sujet désirant. Il n'est pas rare en clinique que d'aucuns s'aperçoivent qu'ils ont longtemps sacrifié aux impératifs de la castration, c'est-à-dire accompli leurs devoirs sociaux sans en tirer la moindre satisfaction.
C'est qu'ils ne situaient pas tout à fait pour eux la fonction qui pouvait les autoriser à désirer et à jouir dans les limites qu'elle définit et met en place sexuellement et socialement. Sans doute une telle remarque sur la nature du refoulement originaire permet-elle de relativiser ce qui en psychanalyse pourrait déboucher sur un culte inconsidéré de la castration; l'essentiel est plutôt que le sujet puisse être en accord avec son désir.
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