Le « défi intégriste »
Publié le 20/11/2011
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- « Nous prions pour que Dieu le rappelle le plus vite possible auprès de lui«. Ainsi parlait, un jour de l'anniversaire des 80 ans de Paul VI, le R.P. Barbara, l'un des chefs de file parmi les plus intransigeants de l'intégrisme catholique. Et Dieu exauça ... - « Si Dieu a rappelé Jean Paul P', c'est qu'il n'en était pas satisfait. Surtout, il n'approuvait pas l'écartement du conclave des cardinaux octogénaires «. Ainsi parlait, le lendemain de la mort inopinée de l'ancien patriarche de Venise, l'abbé Louis Coache, entre tous les intégristes, sans conteste le plus violent. Or voilà que s'asseoit dans le fauteuil de Pierre un prélat venu de l'Est, connu pour son attachement a la Tradition catholique, de surcroît réputé pour un sens prononcé de l'autorité.
«
tier en 1962 par celui que l'on avait appelé un pape de transition (on ne croyait pas si bien dire, en fait), le débonnaire Jean XXIII, est repris l'année sui
vante par Paul VI qui poursuit les orientations
nouvelles.
Et, petit à petit, Marcel Lefebvre, qui
prend part aux travaux, voit poindre à l'horizon
des changements qui le choquent profondément.
Dès 1963, il subodore, alors que les travaux dure
ront encore deux ans, que l'Eglise est à un tournant
capital, un tournant qui
ne lui plaît pas.
Formé à
l'école de la hiérarchie, de la « verité une et indivisi ble», de l'obéissance et d'une certaine rigidité, il voit naître un esprit nouveau, il entend des mots
comme Œcuménisme, accueil des autres religions,
des mots qu'il tient presque pour blasphématoires.
Cependant, Mgr Lefebvre votera les textes
conciliaires à l'exception de deux d'entre eux.
En
1965 cependant, toujours supérieur des spiritains,
il demeure dans une légalité ecclésiastique totale.
Mais il est extrêmement troublé.
Il a l'impression
que l'Eglise s'écroule.
Mais il ne veut pas, élevé à
l'école des papes autoritaires, se révolter contre
Paul VI.
Son premier acte de rébellion, il le réalise le 30 septembre 1968, en démissionnant de son poste de supérieur de la congrégation des pères du Saint Esprit.
ALors, retiré à Rome, il discute, il consulte
et se persuade que les jeunes séminaristes ont
besoin de lui qui a toujours enseigné, qui a toujours
formé des prêtres comme on
le lui a appris, et non
pas à la manière d'après Vatican II.
Mgr Lefebvre
part pour la Suisse, fonde la Fraternité Saint-Pie X
en 1969 et, quelques mois plus tard, le séminaire
international d'Ecône.
Il veut en faire une maison
de formation à la régularité, au silence, à la maîtri se de soi et à toutes les vertus naturelles qui sont,
estime-t-il, le complément nécessaire des vertus
surnaturelles.
C'est presqu'aussitôt un succès.
Venant de France, de Belgique, de Suisse, d'Italie
mais aussi du Canada, des Etats-Unis, des Antilles,
des jeunes gens
en mal de foi affiuent.
Ils sont 38 en 1971, 149 en 1974, plus de 200 aujourd'hui.
Après une période d'attentisme, Rome commence à
s'inquiéter.
Trop tard.
Le ver est dans le fruit.
Déjà
l'esprit d'Ecône commence à se répandre, à remuer
tous les vieux prêtres qui n'ont pas compris grand
chose aux réformes de Vatican Il, à qui on a enlevé
avec la soutane et le latin une certaine vision de l'Eglise de toujours, même si le latin avait remplacé le grec à une époque où précisément il était destiné
à être compris des masses populaires, et si l'intro
duction de la soutane noire ne date que du XIX• siècle.
Il faut attendre 1974 pour que Rome réagisse
:le cardinal Garrone, préfet de la Congrégation romaine pour l'éducation catholique et donc grand «pa tron » des séminaires, décide que le moment est
venu de m~t~e ~u pas Mgr Lefebvre et ses profes
seurs.
Il salSlt drrectement le pape du dossier.
Paul
VI, sur le rapport de l'évêque de Fribourg, désigne
alors une commission de trois cardinaux, un
Français, un Américain et un Espagnol pour tenter
de résoudre le problème dans les plus bref délais.
Ceux-ci dépêchent auprès du séminaire internatio
nal deux envoyés spéciaux qui estiment dans leurs
conclusions que
le supérieur d'Ecône se tient véri
tablement pour «le seul homme détenteur de la tra dition millénaire de l'Eglise».
Le 25 janvier 1975
Mgr Lefebvre est convoqué par la commission.
A
sa sortie,
il dénonce des méthodes typiques des tri
bunaux soviétiques.
Le 3 mars de la même année,
une nouvelle rencontre est organisée entre les quatre hommes.
Mgr Lefebvre est explicitement
accusé de vouloir donner naissance à une secte.
Le 6 mai, Mgr Mamie, sur instruction de la commis
sion cardinalice, retire l'autorisation canonique
accordée
à la Fraternité Saint-Pie X.
Du 23 au 27 mai, l'ancien archevêque de Dakar réplique en pre
nant la tête d'un pèlerinage de deux mille traditio
nalistes qui
se rendent à Rome dans le cadre de
l'année sainte.
Mgr Lefebvre refuse de disperser
son séminaire.
Le recours qu'il a interjeté devant le tribunal de la Signature apostolique ayant été rejeté
-le tribunal s'estime incompétent -, ille renouvel le et, cette fois, il n'obtient pas de réponse.
Désor
mais, pour l'évêque rebelle, tout est clair : à partir
du moment où ses recours -qui entraînent
en théorie la suspension de la peine -sont rejetés sans même être examinés, toutes les autres sanctions
fondées sur cette condamnation initial~ sont, pour
lui, nulles et non avenues: « Pourquoi, demande+ il, existe-t-il un droit canon ? - Sinon pour éviter
aux prêtres et aux évêques d'être victimes d'un
éventuel arbitraire.
Dès lors que
la loi est au servi ce de la destruction de la foi, elle ne doit pas être
obéie.
Il en est de même de toute autorité dans l'Eglise.»
La voie est donc tracée dont aucune adjuration,
vînt-elle du pape lui-même , ne le fera dévier et qui le conduira, emporté par sa brutale célébrité de l'été 1976, à faire état d'une ligne politique favo
rable aux dictatures.
Aussi longtemps que ce qu'il
estime être une forfaiture, un arbitraire pèsera
contre lui, Marcel Lefebvre
ne fléchira pas.
Seul un
procès canonique en règle ...
C'est exactement ce qu'a compris Jean Paul II.
Et il n'est pas douteux que le Supérieur de la Fra
ternité sacerdotale Saint-Pie X, qui s'est toujours
refusé
à envisager sa succession en consacrant un
évêque -acte schismatique par excellence -, alors se pliera.
Et peut-être discernera-t-on alors qu'au
fond de cette crise de l'unité catholique, à travers la
revendication acharnée, par dessus tout, des formes
du droit
de l'Eglise, de la considération personnelle
qui en découle pour qui s'y soumet, s'exprimait
l'honneur d'un homme.
Qui est toujours une par
celle
de l'honneur de Dieu..
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