L e rock, forme culturelle liée d'abord, et pendant longtemps, à la marginalité et à la protestation sociale de minorités, a aujourd'hui une longue histoire. Par la radio, le disque, la télévision, et à travers ses incidences esthétiques multiples (mode vestimentaire, vocabulaire, alimentation...), il a envahi nos vies quotidiennes. Banalisé, voire affadi par diverses récupérations commerciales, il demeure pourtant l'expression la plus visible des bouleversements qu'ont connus les mentalités en Occident depuis 1950. Il est encore difficile de retracer la genèse du rock en faisant la part de la légende qu'il a presque immédiatement engendrée : son succès vient pour beaucoup de ce qu'il est un grand pourvoyeur de mythes, au même titre que le cinéma hollywoodien. On peut même dire que le rocker a directement succédé au cow-boy de western comme archétype favori de la jeunesse américaine. Ils ont d'ailleurs en commun la liberté et la mobilité (la moto et la Cadillac se substituant au cheval et à la diligence), mais aussi un mépris relatif du confort et un mode de vie paradoxal, à la fois individualiste et convivial. Mais le rocker se distingue totalement du cow-boy par sa rupture avec le modèle familial traditionnel. Après la Seconde Guerre mondiale en Occident, l'accélération du progrès technique, l'exode rural, la scolarisation prolongée et la généralisation de l'accès aux loisirs ont brusquement approfondi le fossé entre les générations : la « jeunesse » est devenue une catégorie sociale en soi et surtout, pour la première fois, une nouvelle catégorie de consommateurs revendiquant une certaine autonomie économique. Les maisons de disques (en tout cas les plus grandes) ont mis quelque temps à comprendre que, si les parents n'aimaient pas la musique favorite de leurs enfants, celle-ci représentait néanmoins (ou même d'autant plus) un marché considérable. Cette prise de conscience de la part du show-business a beaucoup joué dans l'explosion commerciale du rock and roll (ou rock'n'roll) autour de 1955. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats rock and roll Une fiction en noir et blanc Le mot rock n'est pas récent, la musique qu'il désigne non plus. Dès 1922, la chanteuse de blues Trixie Smith enregistrait My Daddy Rocks Me in with on Steady Roll : rock signifie « balancer », « secouer », « bercer », et roll, « rouler », « enrouler », avec, en l'occurrence, une double métaphore sexuelle. Quant aux premiers disques de rock and roll, ils se distinguent peu des rhythm and blues noirs en vogue dès les années quarante. Ce qui est neuf, c'est que - ségrégation raciale oblige - les maisons de disques et les radios du Sud font appel à des chanteurs blancs pour des covers, versions souvent édulcorées des mêmes chansons. Ces artistes - Pat Boone, Johnny Ray, Bill Haley, etc. - vont être les premiers passeurs entre deux mondes qui jusqu'alors s'ignoraient : celui des chanteurs populaires noirs (Louis Jordan, Big Joe Turner, Charles Brown) et celui des crooners, généralement d'origine italienne (Perry Como, Tony Bennett, Dean Martin, Frank Sinatra). Mais les vrais pionniers du rock and roll sont en fait les quelques artistes noirs qui, par leur charisme, parviennent déjà à émouvoir un public multiracial : Chuck Berry, Bo Diddley, Fats Domino et Little Richard. Ce dernier est à l'origine (et redeviendra) un chanteur de gospel, genre de musique dont l'influence sur le rock est au moins aussi importante que celle du blues. Dès le début des années cinquante, des quatuors vocaux religieux décident de consacrer tout ou partie de leur temps à la musique de danse : ce sera la vogue du « doowop », dont les groupes les plus fameux (Dominoes, Drifters, Moonglows, Platters, etc.) accompagnent l'essor du rock and roll tout en posant les bases de la soul-music. La figure du preacher (le prédicateur enflammé des églises noires) exerce aussi une grande influence sur l'attitude scénique des premiers rockers. Et bien des sociologues ont souligné le caractère cryptoreligieux des festivals qui deviendront les grand-messes du rock. Comme Little Richard (ils seront d'ailleurs tous deux promus par la même maison de disques, RCA), Elvis Presley a connu son initiation musicale dans les choeurs de gospel. Jeune Blanc passionné de musique noire, il a grandi à Memphis, une des capitales du blues, du rhythm and blues et du rock and roll noir. Mais il est aussi très féru de country et western-songs et de bluegrass, cette musique des petits fermiers blancs, quasiment inconnue en Europe, mais qui reste très populaire aux États-Unis (en 1992, le chanteur country Garth Brooks a même ravi la première place du hit-parade à Michael Jackson). C'est d'ailleurs un petit label de country et de blues, Sun Records, à la tête duquel se trouve Sam Phillips, qui ouvre ses studios au jeune Presley. Le physique avantageux du chanteur n'est pour rien dans ses premiers succès (radiophoniques) : sa voix claire et sensuelle, son swing très naturel et la sobriété de l'instrumentation (guitare et contrebasse) rendent très séduisante cette première tentative réussie de métissage musical. Ce « rockabilly » adapté au public adolescent paraît, avec le recul, bien timide en regard de ses modèles noirs. Les allusions sexuelles y sont nettement moins appuyées (et surtout moins comiques), même si Elvis fait rimer son prénom avec pelvis et roule des hanches suggestives devant les caméras. Ses premières prestations télévisées scandalisent les classes moyennes, et il s'efforce par toute son attitude de promouvoir sa musique comme celle du « péché ». Son sens aigu des médias pourrait servir de modèle à tous les rockers, et, même si la médiocrité des scénarios rend ses quelque trente films peu intéressants, ses contemporains le perçoivent comme une réincarnation de James Dean - mort au moment même où sortaient les premiers 45-tours d'Elvis. La mort en pleine jeunesse sera d'ailleurs malheureusement une tragédie répétitive dans l'histoire du rock. En 1960, les principaux concurrents de Presley - Buddy Holly et Eddie Cochran - ont déjà disparu accidentellement. Une fois Elvis reconverti dans la ballade sirupeuse, le rock and roll originel ne leur survivra guère. Et pourtant, ses caractéristiques principales resteront jusqu'à nos jours celles que revendiquent la plupart des rockers. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Berry (Charles Edward, dit Chuck) blues Domino (Antoine, dit Fats) jazz - Une musique de couleur nuancée Little Richard (Richard Wayne Penniman, dit) Presley Elvis rhythm and blues Sinatra Frank soul-music Les livres rock - Elvis Presley, page 4422, volume 8 Rock and roll attitude En quarante ans, le rock s'est tellement diversifié qu'il est devenu difficile d'en donner une définition musicale précise. D'abord, le terme n'a pas du tout la même acception en Europe et aux États-Unis, où il est plus proche du sens que nous donnons ici au terme pop-music : comme pour le jazz, l'Europe se veut « plus royaliste que le roi » et accorde au mot rock un contenu plus restrictif et conforme à ses origines. Le rock a toujours utilisé principalement la structure du blues en douze mesures à quatre temps, avec un découpage strictement binaire (ce qui le démarque du jazz, essentiellement ternaire). Mais les exceptions sont nombreuses, surtout à partir des années soixante, dans les tendances dites « progressives » du rock. Certains rockers adoptent un style beaucoup plus diversifié rythmiquement (ainsi Frank Zappa). Le rock s'est développé en même temps que les instruments de musique s'électrifiaient, et l'on pourrait même dire que son vrai père n'est pas un musicien, mais un luthier. L'Américain Leo Fender, bricoleur de génie, a inventé successivement les deux instruments favoris des rockers : en 1948, la guitare solid body à caisse pleine (la « broadcaster », ou « telecaster »), puis, en 1951, la guitare-basse dérivée, ou precision bass , qui a supplanté la contrebasse acoustique. À partir des années soixante-dix, la recherche d'effets sonores par l'usage d'accessoires électroniques est devenue aussi importante, sinon plus, que la virtuosité instrumentale et le choix de l'orchestration : delay, reverb, distorsion, wah-wah, harmonizer, chorus, effet Larsen... tous ces gadgets aux noms plutôt barbares sont en majeure partie responsables du son rock à partir du milieu des années soixante, le grand expérimentateur - encore inégalé - étant Jimi Hendrix. Le chanteur dansant guitare en bandoulière offre l'image emblématique du rocker, même si sa silhouette était déjà présente dans le blues urbain des années quarante avec de grands solistes comme T. Bone Walker. De Chuck Berry à Bruce Springsteen en passant par Jimi Hendrix, ces « guitar-singers » sont légion. Mais, dans bien des groupes, les rôles sont dissociés, les meilleurs instrumentistes devenant « guitar-heroes » à part entière, comme Eric Clapton, Jeff Beck ou Mark Knopfler (du groupe Dire Straits). Les chanteurspianistes sont aussi très nombreux, mais forment une lignée bien à part, de Fats Domino à Elton John en passant par Doctor John. Plus rares sont les chanteurs-bassistes (Sting) ou les chanteurs-batteurs (Ringo Starr, Robert Wyatt) qui sont devenus de vraies rock stars. L es femmes ont été longtemps marginalisées, de la même façon que dans le jazz : peu d'instrumentistes, les chanteuses étant souvent réduites au rôle de faire-valoir sexy par les groupes en majorité masculins. Certaines sont pourtant devenues des personnages charismatiques : Joni Mitchell, Tina Turner et, avant elles, Janis Joplin. Cette dernière est l'une des nombreuses victimes du fléau qui a longtemps hanté la scène du rock : l'usage des drogues. Resté trop marginal jusqu'aux années soixante pour qu'on en mesurât vraiment les dangers, il est responsable de la mort, entre autres, de Jim Morrison (des Doors), Sid Vicious, Mike Bloomfield, Tim Buckley, Jimi Hendrix et, probablement, Elvis Presley. L'excès et l'outrance en toutes choses font partie de ce qu'on peut nommer une « tendance baroque » qui prévaut dans le rock. L'excentricité vestimentaire et la revendication d'une certaine apparence bisexuelle ont toujours été plus que des artifices scéniques, depuis Little Richard jusqu'à Prince en passant par David Bowie et Boy George. Le machisme exacerbé est une autre forme, non moins courante, de la « rock attitude », avec son corollaire, la violence affichée. Le heavy-metal, ou hardrock, y sombre souvent, tout en entretenant le mythe de la pureté du rock originel : textes sadiques, emblèmes sataniques et exhibition d'accessoires guerriers relèvent le plus souvent d'un folklore inoffensif opposé à toutes les tentatives de récupération qui restent la hantise de tous ceux qui croient encore au rôle subversif du rock. Reste que la brutalité souvent meurtrière des Hell's Angels et, aujourd'hui, la prolifération en Europe des groupes de skinheads ouvertement néo-nazis font partie du paysage politiquement et socialement très contrasté de la « planète rock ». Cependant, dans leur immense majorité, les rockers ont toujours affiché des idéaux diamétralement opposés à cet extrémisme de droite. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Berry (Charles Edward, dit Chuck) blues Bowie (David Robert Jones, dit David) Clapton Eric Domino (Antoine, dit Fats) Doors (The) guitare guitare - De la guitare classique à la guitare électrique hard-rock Hendrix Jimi instruments de musique - Tradition savante et tradition populaire Police (The) pop-music Prince (Prince Rogers Nelson, dit) Sex Pistols synthétiseur Turner Tina Les livres rock - Jimi Hendrix à l'Olympia, en 1967, page 4423, volume 8 rock - Chuck Berry au festival de jazz de Montreux, en 1972, page 4423, volume 8 La prise de conscience des années soixante Le rock and roll des origines était avant tout une musique de danse et de fête à usage essentiellement privé. La politique, les grands problèmes de l'humanité, n'y étaient quasiment pas évoqués. Hors des États-Unis, les premiers rockers n'étaient le plus souvent que des imitateurs collant des paroles anodines ou parodiques sur les succès américains. C'est pourtant en Grande-Bretagne que, vers 1963, le rock renaît de ses cendres, dans les ruines de la première révolution industrielle. Les Beatles à Liverpool, les Rolling Stones et les Who à Londres n'ont pourtant pas grandi dans un terrain vague, musicalement parlant : le blues et le rhythm and blues avaient en Grande-Bretagne de nombreux adeptes (Alexis Korner notamment) et des clubs très fréquentés. C'est d'abord en reprenant le répertoire afro-américain le plus authentique que les néo-rockers anglais (puis irlandais) se sont aguerris. En reconnaissant ainsi avec plus d'honnêteté que leurs pairs d'outre-Atlantique ce qu'ils doivent aux bluesmen, les Rolling Stones, surtout, provoqueront un blues revival qui propulsera ses troubadours (Muddy Waters, John Lee Hooker) sur les grandes scènes du rock. Mais, dès 1965, c'est avec leurs propres compositions que les rockers britanniques ont conquis les premières places du hit-parade mondial. Londres est devenue, pour un temps, la capitale du rock, et c'est même là que Jimi Hendrix, après des années d'errance dans son Amérique natale, a été reconnu comme le premier génie indiscutable de cette musique. C'est sous l'influence directe des groupes anglais que s'est développé le rock californien, en même temps que s'y implantaient l'orientalisme, le naturisme et le pacifisme des mouvements beatnik et hippie. Du milieu des années soixante date aussi l'explosion de la soul-music (Sam Cooke, Aretha Franklin, Otis Redding, Marvin Gaye), du funk (James Brown) et de la grande variété noire (celle des disques Motown, de Diana Ross et des frères Jackson) dont l'influence sera désormais considérable sur l'évolution du rock. Enfin, les influences anglo-irlandaises entrent pour beaucoup dans la renaissance du folksong américain, un temps incarné par Joan Baez et Bob Dylan, et qui donnera naissance avec ce dernier au mouvement country-rock. L'engagement pour la paix au Viêt-nam et la fin de la ségrégation raciale, la révolution sexuelle et le refus de la société de consommation sont les thèmes majeurs que le rock a su cristalliser à la fin des années soixante dans ses énormes festivals (Monterey, Woodstock), mais aussi par l'élaboration de ses disques en tant que produits culturels contemporains : c'est à cette époque, en effet, qu'apparaissent les premiers concept albums, dont la pochette, autant que le contenu, est une oeuvre de pop'art en même temps qu'un manifeste visuel. Mais le show-business a compris la leçon : le rock est décidément une bonne affaire ! Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Baez Joan Beach Boys Beatles beatniks Brown James C ooke Sam country Dylan (Robert Zimmerman, dit Bob) festival festival - Rock et variétés Franklin Aretha funk Gaye Marvin Hendrix Jimi hippy (mouvement) Hooker John Lee M otown rhythm and blues Rolling Stones soul-music underground Who Les livres Beatles, page 581, volume 2 Presley Elvis, page 4101, volume 8 rock - les Beatles à la BBC, en 1964, page 4422, volume 8 rock - les Who à la fête de l'Humanité, à La Courneuve, en 1972, page 4424, volume 8 rock - Mick Jagger et Keith Richard lors d'un concert des Rolling Stones à Paris, en 1975, page 4424, volume 8 Rolling Stones, page 4427, volume 8 Un spectacle musical à l'échelle planétaire À partir des années soixante-dix, le rock éclate en d'innombrables tendances qui ont toutes un point commun : à chacune est associée une mise en scène qui déborde largement les limites du concert et de la production discographique. Le rocker devient acteur autant que musicien : « showman » à part entière, il doit savoir, pour traverser sans encombre la succession accélérée des modes, utiliser en professionnel tous les relais médiatiques qui s'offrent à lui. Le cinéma en est un ; David Bowie, Sting, Johnny Hallyday (le Détective, de Godard), nombreux sont ceux qui se tournent vers le grand écran, parfois même derrière la caméra (David Byrne, Prince). La télévision hésite longtemps (surtout en Europe) à donner au rock la place qu'exige la demande des jeunes. Du show à l'américaine platement reproduit aux émissions spécialisées (en France, « les Enfants du rock », « Rapido »...), la route sera longue à travers les années quatre-vingt, qui seront celles de l'éclosion de chaînes musicales à dominante rock, sur le modèle de l'Américaine MTV. Il n'y a pas si longtemps que le vidéo-clip (version actuelle des scopitones des années cinquante et même des films d'entracte des débuts du parlant) est devenu le produit promotionnel indispensable pour permettre à une chanson de devenir tube. Quant à la radio, elle joue de plus en plus le rôle d'un laminoir où le système des panels de marketing ne laisse passer que la part la plus banalisée de la production. C'est donc le concertspectacle, et lui seul, qui entretient la créativité des rockers et permet de juger toutes leurs qualités d'artistes authentiques. Le gigantisme des tournées mondiales organisées pour les plus célèbres est presque toujours un gouffre financier, mais il est jugé nécessaire au développement d'une carrière. Décors somptueux, choristes et danseurs par dizaines, effets spéciaux, projections vidéo et laser : rien ne semble excessif pour drainer les foules vers des salles de plus en plus vastes, où le public des derniers rangs ne voit plus la vedette que sur écran et où le volume sonore indigne les médecins tout autant que celui du baladeur (Walkman), cette autre invention destinée à resserrer le lien individuel entre le musicien et l'amateur de rock. Au milieu des années soixante-dix, le spectacle rock est devenu aussi théâtral que possible : Alice Cooper lance des poulets sanguinolents sur son public ; David Bowie multiplie ses métamorphoses ; Doctor John se présente en guérisseur vaudou... Un peu plus tard, d'autres ont cultivé la dérision (Kid Creole et, en France, Raoul Petite) ou l'interlope (Tom Waits). Les premiers opéras rock ( Tommy ) et les premiers vrais films rock (Phantom of the Paradise) datent de cette époque où l'apparence tend à supplanter le texte et la forme musicale. Non pas que celle-ci soit alors négligée... C'est l'époque où s'est vraiment développé le rock progressif : aux États-Unis (Frank Zappa et les Mothers of Invention, Captain Beefheart), en Grande-Bretagne (Soft Machine, King Crimson) et en France (Magma, Zao). D'autres (Pink Floyd, Emerson, Lake and Palmer, Mike Oldfield) cherchent une voie entre le rock et la musique symphonique en exploitant la grande nouveauté technologique qu'est alors le synthétiseur. Enfin, c'est la grande époque du « latin-rock » (Santana, certains groupes de salsa) et surtout du jazz-rock. Cette forme hybride a été aussi baptisée, selon les points de vue, rock-fusion ou jazz-fusion, et, à son plus haut niveau d'expression, elle est demeurée l'apanage de Miles Davis et de ses exmusiciens : Tony Williams, Herbie Hancock, John McLaughlin, Chick Corea, Billy Cobham et les membres du groupe Weather Report. C'est en réaction contre ces musiques expérimentales jugées trop froides ou insignifiantes et quelque peu déconnectées du tissu social qu'est né le punk-rock. Quoique inspiré de modèles américains - Velvet Underground, Stooges, MC5 -, il s'est développé dans les banlieues ouvrières de Grande-Bretagne, où il a ressuscité à sa manière une « esthétique du cri » que, dans les années soixante, le free-jazz avait exprimée en dehors du rock. Le succès éphémère mais considérable des Sex Pistols et de Clash a profondément marqué l'évolution postérieure du rock. Leur rejet rageur de toute intégration sociale, leur goût de la provocation et leurs slogans nihilistes continuent, quinze ans après, de trouver des échos dans les sphères très diverses du rock alternatif. Au tournant de 1980, le punk s'est prolongé, notamment avec la new wave ( « nouvelle vague ») américaine avec les Talking Heads, Television, etc. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats baladeur Bowie (David Robert Jones, dit David) Clash (The) Davis Miles Dewey Genesis Hallyday (Jean Philippe Smet, dit Johnny) Hancock Herbie j azz-rock new-wave Oldfield Mike Pink Floyd Police (The) Prince (Prince Rogers Nelson, dit) punk Sex Pistols Talking Heads vidéoclip Les livres Clash (The), page 1131, volume 2 hard-rock, page 2317, volume 5 perestroïka, page 3802, volume 7 Prince, page 4117, volume 8 rock - David Bowie à Paris, en 1976, page 4424, volume 8 Finlande - concert de rock à Helsinki en 1990, page 1911, volume 4 De la rock-music à la world-music Le rock s'est alors montré de plus en plus perméable aux autres musiques populaires qui se développaient autour de lui : d'abord le reggae, dont l'influence est particulièrement perceptible chez Police et dans le ska revival anglais (Madness, The Specials) ; puis le disco, dont l'impact à retardement va se traduire par l'intrusion dans le rock de tous les artifices désormais permis par les nouvelles technologies d'informatique musicale : séquenceurs, échantillonneurs de sons, boîtes à rythmes utilisables non seulement en studio d'enregistrement, mais aussi sur scène, avec une facilité croissante. En 1982 souffle un vent de fraîcheur (certains diront de froideur) venu une nouvelle fois de Grande-Bretagne : le groupe The Human League arrive en tête du hit-parade mondial avec un prototype de ce que l'on appellera désormais « technopop ». Les Allemands de Kraftwerk avaient joué dix ans plus tôt le rôle de pionniers dans ce domaine du rock synthétique. Désormais, il envahit le marché du disque au point que la tentative de rénovation du bon vieux rockabilly acoustique par les Stray Cats apparaît comme un travail d'antiquaire. Culture Club, Depeche Mode, Duran Duran, Eurythmics... tous ces groupes n'innovent guère par rapport aux expériences déjà anciennes et bien plus ambitieuses de la poétesse américaine Laurie Anderson. Et l'essor de la technopop n'empêche pas le grand public de préférer le bon gros rock de Bruce Springsteen, promu « The Boss », ou le grand méchant hard-rock qui connaît un regain spectaculaire avec Def Leppard, Iron Maiden et Guns'n' Roses. Entre-temps, le rock est redevenu affaire de sentiments : sans renouer avec le militantisme un peu manichéen de leurs aînés soixante-huitards, les rockers des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix ont repris leur bâton de pèlerin, multipliant les actions caritatives, les benefit concerts et les tournées au profit des grandes causes humanitaires : pour les affamés d'Éthiopie et du Sahel, contre le racisme et l'apartheid, pour les Indiens d'Amazonie, contre la pollution, pour la recherche contre le sida. Dans ces grandes manifestations universalistes, le rock anglo-saxon découvre qu'il n'est plus seul à exercer une influence musicale planétaire. Le développement des télécommunications et des voyages a entamé son monopole de fait sur la « sono mondiale ». Si son influence s'exerce à peu près partout, il doit compter désormais sur celle de toutes les autres musiques. L'Europe a su développer des rocks nationaux qui échappent de plus en plus aux modèles anglo-américains : en France, par exemple, le rock-musette de Pigalle, le raï ou l'hispano-rock de La Mano Negra n'ont pas grand-chose de commun avec Madonna ou Dire Straits. Les Irlandais de U2 affirment leur singularité comme les Australiens de INXS. L'Afrique elle-même, berceau ancestral de presque toutes ces musiques, commence à faire entendre ses voix traditionnelles grâce à quelques stars mondiales comme Fela, Salif Keita ou Youssou N'Dour. Enfin et surtout, la musique afroaméricaine, dont le rock est l'enfant naturel, a su garder sa propre identité par des voies parallèles. Après 1992, le rap concurrence le rock dans les hit-parades. Directement issu du funk et du blues, il est devenu une expression plus directe, plus fruste et plus éloquente que le rock ne l'a jamais été. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats charité (concert de) Cure (The) Depeche Mode Dire Straits disco funk hard-rock house-music new-wave Police (The) pop-music raï rap reggae world-music Les livres raï, page 4228, volume 8 rap, page 4236, volume 8 rock - The Cure, page 4422, volume 8 rock - Bruce Springsteen à Philadelphie, en 1988, page 4425, volume 8 rock - concert des Smashing Pumpkins, page 4425, volume 8 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Yes Les indications bibliographiques A. Dister, l'Âge du rock, Gallimard, Paris, 1992. Ch. Gillett, The Sound of the City : histoire du rock'n'roll, Albin Michel, Paris, 1986. J.-M. Leduc et J.-N. Ogouz, le Rock de A à Z, Albin Michel, Paris 1990. H. Skoff-Torgue, la Popmusic, PUF, « Que sais-je ? », Paris, 1984.