imprécations.
Publié le 31/10/2013
Extrait du document
«
Mais
quedescènes pénibles, décidément, quandLouisNapoléon feraconnaître auxuns etaux autres son
choix.
Ce choix, ils'y détermine commeille fait pour toutes sesdécisions importantes: unelongue réflexion solitaire,
la maturation del'idée quis'élabore, etpuis, larésolution foudroyante.
Mais pendant qu'ilseprépare, seul,dans l'ignorance detous —ycompris, danslecas d'espèce, dela
principale intéressée —beaucoup croientpouvoir penserpourlui.
On songe biensûràun mariage politique: avecl'infante Christine, oulaprincesse WasadeSuède, oula
princesse AdélaïdedeHohenlohe...
Maisquipourrait bienavancer lenom d'Eugénie deGuzman, comtesse de
Téba? LouisNapoléon laconnaît depuisplusieurs années,sansquecela aitjamais parususceptible de
conséquences...
Etpourtant...
Étrange jeunefemme, audemeurant.
Affubléed'unemèreenvahissante etcalculatrice, qui,detoute évidence,
cherche àla caser glorieusement.
Espagnole,debonne famille —son père aservi Napoléon Ier
,ce qui negâte
rien —,elle estbelle, trèsbelle.
« Ce qui me plaisait, diraStéphanie TascherdeLa Pagerie, c'étaitsonespèce detimidité etde doute d'elle-
même, alliéeàsa triomphante beauté.»
On nesaurait direque l'étrange équipage qu'elleconstitue avecsamère aitgagné touslescoeurs.
Parcourant
sans arrêtl'Europe, ellespeuvent passerpourdesintrigantes.
En tout cas, Louis Napoléon estprofondément épris.A-t-ilétélejouet dessavantes machinations ourdiespar
Mme deMontijo, laquelleauraitétéutilement etintelligemment conseilléeparses proches :Mérimée, unami de
longue date,etFerdinand deLesseps, soncousin? LouisNapoléon, quin'avait certespasl'habitude devoir les
femmes luirésister, s'est-ilrésigné, commel'ontinsinué quelques mauvaises langues,àpasser parlachapelle
parce quec'était lechemin obligatoire delachambre àcoucher?
Là-dessus, lesavis divergent.
Maiscesont paradoxalement lesennemis d'Eugénie quivont précipiter sa
fortune.
Lorsd'une réception, le1er
janvier 1853,lafemme d'unministre l'humilie enpublic.
Toutdego, elle
annonce àLouis Napoléon que,n'enpouvant supporter davantage, ellevaquitter Paris.
Le lendemain, lavoilà avec unedemande enmariage, enbonne etdue forme.
Dèsquelanouvelle estconnue,
c'est latempête.
SiMorny, habilement, serange danslecamp —quasi désertique —de lajeune duchesse,
Persigny, lui,s'insurge etfait grand tapage.
Napoléon Jérôme,quil'avait trouvée «grotesque »,décrète qu'«on
n'épouse pasMademoiselle deMontijo ».Le ministre desAffaires étrangères, DrouyndeLhuys, parlede
démission.
Mathildefaitàl'empereur unescène mémorable :« Dès lorsque vous n'épousez pasune
Française, vousnepouvez entrerquedans unemaison souveraine.
»
Hugo, deson exil, exulte: «Ilfaut sepresser, carleBonaparte mefaitl'effet desefaisander.
Iln'en apas pour
longtemps.
L'Empirel'adevancé, lemariage Montijol'achève.
»
Rien n'yfait, Louis Napoléon neselaissera pasfléchir.
D'autant quec'est pourluiune manière d'exprimer une
nouvelle foissafidélité àsa mère, qui—Valérie Mazuyer nousl'assure —lui avait faitjurer quelques jours
avant samort denesemarier queselon soncoeur.
Louis Napoléon vamême, crânement, braverl'orage.
Ilconvoque le22 janvier leban etl'arrière-ban durégime
— Conseil d'État,SénatetCorps législatif —pour s'expliquer.
Lediscours qu'ilprononce, pourprésenter —et
justifier —son choix, estdehaute tenue.
Aumoins autant quel'empereur, c'estLouis Napoléon quiparle:
Il le reconnaît d'entrée:«L'union quejecontracte n'estpasd'accord aveclestraditions del'ancienne politique.
» Mais ilprécise aussitôt: «C'est làson avantage.
»
Ayant expliqué pourquoi ils'était écarté «des précédents suivisjusqu'à cejour »,faisant deson mariage une
affaire privée, ila ces mots restés célèbres dontl'humilité provocante confineàl'orgueil :« Quand, enface dela
vieille Europe, onest porté parlaforce d'unnouveau principeàla hauteur desanciennes dynasties,cen'est
pas envieillissant sonblason eten cherchant às'introduire, àtout prix, dans lafamille desRois qu'on sefait
accepter.
C'estbienplutôt ensesouvenant toujoursdeson origine, en
conservant soncaractère propreeten prenant franchement vis-à-visdel'Europe laposition deparvenu, titre
glorieux lorsqu'on parvientparlelibre suffrage d'ungrand peuple.
»
Huit jours après, partrès beau temps, c'estlacérémonie àNotre-Dame.
Toutestallé très vite.
Mais pourquoi
aurait-on attendu?EtlaFrance découvre sonImpératrice.
Les premiers moments d'éblouissement passés,Eugénie nevapas tarder, aprèsunepériode d'indifférence
polie, àconnaître l'impopularité.
Uneimpopularité quisera nourrie successivement degriefs contradictoires,
ainsi queleracontera plustard, trèslucidement, l'intéresséeelle-même:« Au début durègne, jefus lafemme
futile nes'occupant quedechiffons etvers lafin de l'Empire, jesuis devenue lafemme fatalequ'onrend
responsable detoutes lesfautes etde tous lesmalheurs! Etlalégende l'emporte toujourssurl'Histoire.
».
»
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