Du moins quelques journaux comprirent-ils l'ampleur de la gaffe et surent-ils apprécier le parti qu'en avait tiré ouis Napoléon.
Publié le 31/10/2013
Extrait du document
«
croire
acquis...
Même VictorHugovas'y laisser prendre.
LouisNapoléon sedérange pourrencontrer l'ancienpairdeFrance,
membre del'Académie; ildécouvre àcette occasion laplace desVosges, ets'émerveille...
Hugoneluiest pas
acquis d'avance.
Sonjournal, l'Événement, n'amarqué aucunenthousiasme devantsacandidature.
Le maître demaison lefait asseoir suruncoffre etl'écoute.
LouisNapoléon trouvealorslesmots qui
conviennent, lesmots quivont entraîner l'adhésion dugrand homme.
Hugoatranscrit, àsa manière, l'entretien
dans Histoire d'uncrime.
C'estdugrand art,même sile texte, apocryphe, doitêtre reçu avec précaution.
« Je viens m'expliquer avecvous.
Onme calomnie.
Est-cequejevous faisl'effet d'uninsensé? Onsuppose
que jevoudrais recommencer Napoléon?Ilya deux hommes qu'unegrande ambition peutseproposer pour
modèles :Napoléon etWashington.
L'unestunhomme degénie, l'autreestunhomme devertu [...].
« La république étantdonnée, jene suis pasungrand homme, jene copierai pasNapoléon; maisjesuis un
honnête homme,j'imiterai Washington.
« Mon nom, lenom deBonaparte, serasurdeux pages del'Histoire deFrance: danslapremière, ily aura le
crime etlagloire, danslaseconde, ily aura laprobité etl'honneur.
Etlaseconde vaudrapeut-être lapremière.
Pourquoi? parcequesiNapoléon estplus grand, Washington estmeilleur.
Entrelehéros capable etlebon
citoyen, jechoisis lebon citoyen.
Telleestmon ambition.
»
Falloux, qu'ilrencontre aussi,etqui cherche àlui arracher desengagements pourl'enseignement catholiqueou
sur laquestion romaine, ressortdel'entretien sansêtrevéritablement dupe,maisenlaissant toutdemême
entendre qu'ilaapprécié depouvoir s'exprimer :« Tous trouvent enluiun interlocuteur poli,modeste,
interrogeant rarement,écoutantbeaucoup.
»
Ainsi sontfaitslesgens quiviennent monnayer dessuffrages :plutôt quedepromesses dontilsne croient
probablement pasun
mot, ilsont besoin deconsidération etpour leurpersonne etpour leurs thèses.
Etde considération, Louis
Napoléon n'estpasavare.
Duplicité, fourberie? Assurément non.Ilest simplement unadepte, avantl'heure, du
« on verra bien»du général deGaulle oude Georges Pompidou.
Etpuis, sereconnaissant unevocation àla
synthèse entrelespartis sidivisés, pourquoi irait-ildireàtel ou telqu'il atort, alors quetous, àleur manière, ont
raison? Fairelasynthèse, c'estlatâche duchef del'État.
Etc'est celagouverner...
Comment luireprocher, d'ailleurs,desemontrer plushabile queCavaignac?
Le chef dupouvoir exécutif, eneffet, achoisi detrancher detout, d'exprimer sespréférences etde s'engager à
fond.
Ilest clair qu'après sesexploits dejuin iln'a plus desoutien àespérer endehors deladroite, qu'elle soit
républicaine ounon.
La droite quipeine àtrouver savoie, empêtrée qu'elleestdans sesdivisions etlacontradiction deses arrière-
pensées.
Des candidats potentiels, ellen'en manque pas,etqui portent beau,même s'ilssont encore tropmarqués parle
régime aboli:Molé, Changarnier, Thiers,Bugeaud...
Elle ferait bienaffaire avecceCavaignac qui,comme rempart del'ordre social, afait ses preuves.
Cependant,
non seulement celui-cineveut faire aucune concession, maisilne craint pasd'annoncer queseschemins ne
seront pastoujours ceuxqu'on souhaiterait luivoir emprunter...
Faceàlui, leprince paraîtsicomplaisant, si
facile àmener.
Rémusat lerépète :« On nevoyait enluiqu'un conspirateur absurde,unémigré d'unnouveau genre,undandy
vieillot etdissipateur etrien dans sesmanières n'étaitfaitpour endonner uneautre idée[...].Onsavait engros
qu'il avait publié plusieurs écritsassez peusensés...
»
Là, réside l'unedesclés dusuccès pourLouis Napoléon: empêcher, àtout prix, lajonction deCavaignac etdes
conservateurs detous bords.
Ilyparviendra d'autantmieuxqu'ildonnera toujoursdavantage l'impression de
jouer gagnant.
Louis Napoléon affichelaplus grande sérénité.
Plusonselaissera persuader qu'ilales meilleures chancesde
gagner, plusnombreuses serontlesadhésions etles simples résignations.
Gustave Claudin,journaliste, racontesapropre visite:«Le Prince LouisNapoléon, enhabit etcravate blanche,
était debout devantlacheminée.
Ilavait prèsdeluiune table surlaquelle
étaient empilées despétitions queluiapportaient lessolliciteurs qui,lecroyant déjàélu,luidemandaient des
places depuis desbureaux detabac jusqu'à dessous-préfectures etdes recettes particulières.
LePrince était
très affable.
»
C'est que,delaprovince, montelarumeur duralliement massifdumonde paysan.
Certes,joueensafaveur le
prestige deson nom, maisLouis Napoléon toucheaussilesdividendes desaprudence.
Iln'est impliqué enrien.
»
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