Dans toutes les affaires du « domaine réservé », Louis Napoléon tenait le plus souvent l'ensemble de ses ministres dans l'ignorance la plus totale de ses décisions.
Publié le 31/10/2013
Extrait du document
«
Et
c'est probablement pourqu'ilenfûtainsi queLouis Napoléon avaittantsouhaité qu'onmîtlespréfets en
situation debien connaître leurdépartement.
« J'attache, écrivait-ilàPersigny, laplus grande importance àla stabilité desPréfets dansleursdépartements.
Un Préfet
médiocre, maisconnaissant depuislongtemps lepays, vautmieux qu'unPréfet distingué etde passage.
»
Les élections de1857 allaient d'ailleurs prouverque,dèslorsqu'elle reprendrait consistance, uneopposition
pourrait s'exprimer etaccéder auCorps législatif.
Lescandidats hostilesaugouvernement rassemblèrent665
000 voix contre 5471 000àla majorité.
Cinqrépublicains furentélus:Émile Ollivier, quiallait s'avérer
l'adversaire leplus redoutable, ledocteur Hénon,Darimon, CarnotetGodchaux.
Lesdeux derniers cités
démissionnèrent pournepas avoir àprêter serment, etfurent remplacés, àla faveur d'élections partielles,par
Jules Favre etErnest Picard.
La nouvelle Chambre devaitrapidement démontrerqu'ellepouvait, au-delàmêmedecepetit groupe,
manifester sonindépendance.
Quelquessemainesaprèsl'ouverture delalégislature, l'attentatd'Orsiniétait
venu rappeler —comme celuiduPetit-Clamart, unpeu plus d'un siècle plustard—combien lerégime restait
tributaire d'unseulhomme.
Or,laloi des suspects soumiseauCorps législatif suscital'opposition devingt-
quatre députés.
La réalité durôle duCorps législatif estillustrée encoreparplusieurs autresincidents dontlepouvoir exécutif ne
sortit passystématiquement vainqueur.Ainsienfut-il parexemple, en1862, quand LouisNapoléon souhaitale
vote d'une dotation àCousin-Montauban, quivenait des'illustrer enChine.
Les députés nevoulurent rienentendre, choquésqu'ilsavaient étépar lesexactions etles rapines quiavaient
suivi laprise dePékin etdont l'écho faisait scandale.
Ilest probable, desurcroît, qu'ilsn'étaient pasmécontents
de saisir ceprétexte pourexprimer leurdésaccord impliciteàl'égard d'expéditions lointainesdontilsne
percevaient guèrel'opportunité etdont ilsappréhendaient lecoût.
Louis Napoléon futcontraint des'impliquer personnellement pourtenter d'arracher ladécision; etn'obtint pas
pour autant gaindecause.
Ilen futréduit àaccepter uncompromis boiteuxquiavait toutl'aird'une capitulation
en rase campagne.
Salettre du4mars auprésident del'Assemblée estl'aveu deson impuissance àobtenir
davantage:
« ...
Le refus delaChambre d'accueillir leprojet m'eûtétépénible sansdoute, maisiln'aurait enrien influé sur
mes sentiments etsur maconduite.
Jecomprends néanmoins, d'aprèsvosexplications, qu'unincident, léger
d'abord, soitdevenu, parles
circonstances quis'ysont rattachées, assezgravepourplacer lamajorité dansunefâcheuse alternative, ce
qui afait qu'un grand nombre deDéputés, commevousmel'avez dit,préférerait uneloicomprenant dansson
ensemble lesservices militaires exceptionnels.
« Adoptant cetteidée, j'airésolu deprésenter unnouveau projetqui,soumettant àla Chambre l'approbation
d'un principe général, permette d'assurer, dansdejustes limites, àtoutes lesactions d'éclat,depuisleMaréchal
jusqu'au soldat,desrécompenses dignesdelagrandeur dupays.
« Le Corps Législatif quim'a toujours donnéunconcours siloyal, quim'a aidé àfonder l'Empire etles
institutions quidoivent noussurvivre verraavecplaisir, j'aimeàle penser, quejem'empresse d'adopterle
moyen derétablir laconfiance mutuelleetd'effacer lestraces d'undésaccord toujoursregrettable entredes
pouvoirs issusdelamême origine ettravaillant consciencieusement danslemême but.»
La lettre présente d'autantplusd'intérêt queLouis Napoléon profitedecette mince occasion pourrappeler dans
quel esprit, selonlui,lesinstitutions doiventfonctionner etquelle estàses yeux l'importance duCorps législatif:
« L'esprit denos Institutions etmon sentiment bienconnu pourlaChambre auraientdûnous [...]préserver [de
ce malentendu].
Eneffet, aujourd'hui, lesconflits sontpresque impossibles; leslois sont discutées pourelles-
mêmes etnon envue dumaintien oudu renversement d'unMinistère.
LorsqueleGouvernement aexprimé
sans détour sonintention, lesrésolutions duCorps Législatif sontd'autant pluslibres que,dans lescas
ordinaires, ledésaccord nedoit troubler enrien lamarche desaffaires.
»
Dès novembre 1854,LouisNapoléon avaitdûserésigner ànommer Mornyàla tête duCorps législatif pouren
contrôler lesécarts, carledanger, ille comprenait, pouvaitbienvenir, nondel'opposition, numériquement
limitée etdurablement affaiblie,maisdelamajorité elle-même.
Cependant, leconcours deMorny, revenu d'uneambassade extraordinaire fortréussie auprèsdutsar, avait,
comme bienl'onpense, unprix.
D'abord, biensûr,ilfallut lelaisser mettrel'hôteldeLassay encoupe réglée.
On aeu, ilest vrai, desillustrations contemporaines delamême rapacité; dumoins agit-ilavecgoûten
inventant unbonapartisme hôtelierquifit,ultérieurement, desémules.
Le demi-frère del'empereur selança également dansunjeu personnel etsubtil qui,pour lemoins, anticipait.
»
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