Archipel de la Ceinture de feu du Pacifique découvert en 1521, les Philippines restèrent sous domination espagnole jusqu'en 1898, avant de passer sous l'influence des États-Unis (malgré l'indépendance reconnue en 1946) et de devenir un État démocratique en 1986. La population, hétérogène, mais fortement marquée par le catholicisme, et inégalement répartie, a un taux d'accroissement naturel toujours très élevé. L'économie s'améliore cependant grâce à l'exploitation des ressources énergétiques et à l'essor des industries d'exportation. Les Philippines sont une République de l'Asie du Sud-Est, constituée par un archipel de plus de sept mille îles entre la mer de Chine méridionale et l'océan Pacifique. Huit cent quatre-vingts de ces îles sont habitées ; les deux plus grandes, Luçon (Luzon) au nord et Mindanao au sud, couvrent les deux tiers de la superficie, et rassemblent les trois quarts de la population. Le reste de l'archipel est essentiellement constitué par les îles Visayas, dont les huit principales (Mindoro, Masbate, Negros, Panay, Cebu, Bohol, Leyte et Samar) s'égrènent entre Luçon et Mindanao. La Constitution de 1987 a instauré un régime présidentiel démocratique dont le président est élu pour six ans au suffrage universel à un tour. Il n'est pas rééligible. Le pouvoir législatif comprend deux Chambres : Chambre des représentants (204 sièges) et Sénat (24 sièges). Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Asie du Sud-Est Leyte Luzon Mindanao Sulu Visayas Géographie Les conditions naturelles. L'archipel s'inscrit dans la Ceinture de feu du Pacifique et se rattache à l'« arc interne » de Java et de Sumatra en Indonésie. Une douzaine de volcans sont actifs, parmi lesquels le mont Apo, point culminant (2 954 m), situé dans l'île de Mindanao. Longeant l'archipel à l'est, les fosses marines les plus profondes du monde dépassent parfois 10 000 m. Les plissements et les fractures d'époque tertiaire, qui ont engendré partout des reliefs extrêmement accidentés, laissent peu de place aux plaines, rares et étroites, dont la principale est celle de Manille. La configuration excessivement découpée de l'ensemble de l'archipel explique qu'aucun point du pays ne soit à plus de 120 km de la mer. Allongées sur 2 000 km entre les 5 e et 19e parallèles de latitude nord, les Philippines jouissent d'un climat tropical chaud et humide, mais nuancé par l'insularité : si la chaleur est permanente partout (27 o C en moyenne), les précipitations varient de 4 600 mm sur la cordillère centrale à 1 000 mm au sud de Mindanao ; Manille en reçoit 2 700 mm. Les régions occidentales ont un climat de mousson avec un hiver sec, tandis que le reste de l'archipel connaît un régime équatorial, avec des pluies presque constantes. À la violence du volcanisme s'ajoute celle des typhons qui, chaque année, frappent les îles de juillet à novembre, et dont les vents, soufflant à plus de 200 km/h, et les énormes trombes d'eau dévastent les terres. Ce phénomène est d'autant plus grave que la grande forêt tropicale a été défrichée à plus de 40 % et remplacée par des cogonales, ou savanes, sans grande valeur, qui n'offrent pas de résistance à l'érosion. La forêt ombrophile subsiste dans les massifs centraux, des formations de chênes et de conifères lui succédant en altitude. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Manille Mindanao Océanie - Géographie - Les conditions naturelles - Relief et structure Les aspects humains. Les Philippines se singularisent nettement au sein de l'Asie du Sud-Est par une population très hétérogène, s'exprimant dans huit langues différentes et quatre-vingts dialectes, et qui a atteint des stades d'évolution différents, même si dominent l'empreinte hispanoaméricaine et celle de l'Église catholique. Les populations les plus anciennement établies dans l'archipel sont des Négritos, qui pratiquent encore une économie de cueillette, et des Proto-Malais comme les Kalingas, les Mangyans ou les Igorots. Cependant, les plus nombreux des Philippins sont deutéro-malais : les Parwans, arrivés d'Indonésie, et, parmi eux, les Moros de Mindanao, qui sont musulmans. La plupart de ces populations occupent les plaines et le littoral. Les villes comptent surtout des habitants d'origine chinoise (estimés à près d'un million d'individus) et des métis sino-philippins, qui constituent la catégorie supérieure de la société. La répartition géographique du peuplement est très inégale, et, malgré les mouvements migratoires vers Mindanao, qui ne comptait que 900 000 habitants au début du XX e siècle, l'île de Cebu et la région occidentale de Luçon, où est située Manille, sont surpeuplées. L'agglomération de Manille rassemble plus de la moitié de la population urbaine du pays. Tandis que le taux de mortalité est tombé à 7 ?, le taux de natalité est resté élevé, notamment en raison de l'emprise de l'Église ; la croissance démographique est de ce fait l'une des plus fortes de l'Asie orientale. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Cebu Luzon Malais Manille Mindanao Les livres population - foule à Manille, aux Philippines, page 4052, volume 8 Philippines - rue principale de Jolo, page 3860, volume 7 Philippines - Manille, page 3861, volume 7 Philippines - quartier musulman dans le sud de l'île de Mindanao, page 3861, volume 7 La vie économique et l'organisation de l'espace. La mise en valeur des Philippines s'est effectuée dans le cadre de vastes latifundia, créés par les Espagnols, et où sont pratiquées les cultures d'exportation, principale ressource du pays, réparties en plusieurs secteurs bien déterminés : dans le sud-est de Luçon, on exploite le cocotier et l'abaca, ou chanvre de Manille ; dans le nord de l'île, le tabac ; dans l'île de Negros, la canne à sucre ; dans la vallée de Cagayán et les vallées orientales de Mindanao, l'abaca et le tabac. L'agriculture vivrière se différencie selon trois grands types de localisation : agriculture montagnarde des Proto-Malais (pratiquée sur brûlis ou, chez les Igorots, dans des rizières en terrasses) ; riziculture de plaine, devenue intensive avec l'introduction des « riz miracles » de Los Baños, essentiellement à Luçon et dans la vallée de la Cagayán, irriguée par barrage ; culture du maïs, de plaine et sur les pentes, avec association de manioc, dans les Visayas et au nord de Mindanao. L'agriculture philippine souffre d'une très forte inégalité foncière et d'une dépendance dangereuse à l'égard des cours des matières premières pour ses grandes cultures d'exportation que sont le coprah, le sucre et le tabac. Aussi ne contribue-t-elle que pour 22 % environ au PNB, tout en employant 41 % de la population active. L'espace industriel reste extrêmement limité, et bipolaire : l'aire métropolitaine de Manille (pôle principal de l'industrie de transformation) et le nord-ouest de Mindanao (avec la sidérurgie et la chimie d'Iligan) sont les seules régions industrielles. L'industrie, qui occupe près de 20 % de la main-d'oeuvre, couvre 33 % du PNB. Elle repose sur un important secteur agroalimentaire et, depuis les années soixante-dix et quatre-vingt, sur un secteur d'exportation (électronique de consommation, semiconducteurs) qui bénéficie d'une participation étrangère, essentiellement japonaise. Les ressources minérales sont importantes et susceptibles d'une mise en valeur plus intense. La production de l'or (Baguio) situe le pays au treizième rang mondial ; celle du chrome, au neuvième rang ; et celle du cuivre, exploité dans le nord de Luçon et à Cebu, au dix-septième rang. Ces matières premières sont transformées sur place ou exportées vers le Japon. Nickel, fer et manganèse sont également exploités et font l'objet de plans de développement. Les ressources énergétiques sont activement mises en valeur, de telle sorte que la dépendance extérieure a été réduite de 40 % depuis le début des années quatre-vingt. À partir de 1977, la mise en valeur du pétrole de Palaouan, et surtout l'exploitation de l'énorme potentiel géothermique, qui donne lieu à une production de plus de 5 milliards de kWh, ont permis un redressement spectaculaire de l'économie. La production d'hydroélectricité est assurée par les quinze centrales mises en service depuis 1982. Le plan « Philippines 2000 » vise à développer les moyens de transport et les télécommunications. Les investissements étrangers dans le pays sont principalement d'origine américaine et japonaise. Il reste que la dette extérieure est considérable, et que la moitié de la population vit toujours au-dessous du seuil de pauvreté. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats abaca Cebu Luzon Manille Mindanao Palaouan Visayas Les livres Philippines - rizières irriguées en terrasses, page 3861, volume 7 Philippines - chaîne d'assemblage en micro-informatique, page 3862, volume 7 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Cebu cueillette (économie de) Manille Mindanao Palaouan Quezón City Taal tagal Histoire L'histoire des Philippines avant la colonisation espagnole reste très obscure. Le caractère éclaté de l'archipel a favorisé le maintien durable de petites unités de peuplement, protomalaises et malaises, dotées chacune d'une langue propre. Malgré l'hypothèse d'une relation avec les royaumes indianisés d'Indonésie, l'archéologie n'a mis au jour aucune trace d'une civilisation unifiée par des principes politiques, ou par une religion commune, l'isl?m n'étant présent qu'au sud. Identifié par des voyageurs japonais et arabes dès le XIe siècle, le pays a connu, semble-t-il, entre le XIIIe et le XVe siècle, des échanges de biens et de populations avec le monde chinois. Une colonie espagnole. Magellan débarqua aux Philippines en 1521, mais c'est Villalobos qui, en 1542, leur donna ce nom, en hommage à l'infant d'Espagne (le futur Philippe II). Il fallut trente ans pour faire de l'archipel une colonie espagnole centrée sur Luçon et la ville nouvelle de Manille (1571). Les Philippines dépendaient directement du vice-roi du Mexique. Plus que le gouvernorat général assisté d'un conseil (la Real audiencia), c'est l'Église catholique qui imprima sa marque au pays. Sauf à Mindanao, restée fidèle à l'isl?m, l'Église joua un rôle fondamental dans la mise en place d'une culture commune à tous les Philippins, et d'une économie coloniale dominée par son immense emprise foncière. Manille, port et comptoir, servit de base commerciale au trafic des marchandises entre Chine et Mexique. Mais c'est seulement au XIXe siècle qu'on assista à la mise en valeur du pays et de ses richesses naturelles (métaux précieux et soie). Ce développement donna naissance à une bourgeoisie éduquée, l'·llustrada, qui tenta d'affirmer son identité nationale. Certains, tel le romancier José Rizal, étaient réformistes et rêvaient de faire des Philippines une province espagnole à l'égale de celles de la péninsule Ibérique. D'autres préconisaient l'indépendance, mais les principaux leaders nationalistes, Andrés Bonifacio, fondateur d'une société secrète (Katipunan, « Société des Fils de la Terre »), et Emilio Aguinaldo, étaient divisés, et le dernier provoqua l'exécution du premier en 1897. En avril 1898, les États-Unis et l'Espagne entrèrent en guerre à propos de Cuba. Aguinaldo se rapprocha alors des Américains et proclama l'indépendance des Philippines. Toutefois, les États-Unis, auxquels l'Espagne céda les Philippines contre le paiement de 20 millions de dollars (traité de Paris, décembre 1898), ne reconnurent pas cette indépendance. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Aguinaldo Emilio Espagne - Histoire - L'Espagne des Bourbons États-Unis - Histoire - De la guerre de Sécession à la Première Guerre mondiale Magellan (Fernão de Magalhães, en français Fernand de) Un protectorat américain ? L'ambiguïté de la politique américaine fut telle qu'il fallut attendre 1901, et plusieurs années de guérilla, pour qu'un gouverneur civil fût nommé à Manille. En dépit des changements apportés au style d'exercice du pouvoir, et de la substitution d'un clergé américain à l'Église espagnole, propriétaire de grands domaines, le nationalisme philippin s'exacerba. Le président américain Franklin D. Roosevelt réamorça le processus d'autonomie, la « philippinisation » de l'administration, et en 1934 fut voté le Philippine Independance Act. Il prévoyait l'indépendance totale pour 1946, s'attachait à préserver les intérêts économiques américains et confiait le pouvoir à la riche bourgeoisie (Manuel Quezón et Sergio Osmeña furent respectivement président et vice-président du Commonwealth des Philippines). Malgré des efforts sociaux et des mesures symboliques comme la proclamation du tagalog comme base de la langue nationale, la crise économique renforça la position protestataire de Benigno Ramos et de son parti socialiste et national, le Sakdal (« Protestation »). Seule l'occupation japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale et l'inclusion des Philippines dans la « sphère de coprospérité » japonaise mirent, pour un temps, un terme à l'agitation sociale et nationaliste. La résistance qui s'organisa fut donc étroitement liée à l'activité des partis de gauche. Les États-Unis libérèrent le pays en 1945, et appuyèrent Manuel Roxás, fondateur du parti libéral. Ils influencèrent la mise en place de l'indépendance, qui fut proclamée le 4 juillet 1946, mais se réservèrent, par la signature d'un accord militaire, vingt-trois bases aéronavales et obtinrent des privilèges juridiques et économiques. Cette « fausse » indépendance relança les mouvements de guérilla, tels que la rébellion des Huks, inspirés et soutenus par Mao Zedong. Au cours des années cinquante, les Philippines et leurs dirigeants oscillèrent entre l'antiaméricanisme apparent d'Elpidio Quirino (président en 1948) ou de Carlos Garcia (président en 1957) et la protection américaine marquée par l'entrée à l'OTASE (Organisation du traité de l'Asie du Sud-Est) en 1954 ; entre le libéralisme progressiste de Ramón Magsaysay (président de 1953 à 1957) et le développement autoritariste de Diosdado Macapagal (élu en 1961). De même, le pays semblait tiraillé entre son identité malaise et tiers-mondiste et son identité pro-occidentale et catholique. L'élection, en 1965, d'un ancien chef du parti libéral, devenu nationaliste, Ferdinand Marcos, répondit à une volonté de donner un cours plus lisible et mieux maîtrisé à l'histoire du pays. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Marcos Ferdinand Edralin Les régimes Marcos et Aquino. Dans le contexte tendu de la guerre du Viêt-nam, l'élection de Marcos entraîna une radicalisation de la vie politique et le retour des rébellions périphériques. L'infléchissement autoritaire du pouvoir face à une société en mutation démographique, économique et sociale conduisit l'Église à s'installer dans l'opposition. Sur fond de corruption, Marcos fut, avec l'appui des États-Unis, réélu en 1969. Fin 1972, il instaura la loi martiale pour changer la Constitution et conserver le pouvoir à vie. Après la chute de Saigon (1975) et le retrait américain du Viêt-nam, il dut accorder des élections en 1978, mais il en manipula les résultats. Son principal opposant, Benigno Aquino, fut contraint de se réfugier aux États-Unis. Marcos leva l'état de siège en 1981, mais continua d'exercer, avec son épouse Imelda, gouverneur de Manille et ministre, un pouvoir de plus en plus personnalisé. L'assassinat, en août 1983, de Benigno Aquino à son retour d'exil renforça l'opposition et fit fléchir le soutien américain au président Marcos. Après des élections confuses, la veuve du leader assassiné, Corazón Aquino, fut portée au pouvoir en février 1986 par un mouvement populaire soutenu par l'Église et une partie de l'armée. Marcos dut s'enfuir, tandis que s'amorçait une démocratisation du régime. Malgré une proposition d'amnistie, « Cory » Aquino ne put faire cesser la guérilla de la Nouvelle Armée du peuple (NPA, communiste), ni celle du Front national de libération (FNLM, séparatiste et musulman). Plusieurs tentatives de coups d'État la menacèrent, jusqu'à ce qu'elle quitte finalement le pouvoir en 1990. En 1992, c'est le bras droit de l'ancienne présidente, Fidel Ramos, qui a remporté l'élection présidentielle. Il a ouvert des pourparlers avec les mouvements insurrectionnels du pays. Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Aquino (Corazón, dite Cory) Marcos Ferdinand Edralin Les livres Philippines - Corazón, dite Cory, Aquino en campagne électorale, page 3863, volume 7 Complétez votre recherche en consultant : Les corrélats Asie Les médias Philippines - tableau en bref Philippines - carte physique Philippines - tableau en chiffres Asie - carte physique Asie - carte politique Les indications bibliographiques P. Chaunu, les Philippines et le Pacifique des Ibériques, École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 1960-1966. C. H. Foubert, les Philippines, le réveil d'un archipel, L'Harmattan, Paris, 1980. M. Mangin, les Philippines, Karthala, Paris, 1993. J. Rizal, Révolution aux Philippines, Gallimard, Paris, 1984.