Pour mieux affronter les défis économiques mondiaux du xxie siècle, les grands groupes sont obligés de fusionner
Publié le 21/03/2019
Extrait du document
La mondialisation de l'économie, qui entraîne un extraordinaire développement de la concurrence, provoque une vague de << mégafusions >> sans précédent dans la seconde moitié des années 90. les constructeurs automobiles, l'industrie du pétrole, les groupes de chimie et de pharmacie, mais également les banques et les télécommunications sont concernés. Les ordres de grandeur n'ont plus rien de commun avec les fusions d'entreprises survenues dans un passé proche. Et l'on n'est pas près d'en voir la fin.
Le xx,e siècle est le témoin de toute une série de grandes fusions. Au début du siècle, c'est le mouvement inverse : l'empire Rockfeller, la Standard Oil Company, est spectaculairement démantelé par les autorités américaines chargées de surveiller la concurrence qui craignent la constitution d'un monopole sur l'ensemble du marché américain du pétrole. Les années 60 sont placées, elles, sous le signe du débat autour des «multinationales» et de leur recherche de croissance mondiale. On aspire à la création de groupes mixtes, qui permettent de diminuer les risques par la diversification. Dans les années 80, les «raiders» font la une des journaux aux États-Unis : on rachète des entreprises mal en point afin de tirer profit, en les absorbant, de la vente de leurs secteurs d'activités les plus rentables. Mais les «mégafusions » des années 90 sont différentes : il ne s'agit plus de croître pour croître, mais de se rapprocher pour répondre à la mondialisation de l'économie et de la concurrence. Les sommes mises en jeu sont énormes.
Les entreprises de l'industrie pharmaceutique sont également concernées parla tendance aux grandes fusions internationales.
De plus en plus grand. Pour l'année 1998, les experts estiment le nombre de fusions d'entreprises internationales à 24000, ce qui représente un volume de 1 948 milliards d'euros. En 1992, on ne comptait encore que 8000 fusions, pour une valeur de 128 milliards d'euros. La série de concentrations qui survient dans l'industrie automobile commence au début des années 90 avec le rachat de Jaguar par Ford. On atteint un sommet (provisoire) en 1998 avec la fusion de Daimler-Benz et de Chrysler. Cette fusion industrielle, qui apparaît alors comme la plus importante de son temps (valeur boursière :
«
le
robot KUKA, mis en service en 1994 chez BMW à Munich, est une machine de précision utilisée dans
la construction automobile.
Globalisation.
La série de fusions qui
sur vien nent vers la fin des années 90
s'explique par plusieur s facteurs.
D'une
par t, la croissance du marché intérieur
européen, l'ouverture des frontières de
l'Eur ope de l'Est et le développement de
la zone Asie-Pacifique, ont engendré une
situation nouvelle.
Sur les mar chés jeunes,
la taille des entreprises est un avantage,
en termes de concurrence et
d'i nves tissements.
De plus, la gestion
globale des entreprises facilite la rapidi té
des évolu tions que l'on ob serve
aujourd'hui.
D'autre part, les débouchés
éco nomiq ues ne sont plus les mêm es
com pte tenu de la libéral isation de
plusieurs secteurs au niveau mondial.
En
19 98, l'Organ isation du Commer ce Inter
national abolit de nombr euses restrictions
nationales dans le secte ur de la finance
(banq ues, assuran ces) et des entreprises
de téléc ommun ications.
La concurrence
internati onale de plus en plus forte oblige
les sociétés de ces secte urs à s'agrandir.
Une tendance s'impose peu à peu dans
les anné es 90, venue des États- Unis et du
Japon.
Alors que dans les années 60, la
conc entrat ion des grou pes multi
nationaux est motivée par le partage des
risq ues entre les différents secteur s
d'ac tivité, c'est à la tenda nce inverse
qu'on assiste aujour d'hui : les sociétés se
concentrent sur leurs activités phares et
veulent s'approcher le plus près possible
de la première place dans ce sect eur.
C'est
à ce type de réflexion que l'industrie automobile
se rallie ; mais aucune
entreprise n'impose encore son monopole
à l'éche lle mondiale.
Un autre princip e directe ur se dégage,
qui trouve une fois de plus son origine
aux États -Unis.
Dés ormais, les gros
investisseurs financiers (pour la plupar t
des entrepri ses) et les ana lystes boursiers
placent la réalisation du profit au cœur
des objectifs de l'entreprise.
Ainsi, en se
concentrant sur un secte ur d'activit é
principal, ce qui permet l'exploitation du
marché le plus large possible, on obtient
une réduction des coûts et une
aug mentation des gains.
L'idée d'une util isation des effets de
synergie est à la base de cette tendance :
en organisant en commun les achats et les
ventes, la recherche et le développement
ainsi que la production, les coûts baissent
et les gain s aug mentent ; mais la
suppr ession de milli ers d'emplois que cela
entraîne fatalement constitue un difficile
problème.
Puissance et contrôle.
Un processus de
conc entrat ion d'entrepris es aussi
général isé provoque, de façon plus ou
moins justifiée, la demande d'inter
vention et de contrô le de l'État.
Des
groupes aussi puissants disposent en effet
d'ins trumen ts de pouvoir considérables.
Ce pouv oir peut être entre les mains
d'une seule personne, ce qu'on observe
chez les dirigea nts uniq ues, ou appartenir
aux partenaires d'un accord qui dictent arbitrair
ement leurs conditions (en jouant
par exemple sur les prix).
Il se peut
égaleme nt que l'on bloque l'accès du
mar ché à ses concu rrents, en menant une
lu tte acharnée des prix, ou en imposant,
par exemple , des restrictions sur les
br evets.
Un excès de pouv oir peut
conduire à exiger des consommateurs des
prix de plus en plus élevés.
Ce risque ne
survient que si les fusions ont engendré
un monopole et qu'il n'exis te plu s de
concurrence.
Mais l'ob jectif de toutes les fusions
étant de faire des économies de coûts,
el les représentent un réel danger pour
l' emploi : les syner gies recherchées
en traînent en général d'impor tants
licencie ments.
Au vu de grandes fusions comme celles
de Daim ler-Chrysler et de Deutsche Bank
Ban kers Trus t fin 1998, les expe rts
demandent l'instauration d'un office des
cartels européen voire international : à
l'heure de la globa lisation, les autorités
natio nales n'on t en effet plus aucune
ma rge de manœ uvre.
L'objectif est de
protéger la concu rrence en faveur des
consommateu rs, et d'empêcher la création
de monopoles.
Perspectives.
Les fusions d'entreprises
offrent aussi de nouvelles perspectives.
Les grand es fusions génèrent dans la
plup art des cas une forte concurrence sur
tel ou tel marché.
Les baisses des coûts
ob ten ues par la mis e en œuvre de
synergies profitent au consommateur.
De
nouveaux emplois peuvent aussi être
créés à moyen terme.
Des secteur s
d'activité qui n'intéressent pas les grands
groupes parce qu'ils n'ont pas de secteur
phar e, offrent des perspectives aux jeunes
entreprises.
Et si une fusion réussit, la
nouvelle entreprise qui en résulte peut se
développer en créant des emplois après
une phase de consolidation.
Une tendance ininterr ompue.
À l'aube
de ce change ment de siècle , rien ne
semble indiquer que la série de grandes
fusions des années 90 ne prenne fin.
Au
contraire : le processus de cons olidation
dans les secteurs les plus concerné s, tels
que l'industrie automobile, le secte ur
pétr olier, les banq ues et les télé
co mmunic ations, par exemple, n'est pas
encore achevé.
La libéra lisation, qui a
pour l'instant épargné certains domaines
comme l'électricité, va sans aucun doute
s'étendre et donne r lieu à une concur
rence interna tionale très vive.
La
tendance aux grandes fusions n'est donc
pas près de s'arr êter..
»
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