ANALYSE ET AUDIT DOSSIER DE RECHERCHE La presse cinématographique Balkis ABED-MERAIM - Charlène DURET 19/12/2012 SOMMAIRE Introduction ...........................................................................................................................................2 I - Le fonctionnement de la presse du septième art .............................................................3 1) Historique ...................................................................................................................................3 2) Caractéristiques .......................................................................................................................4 3) Profils ...........................................................................................................................................5 II - Le champ journalistique et le champ cinématographique sont interdépendants ...................................................................................................................................8 1) La presse cinématographique a besoin du cinéma... ..............................................8 2) ...mais le cinéma a aussi besoin de la presse cinématographique ..................10 III - Et le public dans tout ça ? .....................................................................................................13 1) Les succès ne sont pas forcément dus à la critique .......................................13 2) Comment le public appréhende-t-il alors la critique cinématographique ? .......................................................................................14 Conclusion ............................................................................................................................................16 Annexes .................................................................................................................................................17 ? Entretien 1 ..................................................................................................................17 ? Entretien 2 ..................................................................................................................26 Webographie ......................................................................................................................................29 1 Introduction Notre choix de domaine s'est porté sur la presse magazine spécialisée dans le cinéma. Pourquoi ? Les Français sont les plus grands lecteurs de presse magazine au monde et le cinéma est un loisir très répandu en France. Cette presse constitue de ce fait un terrain de recherche propice pour observer et analyser une pratique journalistique, nous permettant de nous focaliser sur un domaine particulier plutôt que sur une catégorie d'âge ou une catégorie sociale. Nous avons donc choisi de nous pencher sur les liens entre le cinéma et la presse afin de répondre à la question suivante : Quel est le degré d'interdépendance entre le champ médiatique et le champ cinématographique ? A travers nos observations et recherches, nous tâcheront de relever ce qui caractérise le journalisme culturel, ici cinématographique, du reste de la profession journalistique. Comment rendre compte et présenter aux lecteurs un film de cinéma qui demeure à un certain degré une oeuvre artistique ? Nous supposons qu'un certain aspect commercial, dont une relation étroite avec les annonceurs, peut porter préjudice à l'objectivité des journalistes, ce qui ferait que la profession perd de sa valeur. Les critiques joueraient un rôle dans le succès ou flop d'un film. Le cinéma quant à lui aurait besoin de l'intermédiaire de la presse pour accéder à son public et déploierait de ce fait de très grands moyens pour intéresser la presse, et par extension capter l'attention du public. 2 I - Le fonctionnement de la presse du septième art 1) Historique Une des premières revues consacrée au cinéma en France a vu le jour en 1903, nommée Le Fascinateur, et qui durera plus de trois décennies. Cette publication mensuelle catholique visera à mettre en garde contre l'influence jugée néfaste et immorale du cinéma à l'époque, et va tenter d'établir un lien entre l'église catholique et le cinéma, se réapp ropriant ce média pour son propre intérêt et l'utilisant ainsi pour sa propagande. Le Fascinateur proposera aussi dans sa revue des conseils pour la projection et des informations techniques sur les nouveaux équipements cinématographiques. On voit que la raison première de l'apparition de la presse cinématographique n'était pas de rendre compte des contenus réalisés. On se focalisait surtout sur l'aspect technique du cinématographe. D'autres revues et périodiques traitant du cinématographe (appareil inventé en 1985 par les frères Lumière) font leur apparition au début des années 1900, mais traitant le cinéma sous un angle technique. A partir de la fin des années 1910, des journaux d'informations générales commencent à intégrer le cinéma dans leurs publications, comme par exemple Le Figaro et Paris-Matin, qui font appel à des cinéastes pour ces chroniques spécialisées. Il est important de souligner que jusqu'aux années 1920 en France, la critique cinématographique était assez timide, car le cinéma n'était pas encore considéré comme un moyen d'expression artistique, mais comme moyen de divertissement -pour certains de bas étage- ne réclamant ainsi aucune nécessité de réflexion poussée sur le sens que peut véhiculer ce média, sur la mise en scène ou sur le travail artistique. Emile Vuillermoz est l'homme qui a fondé la critique cinématographique en France, vers le milieu des années 1910, et a révolutionné la façon d'aborder le cinéma. Il écrivait dans Le Temps, ainsi que Louis Delluc, qui est considéré comme l'inventeur du mot « cinéaste «. Commence alors un changement de perception envers cette technique. Le cinéma français doit beaucoup aussi à la bande des Cahiers du Cinéma, réunis autour d'André Bazin, bande composée de cinéastes illustres, Godard, Truffaut, Chabrol, etc. Les revues cinématographiques sont aussi un des éléments déclencheurs dans la formation de ce qu'on appelle le « star-system «, par la mise en avant des vedettes de films en couverture, à travers les illustrations et la photographie dans leurs publications. L'histoire prouve que l'écran a été étroitement accompagné par l'écrit, et que l'évolution de la presse cinématographique s'est faite parallèlement avec l'évolution du cinéma. Les grands changements qui ont bouleversés l'histoire du cinéma se sont répercutés sur cette presse spécialisée dans le domaine. 3 2) Caractéristiques Le marché de la presse cinématographique en France est fourni et de nombreuses revues de cinéma existent aujourd'hui, on en dénombre presque une trentaine ! Les deux plus importants titres de presse actuels, spécialisés dans le cinéma et touchant le grand public, sont Première et Studio Ciné Live. D'autres revues cinématographiques se focalisent sur un genre particulier, comme Ecran Fantastique et S.F. Magazine, d'autres visent un public plus pointu, comme Eclipses, et certaines possèdent une histoire et une identité discursive très forte, avec comme exemple suprême Les Cahiers du Cinéma qui existent depuis 1951, ou encore Positif, fondé en 1952, et grand rival des Cahiers. Pour la seule année 2012, le monde de la presse a assisté à l'apparition de cinq nouveaux périodiques spécialisés dans le cinéma ! Jean-Michel Frodon, journaliste à Slate.fr et historien de cinéma, explique ce phénomène de multiplication des titres de presse, à RFI : « d'une part il y'a la montée en puissance vraiment importante des études en cinéma, qui est constitué d'un public plus captif, plus ciblé. Alors on parle plus de grand public, mais cela représente quand même les milliers d'enseignants et d'étudiants en France, et beaucoup de ces revues peuvent vivre de manière correcte avec une part de ce marché-là «. Cela signifie-t-il que la presse cinématographique est épargnée par la crise qui touche la presse écrite ? La réponse est non. Il y'a une vingtaine d'années, le magazine Première tirait à 400 000 exemplaires. Aujourd'hui le chiffre est environ à 150 000 exemplaires. Beaucoup de titres naissent chaque année, mais beaucoup meurent prématurément aussi. La presse cinématographique est elle aussi en crise, et ce pour plusieurs raisons. D'abord, le sujet du cinéma a commencé, depuis une dizaine d'années, à être abordé dans énormément de médias : Les journaux gratuits type 20 minutes, Metro ou Direct Matin, la presse féminine, la presse culturelle, les journaux télévisés, les blogs et les sites internet spécialisés... Une autre raison qui fait que la presse cinématographique est en crise est la facilité d'accès aux films et à des prix faibles, à travers le téléchargement, légal ou illégal, et les cartes de cinéma illimitées. Le cinéma français est aujourd'hui en pleine expansion, très vivant, et le public français est considéré comme un public cinéphile et réceptif. L'univers du cinéma est visuel, très attractif, et relativement accessible comme art. Tout le monde peut donner son avis la dessus. D'ailleurs, François Truffaut disait : « tout le monde a deux métiers : le sien et critique de cinéma «. Qu'est-ce qu'une bonne critique de film ? Penser que la critique doit être composée essentiellement d'un résumé du film, et des éléments qu'a apprécié ou qu'a déprécié le critique, est une vision assez superficielle, et qui ne rend pas justice à certains critiques qui ont une approche analytique et poussée du film. Il est vrai que la critique d'un film manque de règ les fiables qui encadrent l'article. Il n'y a pas de vraie scientificité, pas de critères distincts pour définir un « bon « film. 4 On peut néanmoins distinguer deux sortes de critique de films : une critique qu'on appellera subjective, qui est essentiellement basée sur le ressenti émotionnel du spectateur/écrivain, où la personnalité de ce critique se reflète à travers son compte rendu. Et la deuxième sorte , une critique « objective «, où le critique tente d'appliquer l'objectivité et de prendre du recul pa r rapport au film pour tenter d'en rendre compte, de l'analyser, en soumettant son écriture et sa critique à des normes, et éloignant son ressenti personnel. Cette façon de distinguer peut s'apparenter à une distinction entre discours d'amateur, d'un passionné, et le discours d'un professionnel possédant un diplôme ou ayant travaillé dans le domaine cinématographique. Mais qu'est ce qui garantit donc la légitimité du discours ? Des connaissances solides sont -elles le critère le plus important qui mène à considérer un discours sur un film comme « vrai « ? Marc Esposito, grand journaliste de cinéma et aujourd'hui réalisateur, déplore la détérioration du métier de critique : « Le rôle assigné à la critique ne me semble pas avoir évolué, depuis des lustres. Ce qui a évolué c'est l'uniformisation des critiques. Tous les critiques aiment et détestent grosso modo les mêmes films. Plus aucun critique n'existe individuellement «. Pour Charlotte Garson, critique aux Cahiers du Cinéma, la première fonction du critique est de filtrer, d'être une sorte d'« entonnoir «, c'est-à-dire choisir et mettre en avant certains films, théoriquement les films intéressants, à voir, pour que le lecteur s'y repère. Cette fonction est primordiale, car le lecteur n'a pas le temps de visionner tous les films. Ensuite, il doit y avoir une fonction informative, on rappelle qui est le réalisateur, ses oeuvres précédentes par exemple, des informations sur la fiche technique du film, la distribution, les récompenses, etc. donc une approche journalistique. Pour Charlotte Garson, un bon critique doit s'éloigner de la question « qu'est-ce que j'en ai pensé «, mais plutôt aborder le film sous la question « qu'est -ce que c'est ? «. Cette approche permet, selon elle, de « démonter « le film, de l'exami ner sous toutes ses coutures, permettant d'offrir un compte rendu de qualité à ses lecteurs. 3) Profils La presse cinématographique fait rêver beaucoup de gens. Aller au cinéma gratuitement, écrire ses impressions sur un film comme on le raconte à ses amis, travailler chaque jour au rythme de tous les nouveaux films qui sortent chaque semaine. Tout cela peut paraître simple et accessible. Mais celui qui travaille dans la presse cinéma, n'est-t-il pas journaliste avant tout ? Un véritable professionnel ? Un parcours atypique Nombre de journalistes en presse cinématographique ne sont à la base...pas des journalistes. Du moins, n'en ont pas la formation. En effet, beaucoup de ces journalistes ont ce qu'on pourrait qualifier de parcours atypique. Ils viennent très souvent d'horizons divers et se retrouvent en presse cinéma "par hasard". 5 Ecrire sur le cinéma ne correspond pas tant à utiliser des techniques journalistiques préalablement acquises qu'à mettre en application une solide culture cinématographique. Il n'existe pas de formation concentrée uniquement sur le journalisme de cinéma ; aussi les possibilités de parcours se multiplient, offrant au cinéma et à la presse un ensemble hétéroclite de profils journalistiques. Gérard Delorme, rédacteur en chef adjoint chez Première en est l'exemple probant. Diplômé de l'IPAG et spécialisé en marketing, il est loin d'avoir suivi une formation que l'on pourrait juger adéquate pour devenir journaliste/critique. Celui-ci insiste d'ailleurs sur le fait "qu'on peut venir de partout" tout en soulignant qu'il vaut tout de même mieux avoir une certaine formation générale, qu'elle soit littéraire ou artistique car, pour être critique, il faut bien entendu disposé d'un certain sens de l'analyse et développer un esprit critique, ce q ui se travaille et n'est pas à la portée de n'importe quel cinéphile amateur. C'est au travers de stages ou de piges qu'ils parviennent à trouver un point de départ à leur carrière. Pour autant, le milieu n'est pas dénué de journalistes professionnels qui, dans le cadre de leur évolution, on finit par tomber dedans. C'est une tendance observable chez les plus jeunes journalistes qui, de plus en plus, viennent d'une formation générale en journalisme. Des passionnés avant tout ! Pour travailler de pair avec le monde du cinéma, il faut être passionné, être prêt à regarder des dizaines de films par semaine, avoir envie de donner envie à ceux qui liront les articles. Cette passion du cinéma est chez une grande majorité de journalistes la principale raison de leur arrivée dans cette spécialisation, comme en témoigne nos deux journalistes interrogés. Gérard Delorme qui étudiait le commerce était également passionné de cinéma. Il se lança dans le métier quand une émission à la radio proposa aux auditeurs de présenter une émission. "C'est exactement ce qui m'intéressait [...] j'avais envie d'en parler" dit -il. Sa passion l'avait emporté. Clément Sautet, passionné depuis son plus jeune âge, aura quant à lui ainsi consacré entièrement ses études au cinéma, depuis l'option cinéma au lycée jusqu'au master de cinéma. La passion du cinéma reste donc la principale raison à l'arrivée en presse cinéma, comme en témoigne d'autres journalistes : "Simple passion et envie de partager des impressions" (Allaoui Mounie), "J'ai toujours été passionné de cinéma" (Chiche René), "J'aime le cinéma depuis mon plus jeune âge" (Frodon Jean-Michel). C'est grâce à leur passion que les journalistes ont pu se forger, en tant que cinéphiles chevronnés, une solide culture cinématographique, essent ielle au métier. 6 Un tremplin pour certains Certains journalistes cinématographiques ont en fait d'autres idées à l'esprit. Beaucoup y voient un tremplin vers les métiers du cinéma, notamment la réalisation. C'est ainsi une façon pour eux de parler du cinéma qu'ils aiment et qu'ils ont envie de faire, de savoir ce qu'ils vont bien pouvoir apporter de plus au cinéma alors même qu'ils sont confrontés à des dizaines de films différents. C'est par exemple le cas de Christophe Gans, ancien rédacteur en chef du