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Comment doit-on définir la monnaie ? Par Marie-Brigitte NKOO MABANTULA

Publié le 28/08/2012

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Mais la monnaie n’est pas une invention contemporaine qui serait liée à l’économie du marché, et qui serait venue remplacer un système de troc où les échanges s’effectuaient en nature, sans une quelconque intervention de la monnaie, comme le prétendent bon nombre d’économistes. Plusieurs études archéologiques, historiques et anthropologiques ont démontré que les sociétés les plus anciennes possédaient des monnaies. Simplement la forme et l’usage de ces monnaies archaïques diffèrent énormément de celles que nous connaissons aujourd’hui. Les origines de la monnaie sont donc indépendantes de celles du marché. Et même alors, bien qu’elle soit dominante dans les économies actuelles, il subsiste certaines sphères économiques dont les échanges se réalisent avec des monnaies différentes de celles émises par l’Etat ou les banques.

« En remettant en cause la « fable du troc », la monnaie n'est plus considérée comme un simple intermédiaire des échanges mais plutôt un moyen de paiement, « leterme de chaque échange » .

En éteignant les dettes, elle achève la relation entre créancier et débiteur. 2.3.

Réserve de valeurs En tant que réserve de valeurs, la monnaie est considérée comme une richesse au même titre que d'autres biens ou actifs financiers ; dans le sens où elle est porteused'une valeur qui peut-être transférée dans le temps.

Autrement dit, elle peut être conservée pour décaler dans le temps les paiements de biens et services.

Mais à ladifférence d'autres biens et actifs financiers, la monnaie possède une autonomie absolue par rapport au marché parce qu'elle permet d'obtenir des moyens de paiementsans être soumise au marché alors que d'autres biens ne peuvent se transformer en monnaie que par une vente ou un achat.

En tant que telle, elle est donc la liquiditépar excellence. Il importe d'émettre une certaine réserve quant aux terminologies utilisées pour définir la monnaie par ses fonctions, car elles conduisent souvent à une confusionentre la fonction et l'instrument monétaire.

La monnaie n'est pas une unité de compte, un moyen de paiement et une réserve de valeurs, elle exerce plutôt les fonctionsde compte, paiement et réserve de valeurs ; les trois fonctions principales qui lui sont traditionnellement dévolues. Aborder la monnaie au travers de ses fonctions présente certes quelques avantages.

Comme l'a si bien souligné Jean-Michel SERVET, « l'approche fonctionnelle estune étape nécessaire de repérage des pratiques monétaires.

Elle distingue dans une société des usages et des instruments de paiement et de compte ».

De plus ellepermet de capter les propriétés génériques de la monnaie ; des concepts premiers dans une théorie de la monnaie. Cependant, cette approche de la monnaie s'avère limitée à plus d'un titre :D'abord, il y a lieu de faire remarquer qu'elle conduit nécessairement à un raisonnement tautologique et circulaire : « si la monnaie est définie par ses fonctions, cesfonctions sont elles-mêmes définies par la monnaie ».

Cela implique qu'il importe nécessairement d'avoir au préalable une idée précise sur ce qu'est la monnaie avantde définir ses fonctions. Ensuite, il se pose un problème de validité de ces trois fonctions considérées comme monétaires.

Il n'est pas non plus nécessaire qu'un objet puisse remplirsimultanément ces trois fonctions pour être considéré comme monnaie.

Des trois fonctions traditionnellement dévolues à la monnaie, à savoir : compte, paiement etréserve de valeurs, celles qui nous paraissent essentielles et capables d'expliquer le fait monétaire sont les deux premières ; les fonctions de compte et de paiement.Elles sont indépendamment susceptibles d'octroyer des qualités monétaires à un objet et, de ce fait, peuvent être séparées et matérialisées à travers des supportsdifférents. Dans l'histoire monétaire de différentes nations, il a existé des monnaies qui n'étaient utilisées que soit, comme instrument de compte, soit comme moyen depaiement.

En RDC, les tissus imprimés appelés communément « wax » sont considérés comme monnaie dans certaines régions du pays parce qu'utilisés pourcompter et payer des produits agricoles comme le manioc, le maïs, le café, etc.

De même, dans le langage codé de certains réseaux, au lieu de compter la monnaie parmillions, nous avons entendu l'utilisation d'autres unités de mesures non-monétaires telles que le Kilo, le litre, … pour compter les francs congolais.

En Europe, lalivre-Tournois de l'Ancien Régime n'apparaissait que dans les comptes alors que circulait l'écu, le denier, le sol… qui sont effectivement des pièces d'or ou d'argentfrappées.

Il en est de même de la guinée anglaise, qui valait une livre et un schilling, qui s'est comptée jusqu'à l'introduction d'un système décimal.

Cette monnaien'est qu'un mode de comptage.

Il n'existe aucun billet d'une guinée. Quant à la fonction de réserve de valeur, elle n'est qu'une fonction de la monnaie à titre subsidiaire parce qu'elle ne peut constituer à elle seule une conditionsuffisante pour faire d'un objet une monnaie.

Elle doit être nécessairement associée aux deux premières pour que l'on parle de monnaie.

La réserve de valeur n'est pasnon plus une fonction exclusivement monétaire parce qu'il existe une panoplie d'objets qui peuvent exercer cette fonction, voire mieux l'exercer, dans certainescirconstances – instabilité monétaire, crise politique etc.

Elle doit être considérée plutôt comme une fonction financière. Un autre point qui limite la définition fonctionnelle de la monnaie est le fait que cette approche, en instrumentalisant la monnaie, ne considère que les relationshorizontales que cette dernière établit entre les biens et passe outre celles qu'elle établit entre les parties contractantes.

Or dans ce dernier cas, ces relations sontclassées, hiérarchisées.

Cette façon d'appréhender la monnaie est purement descriptive et instrumentalise la monnaie comme intermédiaire et contrepartie et réduit lastructure monétaire à des relations contractuelles qui exigent un don et un contre don. Un dernier élément que nous pouvons avancer comme critique à l'approche fonctionnelle est le fait qu'elle ne fait que justifier l'utilisation de la monnaie sansvraiment la définir.

Or, si l'utilisation de la monnaie s'explique par des motivations d'ordre économique, la monnaie ne peut véritablement être définie qu'en prenantaussi en compte sa réalité sociale.

D'autre part, la grille de lecture fonctionnaliste ne vise qu'à cibler les comportements monétaires des agents économiques privés etlaisse de côté des dimensions institutionnelles de la monnaie. Il importe donc de dépasser la définition fonctionnelle de la monnaie, de la décentrer de l'échange marchand basé sur le principe d'équivalence, pour avoir unemeilleure idée de l'objet monétaire. 2.

Définition de la monnaie par ses pratiques Définir la monnaie par ses pratiques, c'est considérer ce qu'elle permet de faire, ou mieux, des actes qu'elle permet d'accomplir.

Jérôme BLANC est celui qui a suformaliser, avec force, cette approche.

Pour cet auteur « toute chose prend une qualité monétaire dès lors qu'elle est employée dans les pratiques monétaires, quelleque soit l'intentionnalité au moment de sa « production » – autrement dit, que cette chose soit pensée comme monnaie ou non et que cette chose ait été émise pourservir dans les pratiques monétaires ou non ».

En d'autres termes, c'est l'emploi de l'objet dans les pratiques monétaires qui détermine sa qualité monétaire.

Et ildéfinit les pratiques monétaires comme des « actes quotidiens qui impliqueraient la dimension monétaire ».

Dans cette perspective, la monnaie couvre un éventaild'instruments illimités et est considérée comme une réalité transhistorique qui n'est pas née avec les pièces et billets en circulation. Si l'approche de la monnaie par ses pratiques permet de dépasser le cadre d'analyse purement économique pour aborder anthropologiquement ou ethnologiquement lamonnaie, elle aboutit également à un raisonnement tautologique similaire à l'approche fonctionnelle.

Un acte ne peut être qualifié de monétaire que si on dispose aupréalable d'une définition de la monnaie qui lui donne cette qualification. Par ailleurs, comme l'approche fonctionnelle, la définition de la monnaie par ses pratiques cible l'analyse uniquement sur le comportement d'agents économiquesprivés et leurs pratiques, en passant outre les directives institutionnelles qui s'imposent également dans la définition du fait monétaire. Ainsi, à l'instar de l'approche de la monnaie par les fonctions, celle par les pratiques monétaires occulte la nature même de la monnaie, et par conséquent, est encoreloin de la définir.

Or, définir un être ou un objet, c'est décrire sa nature, ses caractéristiques, donner ses qualités propres, énoncer ce qu'il est, et non ce qu'il fait oupermet de faire. 3.

Définition de la monnaie par ses « états » Un effort de rupture avec la définition fonctionnelle a été réalisé par les auteurs de l'ouvrage La monnaie souveraine.

Trois éléments principaux ont été mis enévidence par ces derniers pour appréhender le fait monétaire : dette, souveraineté et confiance.

C'est ce qu'ils ont qualifié de « trépied de la monnaie ».

Mais ces. »

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