Sujet : Le roman doit-il, selon vous, privilégier l'imagination ou décrire fidèlement la réalité ?
Publié le 30/09/2010
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Depuis ses débuts au Moyen-âge, le roman n'a cessé d'évoluer. De l'époque médiévale à l'ère moderne, ses formes ont varié. Cependant, pendant tous ces siècles, ses récits ont toujours hésité entre favoriser l'imagination ou décrire fidèlement la réalité. Nous étudierons si l'auteur d'un roman doit s'accrocher aux bonnes mœurs, aux valeurs et aux aspects de sa société contemporaine, ou si, au contraire, sa narration doit faire preuve de fantaisie.
Nous verrons dans un premier temps qu'il est parfois nécessaire que son récit relève de l'imaginaire, mais qu'il est crucial, dans certains cas, qu’il reproduise fidèlement son entourage, et enfin, que, comme quelques auteurs s’y sont appliqués, il est possible de marier ces deux conceptions en toute harmonie.
Dès sa naissance, le roman fit preuve d’imagination et d’originalité par mille histoires inventées. C’est une caractéristique fondamentale, que même de nos jours, les auteurs continuent à prendre en compte.
En effet, l’imaginaire nous permet de nous divertir. Cette expression, très ancienne, provient du Latin Se divertere qui signifie «se détourner de«. Nous avons probablement besoin de nous détourner de notre destin, comme nous le fait comprendre Camus avec l'étranger jusqu'au dernier chapitre où il accepte de mourir et souhaite qu’une foule assiste à sa condamnation. Or, la vie n'est pas toujours agréable, et l'était encore moins autrefois, c'est pourquoi les romans fictifs étaient essentiels : une œuvre comme Tristan et Iseult permettait alors de faire abstraction de la vie impitoyable, de croire un instant en l'amour et oublier les mariages forcés. De même, le succès de Harry Potter est probablement dû au fait qu'il met en scène le pouvoir de jeter des sorts et de voler, ce dont rêvent maintes personnes. Calvino, en inventant Les Villes Invisibles, rend possible la rêverie de son lecteur au travers de cités aquatiques et déconcertantes telles que Sméraldine.
Par ailleurs, l'imaginaire permet parfois de critiquer un aspect de la vie réelle par antithèse : c'est le cas d’Utopia de Thomas More, qui dénonce les abus de la société de son temps en décrivant un monde parfait. Voltaire avait procédé de même, dans Candide (qui peut être considéré aussi comme un roman) : les senteurs de rose et les pierres précieuses qui jonchaient le sol de l'Eldorado s'opposaient aux rues répugnantes et aux odeurs nauséabondes du Paris du XVIIIème siècle.
Enfin, le fictif engendre le progrès et l'épanouissement des lecteurs : l'œuvre de Jules Verne Vingt mille lieues sous les mers prédisait l'avenir et sensibilisait la population lettrée à un futur très différent, tandis que les Voyages de Gulliver de Jonathan Swift, totalement inventés, incitaient les Anglais à s'ouvrir à des idées et des personnes plutôt originales.
Les auteurs peuvent donc choisir d’introduire des touches de fantaisies dans leur roman, afin de faire rêver leurs lecteurs, oublier le quotidien; mais également pour dénoncer un côté négatif de celui-ci, ainsi que s’épanouir et développer la créativité de chacun.
Cependant, certains auteurs ont une préférence pour une écriture plus vraisemblable, plus réaliste de la société dont il est entouré, et considèrent qu'il est fondamental de ne pas s'en écarter.
Il est vrai que pour qu'un roman plaise au lecteur, il faut que ce dernier puisse s'identifier aux personnages, comparer sa vie, ses opinions et ses façons d'être avec les leurs.
Par exemple, beaucoup de femmes, notamment du temps de Flaubert, rêvent d'une vie tumultueuse, d'un amour passionné et romantique, c'est pourquoi Madame Bovary semble faire ressortir un aspect positif du roman réaliste.
De surcroît, si l'auteur s'applique à décrire fidèlement la réalité, il lui est possible d'en faire ressortir des aspects qui lui sont désagréables : C'est ce pour quoi a opté Guy de Maupassant, en racontant l'histoire de Bel-Ami, un opportuniste sans scrupules profitant des femmes, de ses amis et du journalisme pour arriver à ses fins.
Enfin, tenter de peindre la vie telle quelle permettait à l'auteur mais aussi aux lecteurs d'approfondir leur connaissance d'un lieu, d'une époque ou de mœurs : On peut découvrir les rues de Paris du XIXème siècle dans Notre Dame de Paris de Victor Hugo, et l'Emploi du temps de Michel Butor nous suggère l'aspect labyrinthique des cités urbaines Anglaises.
Il est donc parfois plus utile de décrire la réalité telle qu’elle nous apparaît, car ce procédé autorise le lecteur à s’identifier aux personnages, et l’intéresse donc probablement plus vivement. C’est aussi le moyen de dénoncer clairement des défauts de la société ou d’un genre en particulier. Enfin, la véracité de l’histoire permet de retracer la vie d’un peuple, d’une ville, des coutumes, et se faire ainsi témoin historique et culturel.
Mais il s’avère que bien des auteurs privilégient une écriture conjuguant à la fois réalisme et fiction :
Après tout, pour un lecteur actuel, il n’y a pas vraiment de différence entre Harry Potter de J. K. Rowling et Eugénie Grandet de Balzac, car les deux ont une vie particulière, dans laquelle un citoyen moderne ne peut s’imaginer. Aucun roman, (même les autobiographies) ne relate la propre histoire de chacun des lecteurs, il constitue donc toujours une aventure nouvelle, qui laisse place à l’évasion du liseur.
De plus, tous les romans, quels qu’ils soient, ont tous un point commun : la vraisemblance. C’est ce qui fait que le public s’intéresse au livre. Presque tous abordent le sujet des êtres humains, relient des événements concevables de façon logique. Malgré leurs apparences, Germinie Lacerteux de Jules et Edmond de Goncourt et Les fées de Charles Perrault sont assez similaires dans le sens où leurs histoires sont plus ou moins plausibles : toutes traitent d’être humains, d’amour, d’avilie, de valeurs…
Enfin, quel que soit le choix de l’auteur, son roman abordera forcément l’imaginaire et le réel, car il s’inspire des événements passés, de son imagination. Sa conception du réel n’est pas forcément celle de tous les lecteurs, c’est une notion assez abstraite ; et les faits imaginaires qu’il tentera d’évoquer auront toujours une part de véracité. C’est ce que met en évidence le premier texte de notre corpus Le château de F. Kafka : l’époque qui tend à donner au roman un ton de fantaisie et d’imaginaire, nous rappelle en fin de compte nos ancêtres dans les châteaux forts, tandis que l’expression et les réactions du narrateur, qui se veulent typiques de notre époque, ne représentent pas forcément celles de tous les individus.
Notre Dame de Paris nous fait à la fois découvrir les rues médiévales, et l’amour d’Esméralda, et Amélie Nothomb fait appel aux camps de concentration, et un nouveau type de téléréalité dans Acide Sulfurique.
Le roman que choisira de rédiger l’écrivain constituera donc une escapade pour le lecteur qui, ne pouvant s’identifier totalement aux protagonistes, découvrira de toute manière un univers qui lui est plus ou moins inconnu. Par ailleurs, la vraisemblance est une caractéristique récurrente des romans, car c’est ce qui inspire le lecteur, le choix entre l’imaginaire et la réalité importe donc peu. Enfin, toutes les œuvres abordent les deux thèmes, car la conception de ces deux notions reste assez floue, et dépend de l’interprétation de chacun.
Après avoir étudié si l'auteur d'un roman devait s'accrocher aux bonnes mœurs, aux valeurs et aux aspects de sa société contemporaine ; ou si, au contraire, sa narration devait faire preuve de fantaisie, nous pouvons conclure que laisser place à l’imagination présente des avantages : Elle permet de distraire le lecteur, peindre une critique quelconque par opposition avec ce qui « n’existe pas «, ou encore initier la population à d’autres conceptions de la vie et de l’art que la leur.
Mais le fait de montrer la réalité telle qu’elle est aboutit également à cette critique de la société, en mettant en avant les détails dérangeants, en explicitant des faits. De plus, l’auteur apporte ainsi des informations précises sur son entourage, qui resteront le témoin d’une époque. Enfin, il est connu qu’un lecteur a besoin, pour adhérer au livre, de se reconnaître plus ou moins dans une histoire, c’est l’avantage du réalisme.
Mais quelle que soit l’option que choisit un auteur, il apporte du nouveau à son destinataire, et la vraisemblance est forcément présente dans chacune des deux ; au final, tous les romans sont partagés entre imaginaire et réalité, même les autobiographies, qui ne peuvent être totalement terre-à-terre ou entièrement inventés.
Le roman se distingue par sa longueur de la nouvelle, un récit de fiction court et en prose, tel que La princesse de Clèves de Madame de Lafayette.
Plan :
I) Le roman fait preuve d'imagination
A. L'imaginaire permet de se divertir
B. L'imaginaire permet de critiquer un aspect de la vie réelle
C. Le fictif engendre le progrès et l'épanouissement des lecteurs
II) Une écriture plus vraisemblable, plus réaliste de la société
A. Pouvoir s'identifier
B. Souligner les défauts d'une société
C. Approfondir des connaissances, s'ouvrir au monde
III) Quand réalisme et fiction se conjuguent
A. Chaque roman est une aventure nouvelle dans un univers plus ou moins connu
B. Un point commun : la vraisemblance
C. Les limites du réel et de l'imaginaire, l'interprétation
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